Un entretien intéressant sur la croissance verte

Il y a quelques temps de cela, est paru sur le journal ‘Le Monde’ un entretien très intéressant sur la croissance verte. Cette interview avait comme cadre la conférence « Rio + 20 », qui s’est finie en eau de boudin, comme d’habitude.

On rappelle donc ici, les enjeux de cette croissance verte et sur ses aspects inéluctables concernant le bien être de toutes les espèces qui peuplent notre planète.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 11 Mai 2012

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 » La croissance verte n’est pas un luxe, c’est une opportunité de développement « 
L’économiste Stéphane Hallegatte est l’un des auteurs du rapport publié le 10 mai par la Banque mondiale, intitulé  » Croissance verte pour tous « 

La croissance verte sera au coeur de la conférence de  » Rio + 20  » sur le développement durable, qui se tiendra au Brésil du 20 au 22 juin.

Dans ce contexte, la Banque mondiale a publié, jeudi 10 mai, un document sur la  » Croissance verte pour tous « . Le rapport insiste sur le fait que la croissance verte, loin d’être un luxe que la plupart des pays ne pourraient pas s’offrir, est plutôt une opportunité : elle permet aux économies de se développer tout en respectant l’environnement et en luttant contre la pauvreté.

Stéphane Hallegatte, économiste français qui a participé à la rédaction du texte, explique au Monde pourquoi les pays en développement sont concernés au premier chef par la croissance verte.

Un certain nombre de pays émergents considèrent que le respect de normes environnementales risque de brider leur croissance. La situation évolue-t-elle ?

Beaucoup de pays ont longtemps dit  » Grow now, clean up later « , c’est-à-dire  » la croissance d’abord l’environnement plus tard « . Mais les choses bougent.

Les pays émergents sont à leur tour confrontés à des problèmes environnementaux : surexploitation des ressources, pénurie d’eau, pollution, déchets, épuisement des sols… Et réalisent qu’ils doivent les prendre en compte pour assurer une croissance durable.

Aujourd’hui, par exemple, les pays en voie de développement construisent leurs villes. Mais, les formes urbaines étant quasiment irréversibles, c’est maintenant qu’il leur faut concevoir autrement ce développement. S’ils ne le font pas rapidement, ils le regretteront dans trente ans.

Certaines questions sont urgentes. Pour les plus pauvres, la sauvegarde des tigres n’est peut-être pas une priorité. En revanche, le traitement des déchets qui s’accumulent ou de la pollution de l’eau sont cruciaux.

Vous insistez sur le lien entre croissance verte et politique sociale. Les deux sont-ils indissociables, notamment dans les pays en développement ?

Bien sûr. Si les pays veulent construire des politiques durables, cela ne peut se faire que si les plus pauvres sont associés à cette croissance verte.

Plus de 60 % de la population africaine n’est pas connectée à un réseau d’électricité. Les plus pauvres paient leur électricité plus cher que les autres, en ayant recours à des groupes électrogènes qui utilisent des énergies fossiles, ou en achetant des piles.

En développant les réseaux électriques, vous améliorez l’impact environnemental et vous développez une politique sociale. On a ainsi calculé que la fourniture d’électricité au 1,4 milliard de personnes qui en sont privées dans le monde conduirait à une hausse des émissions de CO2 en raison du recours accru aux énergies fossiles aujourd’hui prédominantes. Mais elle serait compensée par la seule mise aux normes européennes du parc automobile américain !

Cette croissance verte peine à s’imposer. La crise économique est-elle un obstacle ?

La crise a bien sûr limité les ressources financières. Mais elle agit aussi comme une opportunité. Dans le cadre de sa politique de relance, la Corée, par exemple, a créé de nombreux emplois dans la restauration forestière. Les obstacles sont plutôt de nature politique. Quand un gouvernement décide de modifier sa politique de subventions aux énergies fossiles, il se heurte à des lobbies industriels, mais aussi à des franges de la population, parfois aisées, qui profitaient également de ces aides.

Il existe aussi un levier qui n’est pas économique : celui des comportements. Consommer plus d’énergie, avoir plusieurs voitures, une maison individuelle… c’est afficher un statut social. Dans le rapport, nous montrons, en nous servant des exemples de la santé et de l’hygiène, que jouer sur l’éducation et les normes sociales est parfois plus efficace pour faire basculer les pratiques et les habitudes.

Il reste bien sûr le problème des investissements et des financements. Mais, en utilisant les ressources naturelles plus efficacement, la croissance verte ne coûte pas plus cher, surtout si l’on prend en compte les coûts de la dégradation de l’environnement, que l’on estime aujourd’hui à 2 % du produit intérieur brut en Tunisie et à près de 10 % en Chine.

Propos recueillis par Rémi Barroux


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