Les manoeuvres politiciennes ne font que propulser le FN

On le voit actuellement : à force de fomenter des manoeuvres politiciennes à court-terme, le FN monte sans s’arrêter. La situation politique de notre pays devient problématique : entre une UMP en panne d’idées qui court sur les plate-bande du FN et une gauche tétanisée par l’UMP à cause de ces manoeuvres, ce sont toutes les cartes politiques qui sont redistribuées… avec comme gagnant un FN qui n’en demandait pas tant…

Il faudrait, de toutes urgences, refonder un parti de droite qui prendrait ses distances par rapport au FN. Las, pour le moment, on n’en prend pas le chemin tant la médiocrité politique est de mise dans notre pays.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 2 Juillet 2013

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Face au FN, l’indifférence des électeurs de gauche
Une étude inédite, réalisée par  » Le Monde  » et l’IFOP à Villeneuve-sur-Lot, montre l’usure du  » front républicain « 
Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne) Envoyés spéciaux

A peine un électeur de gauche sur quatre a suivi l’appel au  » front républicain  » en votant pour le candidat UMP contre le Front national, dimanche 23 juin, lors du second tour de l’élection législative partielle de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne). Tel est le principal enseignement d’une étude inédite réalisée par Le Monde et l’IFOP à partir de l’analyse systématique des résultats de 149 bureaux de vote, représentant 37 143 votants au second tour. Selon cette estimation, qui ne constitue pas un sondage mais un calcul statistique de report des votes, 62 % des électeurs de gauche auraient préféré s’abstenir ou voter blanc, 15 % auraient voté FN et 23 % pour le candidat de l’UMP Jean-Louis Costes, élu député à la place de Jérôme Cahuzac, démissionnaire.

En nous appuyant sur le droit électoral français, nous avons parcouru l’ensemble des listes d’émargement disponibles (149 sur 167) afin de comptabiliser le nombre d’électeurs ayant voté aux deux tours, seulement au premier ou seulement au second. Ajoutées aux scores de chaque candidat dans chacun de ces bureaux, ces données, transmises à l’IFOP, permettent de réduire la marge d’erreur et de procéder à une analyse statistique qui lève une partie du voile sur les comportements des votants.

Une arrivée importante de nouveaux électeurs au second tour Le collège d’électeurs s’est énormément renouvelé entre les deux tours. Un quart des personnes qui sont allées aux urnes pour le second tour n’avaient pas voté au premier (9 275  » nouveaux électeurs « ). Au contraire, 14 % des électeurs du premier tour ont préféré s’abstenir (4 553  » abandonnistes « ). Cette mobilisation de  » nouveaux électeurs  » a profité aux deux candidats, avec un léger avantage pour celui du FN, Etienne Bousquet-Cassagne, face à celui de l’UMP.

La situation est donc plus mesurée que dans l’Oise, où la partielle de mars a vu la victoire au second tour pour quelques centaines de voix du candidat de l’UMP, Jean-François Mancel, face à Florence Italiani, du FN. La candidate frontiste  » avait beaucoup plus bénéficié de l’apport de nouveaux électeurs de second tour que M. Mancel « , selon Jérôme Fourquet, le directeur du département opinion de l’IFOP. Dans le Lot-et-Garonne, la répartition équilibrée parmi les nouveaux votants implique qu’une part importante de la progression de M. Bousquet-Cassagne, qui a gagné plus de 7 000 voix d’un tour à l’autre, provient d’autres électeurs.

L’usure du  » front républicain  » Le principal enseignement de ce scrutin réside dans le comportement des électeurs de gauche au second tour. La situation est très éloignée du 21 avril 2002, où les sympathisants de gauche avaient voté massivement en faveur de Jacques Chirac. Selon l’analyse de l’IFOP, dans le Lot-et-Garonne  » la très grande majorité des électeurs de gauche – 62 % – préfère s’abstenir ou voter blanc « , et ne fait donc plus barrage au FN.  » Nous sommes ici en présence de la seconde manifestation de l’usure de la stratégie du front républicain « , remarque-t-on à l’institut, après la partielle de l’Oise où un pourcentage similaire d’électeurs de gauche (63 %) s’étaient abstenus ou avaient voté blanc ou nul.

