Il faut bien payer ses profs… mais ne pas tolérer les abus !

On dit dans cet article que lorsque l’on paie bien ses profs, on a de meilleurs résultats. On connaît nos résultats : ils sont faibles. On connaît combien coûte le système : très cher. Il y a donc un problème chez nous. Des nantis très bien payés et la majorité qui cumule entre le fait d’être mal payée et les difficultés que les nantis ne veulent pas avoir.

Il faut donc remettre en place le système : bien payer les profs mais assujettir le salaire à des situations où la difficulté d’enseignement est plus grande ou bien payer une véritable plus-value à un enseignant. Le meilleur enseignant doit être mieux payé. Pour l’évaluation, rien de plus simple, comme je l’ai déjà dit : il suffit de donner la procédure à effectuer aux élèves. En effet, qui connaît plus l’enseignant que l’élève ?

En France le système coûte cher car le prof est en majorité mal payé, que les tâches sont dures et que l’évaluation est défaillante. Quelques nantis plombent de plus le système : dans bon nombre de rectorats, seul une minorité travaille à fond quand la plupart n’ont qu’une productivité plus que limitée.

Il faut donc suivre les recommandations de la Cour des comptes et être ferme dans son application car celui qui mènera les réformes aura à coup sûr les enseignants dans la rue car ceux-ci savent faire grève plus que n’importe quelle profession dans notre pays.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 23 Mai 2013

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L’ÉCONOMIE DE LA CONNAISSANCE | CHRONIQUE
Qui paie bien ses profs s’enrichit…

Si le compte en banque du professeur est bien rempli, la tête de l’élève le sera aussi… Alors que, mercredi 22 mai, la Cour des comptes propose dans son rapport  » Gérer les enseignants autrement  » des mesures tellement audacieuses qu’elles ont toutes les chances de dormir longtemps au fond d’un tiroir, il faut se souvenir que l’efficacité est parfois aussi simple qu’un billet de banque !

Le salaire des maîtres – entre 2 100 et 4 100 euros à 15 ans d’ancienneté- est d’ailleurs un des leviers que les magistrats de la Cour estiment nécessaire d’activer pour rendre l’école plus efficace. Ces sourcilleux vérificateurs des dépenses publiques parient qu’en répartissant autrement les 17 % du budget du pays qui servent à payer nos 837 000 professeurs, on mobiliserait mieux les énergies… Sur le sujet, les économistes Peter Dolton et Oscar Marcenaro-Gutierrez sont auteurs d’une analyse qui décoiffe. Eux ne se sont pas arrêtés sur la gestion de ce public, mais posent dès le titre de leur étude une question fondamentale :  » If You Pay Peanuts, Do You Get Monkeys ?  » C’est vrai que si on paie trois fois rien, on n’a pas forcément les meilleurs professionnels.

Pour répondre à cette question, les deux chercheurs des universités de Londres et de Malaga ont épluché les salaires des enseignants de 39 pays sur dix ans. Ils ont croisé ces rémunérations avec les résultats des élèves à 9 ans et à 15 ans et se sont rendus à cette évidence que les nations qui paient le mieux leurs professeurs classent leurs élèves en tête des évaluations internationales.

A ceux qui pensent que tout cela n’est que pur hasard, le travail publié en 2011 dans la revue Economic Policy du Centre for Economic Policy Research (CEPR) – jamais traduit en français – montre, courbe à l’appui, que la corrélation se vérifie pour les 39 pays. Les auteurs concluent même à une relation de causalité et assurent que lorsqu’on  » augmente de 10 % le salaire des enseignants, la performance des élèves croît, elle, de 5 % à 10 % « .

Les scientifiques français ne remettent pas en cause ce résultat. Tout juste émettent-ils une petite réserve sur le fait que MM. Dolton et Gutierrez ont travaillé à partir de  » résultats agrégés « . Ils n’ont pas utilisé une étude unique sur le niveau des élèves, mais plusieurs évaluations d’enfants, faites à 9 ans et à 15 ans, pour créer une sorte d’élève type dans chaque pays. Aux yeux de Bruno Suchaut, chercheur à l’Institut de recherche sur l’éducation de l’université de Bourgogne, et spécialiste du sujet, c’est tout ce qu’on peut reprocher au Britannique et à l’Espagnol !

Après avoir établi leur corrélation mathématique, ces derniers se sont intéressés au cercle vertueux qui se met en place autour de la feuille de paye et à l’alchimie qui transforme les enseignants bien payés en  » bons profs « . Pour que ce soit efficace, il faut que la feuille de paye soit cohérente par rapport aux pays voisins, mais aussi qu’elle soit bien située dans l’échelle des rémunérations du pays.

 » Effet maître « 

Un bon positionnement relatif renforce le statut de la profession et garantit la venue des plus brillants étudiants. Gagner autant qu’un avocat ou un chirurgien, ça motive. A Singapour, être professeur fait autant rêver que ces deux métiers-là !  » Une fois recrutés, le fait de se sentir bien payés incite les enseignants à tout mettre en oeuvre pour améliorer les performances de leurs élèves « , précise encore l’étude. L’ » effet maître  » serait donc sensible au bruit des pièces de monnaie ?

Les parents savent ce qu’est cet  » effet maître « , eux qui peuvent rester les doigts croisés un été entier en espérant que leur enfant aura le  » bon prof  » à la rentrée. La recherche en éducation leur donne raison. Elle dit que cet  » effet maître  » explique à lui seul 7,5 % des acquis des élèves à la fin de chaque année. Multiplié par les onze intervalles qui séparent le CP de la terminale, ce différentiel finit par être important entre l’élève qui a toujours eu des  » bons profs  » et le malchanceux. Et imaginez la perte – ou le gain – en savoirs quand cet écart est multiplié par les 12 millions d’élèves que compte la France !

C’est la force de l’éducation d’écrire le développement d’un pays à partir d’une somme de trajectoires individuelles. MM. Dolton et Gutierrez rappellent dans leur travail que la seule  » augmentation du niveau de formation de la population a apporté plus d’un demi-point de croissance annuel par pays dans la décennie 1990 « . A l’heure où la course au point de PIB devient un sport international, il faut avoir en tête que qui paie bien ses profs s’enrichit… Après, il reste à savoir s’y prendre. Ce n’est pas en distribuant ses 90 millions d’euros votés au budget 2013 comme mesures catégorielles, bien peu de chose par rapport aux 49,9 milliards d’euros de la masse salariale enseignante, que Vincent Peillon va vraiment activer  » l’effet maître « … De toute manière, Matignon bloque toujours la cagnotte, estimant que ça fait mauvais genre d’augmenter les enseignants quand le pays souffre. Pourtant, a contrario, on consacre déjà 6,3 % de notre PIB à l’école – quand l’Allemagne se contente de 5,3 %. Le vrai défi, c’est donc d’être capable de payer mieux les enseignants… à moyens constants. Autant dire de tout repenser !

L’enquête de la Cour des comptes apporte quelques éléments, en rappelant que les professeurs des classes préparatoires gagnent 22 % de plus que s’ils travaillaient en lycée et que les certifiés gagnent 20 % de plus que les professeurs des écoles. Après MM. Dolton et Gutierrez, on ne pourra plus dire qu’on ne savait pas le risque encouru par cette fausse économie.

par Maryline Baumard


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