Quand nos politiques croient que l’argent du contribuable est le leur

Il n’est bien évidemment pas normal que nos parlementaires puissent décider, seuls, à qui doit profiter l’argent de l’Etat. Cet argent est l’argent du contribuable. Il doit donc être distribué dans l’intérêt général, dont dans l’intérêt d’élus voulant acheter leurs voix.

Ce qui est intéressant c’est que cette distribution ne sert d’ailleurs pas toujours leurs auteurs : c’est une bonne chose et cela prouve que l’électeur n’est pas dupe.

On voit aussi que Sarkozy avait la main sur cette réserve et qu’il en faisait ce qu’il voulait. Là aussi, il a perdu.

L’électeur sait donc se rappeler à ceux qui abusent des fonds de l’Etat. L’électeur devra aussi se rappeler au bon souvenir de ceux qui cumulent des mandats, car un cumulard ne peut pas matériellement travailler efficacement à tous ses mandats.

L’image est cliquable.

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Réserve ministérielle : 27 millions d’euros distribués en toute opacité

Le Monde.fr | 13.08.2013 à 15h37 • Mis à jour le 14.08.2013 à 09h32 | Par Alexandre Léchenet

Parmi les circonscriptions choyées par la réserve ministérielle, celles de François Fillon, Jean-François Copé et Valérie Pécresse figurent en bonne place.

Vingt-sept millions d’euros pour des « aides exceptionnelles aux collectivités territoriales » ont été attribués par le président et certains ministres en 2012 au titre de la « réserve ministérielle », et 32 millions le furent en 2011. Avantageant principalement les territoires d’élection des ministres ou les proches du président, la répartition de cette cagnotte reste floue.

Le montant de la réserve ministérielle représente 20 % de la réserve parlementaire, et son fonctionnement est similaire : les collectivités présentent des demandes de subventions au ministère de l’intérieur, qui sont ensuite « mises sur le dessus de la pile » par les ministres, ou, sous le précédent gouvernement, par le président. En effet, depuis 2008, Nicolas Sarkozy s’était accaparé les deux tiers de la réserve du ministère de l’intérieur.

Les subventions de la réserve peuvent également concerner des subventions à des associations, mais leur répartition n’a pas été dévoilée. D’autres cagnottes existent dans d’autres ministères. René Dosière, député PS de l’Aisne spécialisé dans les finances de l’Etat, les détaille : « En plus des réserves parlementaires et ministérielles au ministère de l’intérieur, il y avait aussi une réserve à Bercy, dont pouvaient disposer les anciens ministres du budget. Elle aurait été supprimée il y a deux ou trois ans. Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales en 2008 (PDF) évoquait le financement discrétionnaire de certains hôpitaux par le ministre et préconisait sa disparition. Le ministère des sports également dispose d’un petit budget, comme l’a évoqué Mediapart. Je vais faire en sorte de poser des questions aux ministères pour savoir s’il en existe d’autres. »

DES SUBVENTIONS EN FAVEUR DE L’EXÉCUTIF

Malgré la publication par le ministère de l’intérieur, pour 2011 et 2012, de l’utilisation de la réserve parlementaire, les subventions du « programme 122 au titre de la réserve ministérielle » ne sont pas fléchées : impossible de savoir qui, président ou ministre, est à l’origine de la demande. Certains rapprochements sont néanmoins possibles. En croisant ces subventions avec les circonscriptions législatives, certaines semblent beaucoup plus avantagées que d’autres. Ainsi, plus de 5 % de la réserve ministérielle, soit plus de 3 millions d’euros sur deux ans, financent des collectivités locales dans la quatrième circonscription de la Sarthe. Avant d’être nommé premier ministre, François Fillon y fut député.

La carte ci-dessous superpose les circonscriptions législatives en 2012 et les subventions au titre de la réserve ministérielle en 2011 et 2012. Chaque subvention versée est représentée par un cercle dont la taille varie en fonction du montant. Plus il y a de subventions dans une région, plus les cercles sont rouges.

