Remettre l’éducation et la formation au coeur de notre système politique

Quand j’entends que la réforme des universités, réalisée par Sarkozy, a été une belle réussite, ça me fait lourdement marrer ! Aujourd’hui, on ne compte plus les épisode où l’on déplore le manque de formation et des postes que l’on ne parvient pas à faire occuper à cause d’un manque de main d’oeuvre qualifiée !

La première logique, dans la réforme des universités, aurait été de s’occuper des étudiants et de leur proposer un poste à la hauteur de leur formation ! La tâche était indispensable quand on pense que 25% de nos jeunes sont sans-emploi. Las, l’enjeu a consisté à les rendre indépendant financièrement, ce qui n’a qu’un lointain rapport avec les vrais enjeux de ce que l’on peut attendre de notre classe dirigeante.

Les universités n’avaient pas le seul monopole de la formation en la matière : depuis quelques années, on délaisse les emplois dits « sous-qualifiés », manuels, qui sont dévalorisés de manière constante par la société. On pousse donc la classe d’âge des 20 ans à avoir le Bac… qui ne leur sera d’aucune utilité à faire leur place dans le marché du travail.

Ne vaut-il pas mieux un jeune sans le bac mais bien formé qu’un jeune avec mais au chômage ? Il y a bien sûr le « bac-pro », mais il n’est que peu valorisé et mériterait autrement d’être vendu car il fait partie des solutions au chômage des jeunes.

Quant aux personnes qui ne veulent pas se déplacer de 30km pour bosser, il faut leur rappeler que les allocations chômage ne sont pas un salaire, mais une aide au retour à l’emploi. Il implique donc des droits et des devoirs. Si les devoirs ne sont pas remplis, on est en droit de supprimer des allocations.

Le mille-feuille administratif joue aussi à plein son rôle en matière de gabégie financière.

Bref, cet article lève beaucoup de questions qui feraient l’objet d’autant de projets de réforme.

Quand se met-on au boulot ?

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 25 Juillet 2013

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REPORTAGE
A Saint-Dizier, la double peine des destructions d’emplois industriels et du manque de travailleurs qualifiés

Saint-Dizier (Haute-Marne) Envoyé spécial

Le premier mal contre lequel il faut lutter, à Saint-Dizier, en Haute-Marne, c’est le chômage. Le vieil hôpital de la ville, qui borde la berge sud de la Marne, a été vidé de ses urgences médicales pour faire place à un centre administratif où Pôle emploi a emménagé dans des locaux à la mesure de sa tâche. Sur un territoire où le taux de chômage s’approche des 11 %, les entreprises locales résistent mal à la crise.

Depuis 2008, la zone a perdu encore 10,26 % de ses emplois, soit la plus forte baisse de la région Champagne-Ardenne.  » Pendant les décennies qui ont suivi l’après-guerre, ce territoire a vécu grâce à l’activité de plusieurs mastodontes de la métallurgie « , raconte François Cornut-Gentille, député et maire UMP de Saint-Dizier. Des fonderies qui durant les  » trente glorieuses  » ont consommé plusieurs générations d’une main-d’oeuvre non qualifiée.

Mais, à partir des années 1980, la mondialisation a déplacé l’essentiel de ses activités hors des frontières hexagonales.  » Seuls sont restés les ouvriers sans formation « , constate Didier Cognon, président de Tremplin 52, association locale oeuvrant pour l’insertion professionnelle. Et ce, sur un territoire où l’industrie représente plus de 35 % de l’emploi salarié.

Maire depuis 1995, M. Cornut-Gentille ne maquille pas la réalité :  » Nous avons un fort taux de chômage, mais également des emplois non pourvus.  » Un point qui préoccupe également Pôle emploi.

Le tissu industriel du bassin évolue et la demande va vers des postes qualifiés alors que 40,1 % des demandeurs d’emploi sont sans qualification selon l’agence, contre 30 % au niveau national. La transition nécessaire semble évidente :  » Il faut adapter la demande d’emploi à l’offre « , résume Fabrice Herbert, directeur départemental de Pôle emploi. Belle intention. Evidente en théorie, mais qui, en pratique, s’avère difficile à mettre en oeuvre.  » Saint-Dizier est un bassin de fondeurs, rappelle Fabrice Herbert. Depuis trois générations, pères et fils se succèdent dans les fonderies du pays en apprenant le métier sur le tas. L’idée de former la génération suivante pour accéder à d’autres métiers n’est pas passée. « 

Longtemps, ici, on a été ouvrier de père en fils, et l’accès à l’emploi n’était jamais un problème.  » Etre métallo, c’est dans les gènes. L’idée qui perdure, c’est : « Mon père a travaillé là, je dois travailler ici. » Et pas trente kilomètres plus loin « , relève Jean-Emmanuel Millot, directeur de T2I, une entreprise d’insertion professionnelle.  » Dans un secteur frappé par la mondialisation, une frange de la population a du mal à s’adapter et à se rendre « employable » dans des métiers qui se complexifient « , ajoute encore Valérie Langlois, directrice du développement du territoire.

L’action de l’agence locale de Pôle emploi est également limitée. Cinquante agents sont en poste sur le bassin de Saint-Dizier, certains ayant en charge un  » portefeuille  » de plus de 500 chômeurs à accompagner vers l’emploi,  » alors qu’au-delà de 100 on ne peut plus parler de suivi personnalisé « , témoigne, un brin découragé, un conseiller.

Le même découragement prévaut face aux intentions gouvernementales. Selon, Freddy Boudesocque, animateur d’équipe de Pôle emploi Saint-Dizier, elles sont inadaptées, voire irréalistes. Ainsi, lorsque François Hollande prévoit un effort accru sur les formations non pourvuesde 30 000 en 2013 à 70 000 en 2014, M. Boudesocque déplore :  » Nous avons déjà du mal à remplir les formations existantes. Certains chômeurs ne sont pas en capacité de suivre une qualification. « 

Fabrice Herbertregrette que Saint-Dizier ne dispose pas de pôle universitaire :  » Les jeunes qui veulent se former vont à Dijon, Troyes ou Nancy. Les élus locaux n’ont pas fait le choix de la formation.  » Plus grave encore,  » l’apprentissage au métier de fondeur a perduré sur le bassin, témoigne Jean-Emmanuel Millot, alors que le métier était voué à mourir « .

Une politique incohérente dont il est difficile de désigner le responsable. S’agissant de formation, les donneurs d’ordre sont multiples : la région, la ville, l’Etat, Pôle emploi…  » Tous interviennent avec une articulation plus ou moins bien huilée « , note le patron départemental de Pôle emploi.

 » Il faut un seul interlocuteur « , reconnaît M. Cornut-Gentille. Finalement les futurs actifs les plus adaptables quittent le territoire.  » Ici, les entreprises savent qu’elles pourront avoir des difficultés à recruter de la main-d’oeuvre qualifiée « , déplore encore le cadre de Pôle emploi.

Aujourd’hui, le diagnostic d’une nécessaire priorité à la formation et à son adaptabilité aux besoins du secteur industriel est partagé par les acteurs locaux, syndicats et patronat, selon le maire de Saint-Dizier.  » Même le ministère de l’économie a désormais compris l’importance du soutien à l’industrie, poursuit M. Cornut-Gentille. Alors que sous les gouvernements d’Alain Juppé ou de Lionel Jospin, lorsque vous évoquiez un problème lié au tissu industriel, on sentait bien qu’ils n’en avaient rien à faire. Depuis Nicolas Sarkozy, qui a été suivi par Arnaud Montebourg, Bercy prend ces questions au sérieux « , conclut l’édile.

Eric Nunès

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