Un économiste qui ferait bien mieux de changer de métier

Très clairement, ce papier est mauvais. Avant tout parce qu’un économiste est mauvais par définition… Un économiste c’est un type qui va dire pour quelles raisons on a eu des crises économiques. Par contre, quand il s’agit de les prévoir, bien évidemment, il n’y a plus personne…

Donc, là, ce Monsieur nous explique quoi ? Il nous explique, le plus sérieusement du monde que lorsque l’on fait une politique d’économie, ça fait rentrer de l’argent, ou pas, dans les caisses. On met un peu de maths pour rendre les choses sérieuses en définissant un coefficient multiplicateur, et hop, on arrive à dire si on gagne de l’argent. Le problème c’est que comme ce coefficient est variable, on ne sait pas si on économise du fric ou non.

Bref, on définit un coefficient multiplicateur pour donner un caractère scientifique à l’article, mais on se garde de déterminer le dit coefficient, ou en avouant, et ça revient au même, qu’on s’est trompé sur sa définition.

Quant au fond du problème, il est clair : quand on emprunte de l’argent, il faut le rembourser. Point barre. Ne pas rembourser un emprunt revient à mettre dans la mouise la personne à qui on emprunte de l’argent. Ne pas rendre l’argent emprunté revient à voler la personne qui nous l’a prêté. Ni plus, ni moins.

Cette phrase est donc une bêtise absolue : « Car désigner  » la gestion désastreuse des finances publiques depuis trente ou quarante ans  » pour justifier les politiques d’austérité est tout simplement fallacieux, puisque le surendettement actuel (et non pas l’endettement) des Etats est entièrement dû aux conséquences directes de la crise financière. ». Car on doit, en tant qu’emprunteur de rembourser ses emprunts. Si on ne les rembourse pas, on engage la santé financière de son pays en payant toujours plus d’intérêt, mais aussi les autres pays qui subissent les pertes liées au non remboursement.

Je suis sûr que cet économiste apprend à ses enfants qu’il faut qu’ils gèrent correctement leur compte en banque pour ne pas qu’ils soient dans le rouge, alors pourquoi justifier une politique d’emprunt permanent et ne pas se rendre compte que ne pas savoir gérer un budget peut engendrer des conséquences fâcheuses à terme ? Ce qui est valable pour le particulier ne l’est-il pas pour un état ? Bien sûr que si, et cet économiste, en le niant, ne fait que démontrer sa plus parfaite incompétence… Incompétence payée par le contribuable car ce Monsieur est… Professeur d’Economie ! Vive la France !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 29 Janvier 2013

***************

Erreur de calcul du FMI ? Ou excès des zélateurs de l’austérité ?

La publication, en ce début d’année, d’un document de travail du Fonds monétaire international (FMI) a mis les économistes du monde entier ainsi que certains médias en état d’ébullition. Il a été produit par l’économiste en chef du Fonds, le Français Olivier Blanchard, et par Daniel Leigh, un autre collaborateur du FMI qui suit à la loupe l’évolution des perspectives de l’économie mondiale. Ce texte est intitulé  » Erreurs de prévisions de croissance et multiplicateurs budgétaires  » (Growth Forecast Errors and Fiscal Multipliers, FMI, Working Paper no 2013/1, janvier 2013).

Dans ce rapport, Olivier Blanchard et Daniel Leigh admettent, non pas une erreur de calcul au sens strict, mais une difficile et sans doute mauvaise estimation du  » multiplicateur budgétaire « .

Il faut rappeler ici que le principe, très keynésien, du  » multiplicateur budgétaire  » établit qu’un euro dépensé ou économisé par un acteur public génère une augmentation ou une perte de revenu pour l’économie nationale concernée qui peut être supérieure ou inférieure, selon la valeur dudit multiplicateur, au montant de la dépense ou de l’économie publique. Ainsi, dans le cas d’une baisse de la dépense publique d’un euro, un multiplicateur supérieur à 1 suggère un repli du revenu national supérieur à un euro.

Dans leur document de travail, Olivier Blanchard et Daniel Leigh, considérant qu’ils avaient retenu jusqu’ici un multiplicateur égal à 0,5, suggèrent, au vu des statistiques effectives de la croissance, que ce multiplicateur était sous-estimé et probablement supérieur à 1.