La gauche locale n’a donc pas écouté les appels nationaux au front républicain.  » Je ne pouvais pas voter pour Jean-Louis Costes, explique Barbara Bellanger, la secrétaire de section PS de Villeneuve-sur-Lot. Un autre candidat de l’UMP, ça ne m’aurait pas posé de problème, je l’avais fait en 2002 pour Jacques Chirac. Mais pas pour Costes, il a été membre du MIL – Mouvement initiative et liberté, dernier bastion du gaullisme dur – . C’est pareil que le FN. « 

Dans la section PS locale, secouée par l’affaire Cahuzac, beaucoup n’ont pas donné leurs suffrages au candidat UMP.  » Le front républicain, c’est du pipeau, on n’est plus aux ordres « , explique un militant souhaitant rester anonyme, qui avoue à demi-mots avoir voté pour le candidat FN,  » pour donner un coup de semonce. Mais si Jérôme s’était présenté, il aurait été élu, ici tout le monde le porte au ciel « . Plusieurs bulletins nuls avaient d’ailleurs été barrés du nom de Jérôme Cahuzac.

Le report de la gauche sur le Front national La progression du FN entre les deux tours ne peut s’expliquer que par le report d’une partie non négligeable des électeurs de gauche vers le candidat frontiste. Selon les calculs du Monde et de l’IFOP, environ 15 % d’entre eux ont donné leur vote à M. Bousquet-Cassagne, contre 23 % pour M. Costes. En volume de voix, l’écart n’est pas si flagrant puisque l’UMP attire 2 370 voix, tandis que le FN en grappille 1 560, entre les deux tours.

Les chiffres rappellent ceux observés dans l’Oise, lors de la dernière législative partielle où le report de la gauche vers le FN était estimé à 14 %, ce qui, selon M. Fourquet,  » semble indiquer que nous soyons en présence – mais il faudra le confirmer ultérieurement – d’une tendance assez lourde « .

La victoire de l’ancrage local Pour faire la différence avec le candidat du Front national, M. Costes a pu compter sur une forte mobilisation dans la ville de Fumel, dont il est maire, et dans le canton où il est conseiller général.  » Sur son seul canton de Fumel, M. Costes a en effet engrangé 1 650 voix d’avance sur son rival. Son canton, qui ne pèse que 11 % de la circonscription, lui a fourni 65 % de son avance « , analyse M. Fourquet.

Le candidat UMP a su mobiliser les électeurs tentés par l’abstention dans son fief, où le taux d’ » abandonnistes  » entre les deux tours est moins élevé qu’ailleurs – 8 %, contre 14 % en moyenne sur la circonscription. Face aux nouvelles dynamiques du FN, l’ultime opposition ne vient donc pas du  » front républicain  » mais d’abord de la résistance d’un notable local qui a ainsi capitalisé au maximum sur son ancrage territorial.

Nicolas Chapuis et Alexandre Léchenet

    La méthode du  » Monde  » pour analyser le vote

    Pour décrypter les résultats du second tour dans la 3e circonscription du Lot-et-Garonne, Le Monde a analysé les 149 listes d’émargements disponibles sur 167 bureaux de vote, comptabilisant les électeurs s’étant déplacés aux deux tours, uniquement au premier ou uniquement au second. Selon l’article L. 68 du code électoral, ces listes sont accessibles en préfecture dans les dix jours suivant l’élection. Les chiffres relevés par nos journalistes ont permis à l’IFOP et à la société ADN d’affiner les modèles statistiques de report de voix. Ils ne constituent pas un sondage mais un indicateur des comportements électoraux.


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