Voir la carte en plus grand :  » La réserve ministérielle en 2011 et 2012″

Parmi les circonscriptions les plus favorisées, on trouve celles d’Eric Woerth, ancien ministre du budget, dans l’Oise, de Valérie Pécresse, dans les Yvelines, et de François Baroin, dans l’Aube. Ces trois ténors de l’UMP sont tous les trois passés par le ministère du budget pendant la présidence de Nicolas Sarkozy. La réserve ministérielle est d’ailleurs plutôt généreuse avec le département de l’Aube, terre d’élection de l’ancien ministre de l’économie, puisque ce département arrive second en termes de financement, avec 2,7 millions d’euros sur deux ans. Dominique Bussereau, député UMP de Charente-Maritime et ancien secrétaire d’état aux transports, complète ce classement. Une partie de la réserve avait été utilisée pour aider les communes après la tempête Xynthia.

LES AMIS POLITIQUES NE SONT PAS OUBLIÉS

Mais parmi ces dix territoires choyés par la réserve ministérielle, il en est d’autres où aucun ministre n’est élu. La circonscription de Jean-François Copé a ainsi reçu près de 1,5 millions d’euros de subventions à ce titre en 2011 et 2012. Pour compléter ce classement, on trouve également l’ancienne deuxième circonscription de la Creuse, faisant aujourd’hui partie de la circonscription unique. Dans la deuxième circonscription de l’Eure-et-Loir, de nombreuses subventions ont été attribuées. Olivier Marleix (UMP), fils de l’ancien secrétaire d’état aux collectivités territoriales Alain Marleix, y a été élu député en 2012.

La première circonscription du Territoire de Belfort en fait également partie. Elle a reçu en 2011 et 2012 près de 1,2 millions d’euros. Damien Meslot, député UMP, y voit une récompense de son « soutien sans faille au président de la République » ou de l’aide qu’il a pu apporter à certains ministres. S’il a obtenu autant de réserve, c’est qu’il a multiplié les demandes de subventions : « C’est aussi le rôle du député que de représenter sa circonscription. »

Jean-Luc Warsmann, député UMP des Ardennes et maire de Douzy, également favorisé par la réserve ministérielle, en est satisfait. « Je suis élu d’un territoire qui essaie de s’arracher au déclin. Je me suis toujours battu pour que le département ait le maximum d’aides. Et il est normal que les parlementaires les plus engagés soient les plus écoutés. » M. Meslot ne se cache d’ailleurs pas de l’utilisation de ces subventions : elles figurent en bonne place dans ses documents électoraux.

Le député belfortain modère cependant l’influence des ces subventions sur le vote. « Raymond Forni, mon prédécesseur, était président de l’Assemblée nationale et les subventions tombaient comme à Gravelotte dans la circonscription. Malgré ça, je l’ai battu. » Même constat ailleurs : dans la troisième circonscription des Pyrénées-Orientales, la réserve ministérielle et présidentielle a permis d’accorder 750 000 euros de subventions, dont plus de 400 000 à la ville de Prades, dont Jean Castex, conseiller de Nicolas Sarkozy, était maire. Le conseiller était également candidat aux élections législatives dans la circonscription. Les subventions ne l’ont pas empêché d’être battu par la candidate du Parti socialiste, Ségolène Neuville.

De même, autour de Toul, les quelque 800 000 euros de subventions de la réserve ministérielle dépensés dans la cinquième circonscription de Meurthe-et-Moselle n’ont pas permis la réélection de Nadine Morano, battue par le candidat socialiste Dominique Potier. Et les subsides attribués par le ministère de l’intérieur aux alentours de Ploërmel, où le fils de Claude Guéant était candidat, n’ont pas non plus permis son élection.

Depuis l’arrivée de François Hollande, l’Elysée assure que le président n’a plus la main sur cette réserve. « C’était de toute manière anticonstitutionnel, et cela n’a existé que sous Sarkozy », se félicite M. Dosière. Pour les autres ministres, le Canard enchaîné déclarait que les caisses étaient vides à leur arrivée en juin 2012. Interrogé par le Monde.fr, le ministère de l’intérieur n’a pas été en mesure de nous confirmer l’existence de la réserve ministérielle ni de détailler son utilisation.

    Alexandre Léchenet
    Journaliste au Monde


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