Et les deux économistes de citer les travaux de leurs collègues Alan Auerbach et Yuriy Gorodnichenko (2012), tous deux de l’université californienne de Berkeley, effectués sur des données américaines, qui situent ce multiplicateur entre zéro en temps  » normal  » et environ… 2,5 en période de récession.

Que concluent les deux économistes du FMI ? D’abord, de façon humble, qu’ » il n’y a pas un seul multiplicateur en tout temps et pour tous les pays  » et que  » les multiplicateurs peuvent être plus ou moins élevés au cours du temps et d’une économie à l’autre « . Ensuite, qu’ » il semble prudent, pour le moment, lorsque l’on pense à la consolidation budgétaire, de supposer que les multiplicateurs sont plus élevés qu’avant la crise « . Enfin, que leurs résultats  » ne signifient pas que la consolidation budgétaire n’est pas souhaitable « .

En tentant de prendre un peu de recul, on peut considérer que, effectivement, les économistes du FMI ont sous-estimé de façon significative l’augmentation du chômage et la baisse de la demande intérieure associées à la  » consolidation fiscale « .

Leur modèle n’a pas davantage correctement prévu l’effet de l’austérité dès lors que, les taux d’intérêt étant déjà proches de zéro, les ménages comme les entreprises adopteraient le même comportement de désendettement que celui des Etats.

Pour autant, comme on vient de le voir, Olivier Blanchard et David Leigh ne proposent en rien de renoncer aux politiques de consolidation budgétaire, mais suggèrent de les mettre en oeuvre… avec discernement. En cela, le premier est fidèle à ce qu’il déclarait déjà au quotidien économique La Tribune le 24 mai 2010, à savoir que  » le risque est en effet que, sous la pression des marchés, certains pays fassent du zèle dans l’austérité. Ce serait une erreur « . Et manifestement, ce scénario s’est effectivement réalisé ; le zèle l’a emporté et il serait exagéré d’en imputer la faute, aujourd’hui, aux (seuls) économistes du FMI.

Contrairement à ceux qui affirment que la  » faute  » de l’austérité est essentiellement imputable aux technocrates de tous poils, aux économistes et à tous les idéologues, nous préférons considérer que cette volonté de rigueur correspond bien à une doxa qui prône le retour à l’équilibre des finances publiques comme condition d’un retour à la croissance. Alors que l’on peut tout aussi bien considérer qu’à l’inverse, c’est le retour à la croissance qui permet de rétablir les finances publiques…

Car désigner  » la gestion désastreuse des finances publiques depuis trente ou quarante ans  » pour justifier les politiques d’austérité est tout simplement fallacieux, puisque le surendettement actuel (et non pas l’endettement) des Etats est entièrement dû aux conséquences directes de la crise financière.

Ce que craignent sans doute les économistes du FMI aujourd’hui, c’est que la poursuite – même dans un pays comme l’Allemagne, dont la croissance est certes en berne mais le budget à l’équilibre – et la généralisation de l’austérité et de la consolidation budgétaire dans le contexte global actuel ne conduisent tout simplement le monde vers une récession de grande ampleur…

Si l’on admet que l’atténuation, voire la fin des politiques d’austérité ne peuvent plus être écartées raisonnablement, deux questions se posent alors immédiatement.

La première est : comment faire revenir la croissance ? La seconde, non moins redoutable, est : comment faire admettre la remise en question de l’austérité aux catégories sociales qui ont su profiter de la crise ? Car force est de constater, en effet, que la crise s’est accompagnée d’un creusement des inégalités…

Nul doute que la réponse à ces deux interrogations passe par un nouveau modèle de développement, et non par quelques mesures de soutien de la croissance. Et ce nouveau modèle de développement devra prévoir un autre mode de redistribution des revenus visant à atténuer, voire à corriger cette inquiétante montée des inégalités.

Gabriel Colletis

Université Toulouse-I

    Gabriel Colletis

    est professeur d’économie à l’université de Toulouse-I. Il est chercheur au Laboratoire d’études et de recherches sur l’économie, les politiques et les systèmes sociaux (Lereps). Il est auteur de L’Urgence industrielle ! (Editions Le Bord de l’eau, 2012) et a coordonné, avec Bernard Paulré, Les Nouveaux Horizons du capitalisme – Pouvoirs, valeurs, temps (Economica, 2008).


Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *