Et le principe de précaution ?

On se fait beaucoup de noeuds au cerveau pour rien ! D’un point de vue juridique, quoiqu’en dise le Conseil d’Etat, la France est très bien armée : le principe de précaution est écrite dans la Constitution. De plus, on sait très bien que bon nombre d’OGM produisent eux même un insecticide. Il n’est donc pas compliqué que de faire le lien entre la consommation de pesticide et le principe de précaution pour casser la décision Européenne !

En droit, le principe de précaution équivaut à une inversion de la charge de la preuve. Cette inversion est déjà de mise en matière de droit social, dans le cas, en particulier, de harcèlement au travail. Les juristes ont donc toutes les armes pour fournir au Conseil d’Etat un dossier complet permettant d’interdire le Maïs sur le sol Français, or, le Conseil d’Etat persiste dans le fait de vouloir autoriser la culture de ce produit !

La situation de notre pays est donc dingue : non seulement l’incompétence de nos politiques est manifeste pour gérer le budget de l’Etat (pas un seul budget à l’équilibre en 30 ans), mais, pire, ils sont aussi incompétents dans les matières juridiques ! Un comble quand on sait que Science-Po et Ena sont des formations juridiques !

Décidément, la France est bien malade de l’incompétence de ses dirigeants !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 03 Août 2013

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Le gouvernement face au casse-tête des OGM
Le Conseil d’Etat a annulé pour la deuxième fois en deux ans l’interdiction du maïs transgénique MON810

Mêmes causes, mêmes effets : le 28 novembre 2011, le Conseil d’Etat annulait l’arrêté interdisant la culture du MON810, le maïs transgénique de Monsanto, sur le sol français et la ministre de l’écologie de l’époque, Nathalie Kosciusko-Morizet, annonçait sur le champ que le gouvernement prendrait une nouvelle mesure d’interdiction. Jeudi 1er août, rebelote : le Conseil d’Etat a cassé le nouvel arrêté d’interdiction, pris le 16 mars 2012, et le gouvernement s’est aussitôt engagé à  » maintenir le moratoire sur la mise en culture de semences OGM « .

Cette décision du Conseil d’Etat est tout sauf une surprise. Non seulement l’audition du 5 juillet du rapporteur public ne laissait guère planer de doutes sur les conclusions de la haute juridiction, mais même les opposants les plus farouches aux organismes génétiquement modifiés ne se faisaient pas d’illusions, reconnaissant depuis le début que les bases juridiques de l’arrêté d’interdiction de 2012 étaient bien fragiles.

Le Conseil d’Etat a jugé que Bruno Lemaire, le ministre de l’agriculture qui avait pris l’arrêté, a commis  » une erreur manifeste d’appréciation « . La haute juridiction estime qu’il n’a pas été en mesure d’apporter des éléments nouveaux,  » reposant sur des données scientifiques fiables  » et  » permettant de conclure à l’existence d’un risque important mettant en péril de façon manifeste l’environnement « , ainsi qu’il aurait dû le faire pour justifier la mesure d’interdiction au regard du droit européen.

L’annulation de l’arrêté ministériel ouvre théoriquement la possibilité d’un retour dans l’hexagone du MON810, autorisé dans l’Union européenne depuis 1998. Théoriquement seulement. Stéphane Le Foll, le ministre de l’agriculture, et Philippe Martin, son homologue de l’écologie, qui s’était opposé aux OGM en tant qu’élu du Gers, ont immédiatement fait savoir qu’ils avaient demandé à leurs services de  » travailler sur de nouvelles pistes  » afin qu’une nouvelle mesure d’interdiction soit prise  » avant les prochains semis « , prévus au printemps 2014.

Les experts du dossier, qu’ils travaillent pour le compte des partisans des OGM ou de leurs opposants, ne voient pas d’autre piste juridique qu’un nouvel – et troisième – arrêté d’interdiction.  » Il va falloir recommencer mais mieux étayer l’argumentaire, en s’appuyant par exemple sur l’insuffisance des études sanitaires et environnementales « , estime Michel Dupont, attaché parlementaire de l’eurodéputé José Bové (EELV). L’Union européenne a fixé, en février, de nouvelles règles d’évaluation des OGM, imposant des tests de toxicité à 90 jours.

