Une manipulation pour réduire le CO2 sur notre planète ?

Cela peut être intéressant d’utiliser la manipulation dont on parle dans cet article du journal ‘Le Monde’ daté du 09 Juin 2012. Malheureusement, pour l’instant, on n’en est qu’au stade du prototype et de la recherche…

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Le CO2 recyclé en matière première ?
Des chercheurs travaillent à la valorisation industrielle et économique du principal gaz à effet de serre
Solaize (Rhône) Envoyé spécial

La  » manip  » tient dans un casier pas plus grand qu’une boîte d’apprenti chimiste. A l’intérieur, des électrodes reliées à des arrivées de gaz carbonique et d’eau. Un peu de courant, et il en sort de l’acide formique. En quelque sorte, un alambic distillant, à partir d’ingrédients mis à macérer à bonne température et à pression idoine, quelques gouttes d’un suc corsé. Rien de bien spectaculaire à première vue.

Pourtant, l’expérience d’électroréduction menée au centre de recherche de Solaize, près de Lyon, de l’IFP Energies nouvelles (IFPEN), illustre les espoirs placés dans la valorisation industrielle du CO2. Une voie étroite mais prometteuse qui pourrait permettre de recycler une partie du gaz très actif dans le réchauffement de la planète.

L’enjeu est connu. Les émissions mondiales de CO2 ont atteint en 2011 le niveau record de 31,6 milliards de tonnes (gigatonnes). Si rien n’est fait, elles auront doublé en 2050. Or, pour limiter la hausse des températures à 2 oC – et éviter que les équilibres de la biosphère soient dramatiquement compromis -, il faudrait au contraire les réduire de moitié.

Pour y parvenir, la sobriété et l’efficacité énergétiques restent la solution la plus efficace : dans le scénario optimiste de l’Agence internationale de l’énergie, elles pourraient éviter 38 % des rejets de CO2 à l’horizon 2050. Dans le même temps, le stockage de ce gaz dans des formations géologiques profondes – une piste encore à l’étude – pourrait en économiser 19 %. Pas assez, toutefois, pour éviter la surchauffe de la planète.

D’où une troisième option : la réutilisation du CO2 dans des procédés industriels. Ce qui offrirait l’avantage de lui donner une valeur économique, de réduire les importations d’énergies fossiles et, peut-être, de créer des emplois.

Aujourd’hui déjà, le gaz carbonique sert à différents usages. Les pétroliers en injectent dans les gisements d’hydrocarbures, à raison de 40 millions de tonnes par an, pour améliorer l’extraction. On en trouve aussi dans les boissons gazeuses. Il est encore employé comme réfrigérant ou comme solvant. Transformé, il est à la base de matériaux plastiques et de divers produits utilisés dans la chimie, la pharmacie, la parfumerie, le textile ou l’agroalimentaire.

Mais toutes ces applications ne consomment que 0,5 % des émissions annuelles mondiales de CO2.. Il doit être possible de faire mieux : pour certains experts, entre 5 % et 10 % de ces émissions pourraient, à terme, être  » remises dans les tuyaux « .  » La valorisation du CO2 ne remplacera pas l’efficacité énergétique et le stockage géologique, prévient Laurent Forti, de la direction scientifique de l’IFPEN. Mais il existe des marchés de niche. A partir du carbone, on peut tout faire. « 

Dans une étude réalisée en 2010 pour le ministère de l’écologie et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, la société de conseil Alcimed a identifié  » 12 voies de valorisation « , reprises, en 2011, par l’agence dans une  » feuille de route stratégique « . Le défi, écrit-elle,  » consiste à trouver de nouvelles applications en s’appuyant sur des technologies de rupture « .

Sur le papier, l’éventail des possibles est large. Avec du CO2, on peut stimuler la croissance de microalgues, d’où pourraient être extraits des biocarburants de troisième génération. Fabriquer des plastiques de synthèse. Faire du carbonate de calcium, composant principal du calcaire, pour le bâtiment et les travaux publics. Produire toute une gamme de composés chimiques (méthanol, urée, acide formique, etc.) utilisés dans la composition d’engrais, l’ensilage ou la papeterie. Ou encore stocker de l’énergie, en le convertissant en méthane injecté dans les réseaux de distribution de gaz.

Mais les obstacles restent nombreux. Il faut améliorer les procédés de captage du gaz carbonique. Il faut, en outre, de l’énergie pour casser la molécule de CO2, afin d’en isoler le carbone, puis pour recombiner celui-ci avec d’autres éléments.  » L’opération n’a de sens qu’avec à une énergie décarbonée, comme le solaire ou l’éolien, souligne Laurent Forti. Si on a recours à du fossile, au final, on produit plus de CO2 qu’on en consomme. « 

 » Il n’y a pas de solution magique, ajoute Jean-François Minster, directeur scientifique de Total. Pour éliminer des quantités significatives de CO2, il faut agir sur de gros tonnages, de l’ordre de la centaine de millions de tonnes, et fabriquer des produits qui vont stocker le carbone sur une longue durée, comme les plastiques ou le calcaire. Mais ce sont des marchés à faible valeur ajoutée. Les marchés à plus forte valeur ajoutée, eux, sont de petite taille. « 

Tout ou presque – faisabilité technique, rentabilité économique, bénéfice environnemental – reste donc à prouver. Dans ce domaine, les Etats-Unis, le Japon et la Chine ont pris plusieurs longueurs d’avance sur l’Europe. En France, des entreprises commencent pourtant à s’intéresser à la valorisation du CO2.. Air Liquide est ainsi partie prenante des projets de culture de microalgues Green Stars et Salinalgue.

A ses côtés, d’autres groupes industriels, dont Areva, EDF, Rhodia ou Veolia Environnement, sont engagés, avec des équipes du CNRS et du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, dans un programme financé par l’Agence nationale de la recherche. Portant sur la conversion du CO2 en méthanol, ce programme est intitulé  » vitesse2 « . Il y a en effet urgence, pour contrôler le dérapage des émissions de CO2, à passer à la vitesse supérieure.

Pierre Le Hir


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