Quand le pouvoir a oublié les règles de sa séparation

La séparation des pouvoirs, en France, sert à ce que le politique ne puisse interférer dans le pouvoir judiciaire. Làs, il a suffit de donner à M. Courroye une petite carotte pour une nomination à un poste prestigieux pour que le magistrat oublie ces principes élémentaires et obéisse aveuglément au pouvoir politique.

Bien évidemment que M. Courroye ment et prend les juges et enquêteurs pour des cons ! La preuve est dans une similitude plus que troublante entre les rendez-vous personnels avec le chef de l’Etat et tous les évènements judiciaires liés à l’affaire Bettencourt ! Les rendez-vous n’étaient pas faits pour prendre le thé ! La preuve, on demandait expressément au juge de passer par derrière ! S’il n’y avait rien à cacher, pourquoi ne pas passer par le grand portail ?

Décidement le juge Courroye est une belle ***(réprimé article 433-5 Code Pénal)***  !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 13 Octobre 2012

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Affaire Bettencourt : les rendez-vous secrets de M. Sarkozy
L’enquête montre que l’ex-chef de l’Etat a rencontré à de multiples reprises le procureur Courroye sur le dossier

Huit rendez-vous, de septembre 2008 à mars 2011 : Nicolas Sarkozy, président de la République, a reçu à l’Elysée au moins à huit reprises Philippe Courroye, alors procureur de Nanterre, et ce au plus fort de l’affaire Bettencourt. Des tête-à-tête qui figurent dans les agendas (2007-2011) et les courriels saisis le 3 juillet par les juges dans les bureaux et au domicile de M. Sarkozy. Parfois, les rendez-vous sont confirmés par courriel. Souvent, ils ne sont inscrits que dans l’agenda privé de M. Sarkozy.

S’y ajoutent des rencontres entre le chef de l’Etat, ses deux conseillers justice successifs, Patrick Ouart et Jean-Pierre Picca, et son avocat, Me Thierry Herzog, à des moments-clés de l’affaire.

Les investigations des magistrats révèlent ainsi la spectaculaire immixtion du pouvoir politique dans le cours d’une enquête judiciaire sensible qui menaçait directement l’Elysée. Philippe Courroye, convoqué le 2 octobre à Bordeaux, a dû s’expliquer devant les juges. Le Monde a eu accès à son procès-verbal d’audition.

Les archives présidentielles ne mentent pas. Ce 20 juillet 2009, l’agenda personnel de Nicolas Sarkozy, porte la mention  » 13 h 30 Ph C « , quand l’agenda officiel ne fait état que d’un  » Rdv privé « . Le courriel de confirmation spécifie une  » arrivée par le parc « , attention réservée aux hôtes que l’on souhaite recevoir en toute confidentialité. Pour les magistrats, ce  » Ph C  » ne peut être que Philippe Courroye, discret visiteur du midi, alors que l’affaire Bettencourt bat son plein. Que vient-il faire à l’Elysée ?

Les juges d’instruction Jean-Michel Gentil, Cécile Ramonatxo et Valérie Noël, qui enquêtent sur les abus de faiblesse dont aurait été victime Liliane Bettencourt, possédaient déjà les enregistrements clandestins opérés, entre mai 2009 et mai 2010, au domicile de la milliardaire par son majordome. En rapprochant les éléments dont ils disposent, en se fondant sur les dates charnières de l’affaire Bettencourt, les juges pensent tenir l’explication des visites de M. Courroye à l’Elysée. Une chronologie très embarrassante pour M. Sarkozy.

Le 15 juillet 2009, Françoise Meyers – la fille de Liliane Bettencourt -, qui sent sa plainte initiale déposée à Nanterre le 19 décembre 2007 en voie d’enlisement, signifie à l’écrivain François-Marie Banier et confident de sa mère une citation à comparaître devant le tribunal correctionnel. Cinq jours plus tard, le 20 juillet 2009, MM. Sarkozy et Courroye se rencontrent, donc.

Le lendemain, le 21 juillet 2009, Patrice de Maistre, gestionnaire de fortune de la milliardaire, annonce à Liliane Bettencourt que selon son  » informateur  » à l’Elysée, Patrick Ouart, le parquet de Nanterre va classer la plainte initiale de sa fille, à la rentrée. Ce que M. Courroye fit, en effet, le 22 septembre 2009. Comment l’Elysée pouvait-il être au courant, aussi précisément, des intentions du procureur ? Pour les magistrats, la visite de M. Courroye à l’Elysée, le 20 juillet 2009, prend tout son sens.

Quelques mois plus tôt, le 7 février 2008, Mme Bettencourt était reçue à l’Elysée, où elle rappelait notamment au président de la République qu’elle avait contribué au financement officiel de l’UMP. Le soir même, Nicolas Sarkozy a un dîner, à 20 h 30. Avec  » Ph C « .

Les 24 et 25 septembre 2008, la brigade financière procède à d’importantes auditions dans le cadre de l’enquête préliminaire alors gérée par le parquet de Nanterre. Trois jours après, le 27 septembre 2008, M. Courroye rencontre M. Sarkozy, ainsi que l’atteste un courriel saisi au bureau de l’ex-président :  » Rdv privé Ph Courroye 12 h 30-13 h « . Question des juges à Philippe Courroye :  » Est-ce que vous avez rendu compte à Nicolas Sarkozy des premiers éléments de l’enquête préliminaire ?  » Dénégations offusquées de l’intéressé.