Un nouvel arrêté ne serait-il pas condamné à connaître le même sort que ses prédécesseurs, dont le premier avait été annulé en raison d’un choix de procédure juridique considéré comme erroné ?  » Tant que l’on aura une réglementation européenne telle que celle qui existe aujourd’hui, l’Etat français ne pourra prendre que des décisions illégales, sauf à parvenir à démontrer l’existence d’un risque avéré « , affirme Maï Le Prat, avocate de l’association générale des producteurs de maïs (AGPM), un des organismes qui avaient déposé la requête en annulation devant le Conseil d’Etat.

Le gouvernement hérite donc d’un dossier brûlant, rendu encore plus complexe par le blocage du système européen d’autorisation de la mise en culture d’OGM. Huit Etats-membres – en plus de la France – ont interdit le MON810, selon des procédures aussi fragiles et dont certaines sont en voie d’annulation, sans que Bruxelles n’intervienne pour faire respecter la réglementation communautaire.

La Commission semble décidée à ne plus bouger tant que son projet de réforme du système d’autorisation, lancé en 2010 par le commissaire européen chargé de la santé, restera bloqué par les divisions des Etats-membres. Ce projet prévoit de donner la possibilité à chaque Etat d’interdire sur son territoire la culture d’un OGM autorisé au niveau européen, et ce sans avoir à s’appuyer sur des arguments scientifiques, comme aujourd’hui.

En France, l’impasse actuelle pourrait cependant conduire les différents protagonistes à explorer une nouvelle voie, en s’éloignant du terrain scientifique.  » Il est temps de se poser la question de la nécessité socio-économique des OGM pour l’agriculture européenne « , estime Michel Dupont. Dans l’autre camp, Luc Esprit, directeur général de l’AGPM, affirme que son organisme s’opposerait par la voie juridique à un nouvel arrêté d’interdiction, mais se dit prêt à envisager un gel de la situation,  » à condition que l’on se mette autour d’une table pour discuter de ce que l’on attend des OGM et des perspectives en terme de recherche « .

Cet énième rebondissement du feuilleton MON810 survient alors que l’Union européenne semble plus que jamais une terre hostile à la culture des OGM, que la culture du maïs de Monsanto y est marginale (et essentiellement concentrée en Espagne) et que le groupe américain a annoncé mi-juillet sa décision de retirer ses demandes d’homologation d’OGM destinés à la mise en culture en cours auprès des autorités européennes.

Martine Valo et Gilles van Kote

    Depuis 2011, plusieurs arrêtés d’interdiction annulés

    22 avril 1998 La Commission européenne autorise la mise sur le marché du MON810, un maïs transgénique développé par le groupe américain Monsanto.

    5 décembre 2007 Le gouvernement français décide d’une clause de sauvegarde vis-à-vis de cet OGM qui produit une toxine insecticide destinée à détruire certains ravageurs. Il en suspend la culture, puis l’interdit le 13 février 2008.

    8 septembre 2011 La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) estime que Paris n’est pas fondé à décréter une telle interdiction, sauf en cas d’urgence et de risque important pour la santé ou l’environnement.

    28 novembre 2011 Le Conseil d’Etat s’aligne sur l’interprétation de la CJUE et annule les deux arrêtés de 2007 et 2008.

    16 mars 2012 Le gouvernement prend un nouvel arrêté d’interdiction du MON810, s’appuyant sur un avis récent de l’Agence européenne de sécurité des aliments, le Haut conseil français des biotechnologies et une étude suisse.

    1er août 2013 Le Conseil d’Etat, compte tenu de la jurisprudence européenne et faute d’éléments nouveaux scientifiquement solides, annule l’arrêté français.


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