Un point sur l’énergie solaire

C’est un très bon article du journal ‘Le Monde’ qui nous est proposé ici. Le solaire est une formidable source d’énergie mais qui n’est pas encore pérenne car encore à la traîne technologiquement et économiquement. Dans cet article, on y dit bien que l’on pourra profiter du solaire qu’en 2030 au mieux. Alors comment faire jusque là ? Est-il bien sérieux de se passer de certaines sources d’énergie alors que certaines ne sont pas encore pérènnes ?

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 22 Mai 2012

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Les industriels du solaire comptent sur la relance promise par François Hollande
Pour survivre, la filière photovoltaïque mise sur l’innovation technologique et sur l’Etat

C’est l’un des 60 engagements de François Hollande pour la France :  » Favoriser la montée en puissance des énergies renouvelables en soutenant la création et le développement de filières industrielles dans ce secteur.  » Une tâche à laquelle vont devoir s’atteler sans tarder non seulement la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Nicole Bricq, mais aussi celui du redressement productif, Arnaud Montebourg.

Car c’est bien de  » redressement productif  » qu’a besoin une industrie photovoltaïque sinistrée, comme l’ont montré les difficultés de Photowatt, le pionnier français de l’énergie solaire, sauvé in extremis par EDF, sur intervention d’un Nicolas Sarkozy en campagne électorale. Il faut, avoue lui-même le Syndicat des énergies renouvelables (SER),  » reconstruire la filière photovoltaïque « .

Dans l’Hexagone comme dans l’ensemble de l’Europe – à commencer par l’Allemagne, où l’ex-numéro un mondial des cellules photovoltaïques, Q-Cells, a déposé son bilan -, cette filière est prise en étau, entre la chute des prix imposée par les fabricants de panneaux asiatiques et le recul des aides publiques, notamment des tarifs de rachat de l’électricité d’origine solaire, jusqu’alors consenties par les gouvernements.

 » La situation est grave. Très grave « , admet Jean-Louis Bal, président du SER qui continue pourtant de croire, contre vents et marées, que l’horizon peut se dégager. A condition d’innover. Et d’y mettre le prix.  » Si on se contente de faire du solaire standard, on n’a quasiment aucune chance de résister aux Chinois, compte tenu des investissements massifs que ceux-ci ont déjà réalisés, et des économies d’échelle réalisées sur l’achat des matières premières « , prédit-il.

De fait, en 2011, la Chine a assuré 57 % de la production mondiale de cellules photovoltaïques, et Taïwan 11 %. L’Europe n’en a réalisé que 9 %, dont près de 7 % en Allemagne. Dans le  » Top 10  » mondial des fabricants figurent cinq entreprises chinoises et deux taïwanaises, aucune Européenne. En 2011 toujours, Pékin a investi 28 milliards de dollars (22 milliards d’euros) dans la production de silicium et de cellules ; le Vieux Continent quatre fois moins, et pour l’essentiel outre-Rhin. Rien d’étonnant, dans ces conditions, à ce que le prix  » sortie d’usine  » d’un panneau solaire chinois soit 20 % moins cher que celui de son homologue européen (0,8 euro contre 1 euro le watt).

Les experts s’attendent pourtant à une redistribution des cartes.  » La guerre des prix lancée par les acteurs chinois et taïwanais a jeté l’industrie mondiale du photovoltaïque dans une spirale autodestructrice (…) avec des prix de marché ne reflétant plus les coûts réels de production « , analyse, dans son baromètre paru en avril, l’Observatoire des énergies renouvelables en Europe.  » Il existe aujourd’hui une surcapacité mondiale de production. Les stocks accumulés représentent une année de fabrication. Des restructurations sont inévitables. Beaucoup d’entreprises, y compris chinoises, vont disparaître « , ajoute Jean-François Bal.

Pour l’heure, les industriels européens courbent l’échine. En France, la filière photovoltaïque a perdu, en 2011, plusieurs milliers d’emplois. Elle n’en compte plus que 18 000 et l’hémorragie n’est pas terminée. La plupart de la quinzaine de fabricants de cellules ou de modules implantés dans l’Hexagone ont survécu, mais tous, dit M. Bal, sont  » en situation précaire « .

Paradoxalement, il ne s’est jamais installé autant de panneaux photovoltaïques en France que l’an passé : les capacités nouvelles ont représenté 1 600 mégawatts (MW), deux fois plus qu’en 2010. Mais il s’agit du portefeuille qui était en attente avant le moratoire sur les aides publiques au solaire décidé, en décembre 2010, par le gouvernement. Pour 2012, les professionnels s’attendent à retomber au niveau de 2010. Et, en 2013, à chuter à 400 ou 500 MW seulement. Or, souligne le SER,  » pour atteindre l’objectif de 20 000 MW en 2020, il faudrait tenir un rythme annuel d’installation de 2 000 MW « .

La France n’est pas sans atouts. Avec l’Institut national de l’énergie solaire (INES), qui regroupe notamment, en Savoie, des équipes du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), elle dispose de l’un des meilleurs centres européens de compétences dans ce secteur.  » Il faut continuer d’investir dans la recherche, miser sur de nouvelles technologies qui, seules, permettront de faire la différence « , plaide M. Bal.

Le marché du photovoltaïque est aujourd’hui dominé, à près de 90 %, par les cellules en silicium cristallin dont le rendement (rapport entre l’énergie solaire captée et l’énergie électrique produite) approche 20 %. Des cellules à plus haut rendement sont à l’étude dans les laboratoires. Une autre famille, celle des cellules en couches minces, qui représentent à peine plus de 10 % du marché et dont le rendement maximal est aussi de l’ordre de 10 %, se développe en raison de ses coûts de fabrication réduits. A plus long terme, de nouveaux systèmes, par exemple à base de polymères, dont le rendement ne dépasse pas aujourd’hui 5 % avec une durée de vie très courte, pourraient trouver des applications spécialisées.

Reste que si les Européens, comme les Américains, possèdent encore une certaine avance technologique sur leurs concurrents asiatiques, ceux-ci ont toutes les chances de combler rapidement leur retard. Aussi la pierre angulaire est-elle davantage, selon Jean Therme, directeur de la recherche technologique et directeur délégué aux énergies renouvelables du CEA,  » la capacité d’investissement « . Sa profession de foi, car c’en est une, est simple.  » Le solaire est l’énergie qui sauvera la planète. Avec l’éolien, il est en mesure de couvrir 50 % des besoins énergétiques mondiaux à l’horizon 2050, pour peu qu’il progresse de 10 % par an, et dès 2030 si sa croissance annuelle est de 20 %. « 

Or, poursuit M. Therme, la production d’énergie est une activité  » régionalisée « , qui doit être proche du lieu de consommation. Il est donc inconcevable que quelques usines géantes de panneaux solaires, implantées en Chine ou ailleurs, puissent fournir un marché mondial au développement exponentiel. Il existera donc, à terme, des unités de production  » à l’échelle d’une granderégion ou d’un petit Etat « . Et, dans le photovoltaïque, la France ne sera jamais un désert industriel. Toutefois, cela ne signifie pas que les usines qui y pousseront seront françaises : ne verront le jour ou ne se maintiendront que des entreprises disposant des ressources financières nécessaires. Peut-être seront-elles à capitaux asiatiques.

Ce scénario ne fait que ramener à l’exigence, pour l’industrie hexagonale, d’un  » redressement productif « . Et, dans l’immédiat, d’un dispositif de soutien public plus favorable aux énergies renouvelables.  » Nous n’attendrons pas l’été 2013 – un débat national sur la transition énergétique doit être suivi d’une loi au printemps prochain – pour réinstaurer un cadre réglementaire stable, visible et incitatif pour l’ensemble des filières « , a annoncé Marie-Hélène Aubert, chargée du pôle environnement dans l’équipe de campagne de François Hollande. La fin de l’éclipse solaire ?

Pierre Le Hir

    Rude bataille commerciale entre Pékin et Washington

    C’est un nouvel épisode de la guerre commerciale que se livrent la Chine et les Etats-Unis sur l’industrie solaire, les deux pays s’accusant mutuellement de dumping. Jeudi 17 mai, le département américain du commerce a annoncé la mise en place d’une taxe de 30 % environ sur les importations chinoises de panneaux solaires. Une disposition immédiatement condamnée par Pékin qui, par la voix du porte-parole du ministère du commerce, a expliqué  » que les Etats-Unis donnaient un mauvais signal, celui du protectionnisme, sur le commerce mondial « . En revanche, elle a bien été accueillie par les industriels américains qui espèrent que cette décision fera école en Europe.

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