Mais les magistrats insistent. Ils ont soigneusement confectionné des tableaux où les dates importantes de la procédure sont mises en exergue. Ainsi, le 9 janvier 2009, M. Courroye saisit les services fiscaux des Hauts-de-Seine d’une présomption de fraude fiscale de Liliane Bettencourt. Le 16 janvier 2009, l’agenda privé de M. Sarkozy porte cette mention :  » Rdv privé 18 h 30-19 h « . Dans un autre agenda de l’ex-président, on retrouve l’incontournable  » Ph C « . Question des juges :  » Avez-vous rendu compte à Nicolas Sarkozy de l’enquête sur la fraude fiscale ?  » M. Courroye, là encore, dément.

Quatre jours plus tard, le 20 janvier 2009, M. Courroye est destinataire d’un courrier des avocats de François-Marie Banier, accompagné de divers documents. Le 22 janvier, le magistrat se déplace de nouveau à l’Elysée, comme l’atteste un courriel, saisi dans les actuels bureaux de M. Sarkozy, rue de Miromesnil, qui comporte cette mention :  » Rdv privé Ph Courroye 12 h 30-13 h.  » Interrogation des juges :  » Etait-ce pour le tenir informé des documents remis par les conseils de François-Marie Banier ?  » Nouvelle réponse négative.

Arrive alors le 3 septembre 2009, quand la citation directe de Françoise Meyers est jugée recevable par le tribunal. Branle-bas de combat à Nanterre, le parquet fait immédiatement appel et, dix-neuf jours plus tard, classe l’enquête préliminaire. Le 27 septembre 2009, M. Courroye file encore une fois à l’Elysée.  » Rendez-vous ou convocation ? « , se demandent les juges.

Autre coïncidence troublante : le 10 juin 2010, les enregistrements clandestins du majordome sont déposés par Françoise Meyers à la brigade financière. Deux jours plus tard, le 12 juin 2010, Philippe Courroye est reçu à l’Elysée, ainsi que l’atteste un courriel :  » Rdv privé Nicolas Sarkozy/Philippe Courroye 16 h-16 h 30.  » Il se défend :  » Je n’ai bien évidemment pas informé Nicolas Sarkozy de l’existence de ces enregistrements. « 

Le 11 septembre 2010, nouveau rendez-vous privé entre les deux hommes, avec cette fois une  » arrivée par le jardin  » pour l’ex-procureur. Le 15 septembre 2010, M. Courroye se rend en Suisse, où se trouve la clef du financement illicite dans l’affaire Bettencourt. Il en revient sans information notable, au grand étonnement des juges.

En effet, les magistrats bordelais, eux, ont mis au jour un vaste système de financement occulte qui aurait profité à M. Sarkozy. D’après les éléments qu’ils ont recueillis en Suisse, Eric Woerth, alors trésorier de l’UMP, et Patrice de Maistre se seraient entendus pour rapatrier en toute discrétion des fonds. M. Sarkozy s’est par ailleurs rendu au domicile des Bettencourt, au moins une fois, le 24 février 2007. Et il y a encore cette phrase de Liliane Bettencourt, retranscrite par François-Marie Banier, son ex-protégé, dans son journal :  » De Maistre m’a dit que Sarkozy avait encore demandé de l’argent. J’ai dit oui. « 

Les magistrats ont donc les dates, les montants, le modus operandi. D’ailleurs, ils ont été jusqu’à interroger de manière pressante M. Courroye :  » Etes-vous en mesure d’apporter des éléments qui pourraient expliquer que M. de Maistre se rende en Suisse – en décembre 2008 – faire débloquer 2 000 000 d’euros quinze jours après un rendez-vous avec Nicolas Sarkozy ?  » L’ex-procureur parle de  » faits dont il ignore tout « .

Les juges bordelais, outre les investigations sur le financement occulte, enquêtent donc sur la gestion judiciaire de l’affaire Bettencourt. Ils postulent que M. Sarkozy, parvenu au pouvoir, et instruit des déchirements internes chez les Bettencourt, aurait voulu contrôler, voire étouffer, les investigations lancées après la plainte pour abus de faiblesse de Mme Meyers, afin d’éviter un grand déballage… Avec M. Courroye – un proche depuis 2000 -, nommé procureur en mars 2007 à Nanterre, M. Sarkozy disposait d’un allié sûr : il savait son ami désireux d’être nommé à la tête du parquet de Paris.

Xavier Musca, secrétaire général de l’Elysée entre 2011 et 2012, a d’ailleurs confirmé le 2 octobre devant les policiers les ambitions de M. Courroye :  » Il – M. Musca – déclare qu’il vous a rencontré une fois à l’Elysée à l’automne 2011, relatent les juges, (…), que vous avez demandé un rendez-vous pour faire valoir votre candidature au poste de procureur de Paris. Pourquoi un rendez-vous à l’Elysée pour soutenir une candidature ?  » Sèche réponse de M. Courroye :  » Xavier Musca se trompe. A ce moment-là, le poste était déjà pourvu…  » Lors de son audition, M. Courroye a martelé :  » Il ne faut pas interpréter les rencontres que j’ai pu avoir avec Nicolas Sarkozy. « 

Les juges bordelais ont pourtant cette tentation. Ils s’apprêtent à convoquer M. Sarkozy, qui devrait être interrogé dans le dossier d’abus de faiblesse.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme


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