Les économistes sont-ils bien formés ?

Une chose frappe à la lecture de cet article : si le contenu des cours d’économie est à ce point sujet à caution, comment peut-on former des personnes qui seront des experts dans leur domaine ?

Malheureusement, la réponse va de soi : car la formation est défaillante, l’économiste ne peut être que défaillant.

L’économie n’est pas une science. L’écart entre la théorie et la pratique est tel qu’il ne respecte pas les principes mathématiques de base devant donner un cadre à la matière.

Ainsi, théoriquement, un crash économique doit avoir lieu tous les siècles. On en est loin, puisque un crash économique arrive en moyenne tous les 30 ans. Il manque donc une humilité dans le cadre de l’économie, humilité qui ne deviendra jamais la règle car les économistes vivent de leurs prédictions.

L’économiste, comme le disait Mitterrand est-il un incompétent ? Au vu de cet article, j’ai bien peur qu’il ait eu raison.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 18 Avril 2013

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Ma licence d’économie ne connaît pas la crise
Un collectif d’étudiants dénonce le manque de pluralité dans l’enseignement de l’économie à l’université, dont il juge l’approche trop éloignée de la réalité

Réuni en états généraux, samedi 6 avril, à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, le collectif d’étudiants Pour un enseignement pluraliste de l’économie dans le supérieur (PEPS) veut en finir avec  » cet enseignement de l’économie étrangement déconnecté de l’histoire qui s’écrit sous nos yeux « .

Leur souhait ? Que les cours s’ancrent dans l’actualité avant d’en venir à l’exposé des théories. Les étudiants partent du principe qu’il ne s’agit pas de former des chercheurs mais des cadres du privé capables de recul et d’adaptation. Ils réclament aussi l’application d’une vraie pluridisciplinarité pour étudier les faits à la lumière de plusieurs sciences sociales.

 » Nous sommes conscients que ce que nous réclamons exige une grande coordination des équipes pédagogiques et un bouleversement des méthodes « , concèdent les animateurs du collectif.  » Il faudra que les professeurs renouvellent le contenu de leurs cours chaque année « , persifle un étudiant dans la salle. Les enseignants présents prêtent une oreille attentive, à l’instar d’Etienne Wasmer, professeur d’économie à Sciences Po.  » L’initiative est intéressante et mérite d’être expérimentée « , juge-t-il prudemment.

D’autres sont plus dubitatifs. Professeur en prépa au lycée Henri-IV, pourtant favorable à l’initiative, Pascal Combemale prévient :  » Attention au tourisme pluridisciplinaire.  » Et il s’interroge :  » Aujourd’hui, où sont les professeurs capables d’une telle ouverture ?  »  » Il est nécessaire de tenir compte de la diversité des étudiants, des cursus, des établissements « , remarque Pascal Le Merrer, de l’Ecole normale supérieure de Lyon et directeur des journées de l’économie.

 » Il faut le dire, les enseignants chercheurs accaparés par leurs publications se préoccupent très peu de leurs étudiants. C’est d’ailleurs le seul métier pour lequel aucune formation n’est dispensée « , s’insurge Gilles Raveaud, maître de conférences en économie à l’Institut d’études européennes de l’université Paris-VIII, à Saint-Denis

 » Lorsque, dans une soirée, on m’interpelle sur, par exemple, ce qui se passe en ce moment à Chypre ou sur le chômage des jeunes, je suis incapable de répondre… Et je me pose des questions sur l’utilité de ce que j’apprends. L’actualité économique et sociale est dramatiquement absente des cursus d’économie « , explique Arthur Jatteau, doctorant à l’université d’Amiens.  » Nous sommes déçus des cours. Ils ne nous permettent pas de parler, d’analyser la majorité des événements actuels ni, a fortiori, la crise « , surenchérit un autre étudiant.  » Lorsque je ressors, en travaux dirigés, un exercice sur la croissance, qui date d’il y a cinq ans, je n’y crois pas moi-même « , témoigne une doctorante chargée de cours à Paris-I. La crise ne fait qu’accentuer le divorce entre la théorie et la réalité.

La contestation des étudiants du PEPS pointe un triple manque de pluralisme de leur enseignement : leurs cursus ne sont pas assez ouverts sur les autres sciences sociales, une part trop belle est faite à l’approche quantitative statistiques, probabilités, économétries, modélisations , au détriment d’une démarche qualitative, d’enquêtes de terrain, d’entretiens ; et pour clore le tout, les étudiants jugent l’approche orthodoxe néoclassique omniprésente :  » Nous ne sommes pas anti-école néoclassique mais nous souhaitons la replacer dans le cadre plus général des sciences économiques, afin qu’elle soit enseignée au même titre que les autres écoles de pensée « , précise Arthur Jatteau. En étudiants consciencieux, les membres du collectif prouvent le bien-fondé de leur malaise et ont, pour cela, disséqué le contenu de 50 (sur 54) licences d’économie et d’écogestion proposées par les universités.

L’épistémologie, par exemple, qui est l’étude critique des sciences, n’est proposée que dans une seule université. L’histoire de la pensée économique ne représente que 1,7 % des enseignements, une quinzaine d’universités faisant l’impasse dessus.  » Or l’histoire de la formation des concepts et des théories est indispensable pour les relativiser et les replacer dans leur contexte « , juge Julie Dayot, étudiante membre du PEPS. Même sort pour l’histoire des faits économiques, présente dans 1,6 % des cursus.

En additionnant ces trois disciplines oubliées, que les étudiants appellent  » réflexives  » car elles permettent un regard sur l’économie en tant que science, on atteint 5,5 % des enseignements dispensés. A l’opposé, les outils techniques, statistiques, probabilités, économétrie, occupent 19,5 % des heures de cours. S’y ajoutent ce que les étudiants surnomment les cours  » mic-mac « , pour microéconomie (10,7 %) et macroéconomie (12,8 %).  » En classes prépa d’écoles de commerce, l’économie est peut-être enseignée avec plus d’ouverture, en particulier avec les cours d’analyse économique et historique des faits contemporains « , témoigne un élève de prépa.

Le mécontentement ne reste pas limité à la France puisque d’autres mouvements étudiants, en Allemagne et au Canada, ont, sans concertation entre eux, dressé le même constat. Le réseau allemand Plurale Ökonomik, par exemple, parti d’Heidelberg en 2003, a dressé sa carte des universités en leur attribuant une  » note de pluralité « . Dans sa lettre ouverte, le réseau demande que 20 % des chaires soient occupées par des économistes hétérodoxes et qu’y soient dispensés plus de cours sur l’histoire de la pensée économique.

Isabelle Rey-Lefebvre

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