Quand le parlement Européen met un coup de poignard à la nature

C’est une bonne décision pour les chalutiers que le Parlement européen a rendu… pour le moment. En fait, c’est le baiser de la mort. Les espèces en eaux profondes sont aussi celles qui se reproduisent le moins rapidement. Ainsi, plus on continuera à pêcher en eau profonde, plus on abaissera les stocks, jusqu’au chômage technique.

Les chalutiers seront-ils alors contents ? Après qui se plaindre après cela ? A la nature ? Les chalutiers feront-ils grève devant l’océan pour qu’il leur rende de quoi vivre ?

Le député du Morbihan Gwendal Rouillard (PS), est donc un royal imbécile. Il croit qu’il a sauvé la pêche alors qu’il n’a fait que précipiter sa perte. Pauvre homme.

L’imbécilité dans ce dossier est du côté des pêcheurs comme du parlement Européen : quand on coupe la branche sur laquelle on est assis, généralement, on se casse la gueule.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 12 décembre 2013

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Le Parlement européen maintient le chalutage en eaux profondes
Au soulagement des armateurs, les députés ont rejeté l’interdiction de la pêche des abysses, qui détruit l’écosystème

En dépit d’une forte mobilisation citoyenne, le Parlement européen a rejeté, mardi 10 décembre, l’interdiction du chalutage en eaux profondes, pratique de pêche controversée qui racle les sols marins, endommage coraux, éponges et habitats des poissons juvéniles. Le vote a été serré (342 voix contre l’interdiction et 326 pour).

Du fait des désaccords parmi les socialistes européens, les députés se sont contentés d’adopter, à une large majorité, le principe d’une limitation de la pêche profonde avec un projet de règlement peu contraignant. A l’avenir, les grands chalutiers devront se cantonner aux grands fonds qu’ils exploitent déjà sans aller tirer leurs lourds filets sur de nouvelles zones marines. Des études destinées à cartographier les fonds les plus fragiles devraient en outre être menées, a ajouté le Parlement.

Dans les heures qui ont suivi ce rejet de l’interdiction du chalutage au fond des océans, les défenseurs de l’environnement marin ont tous fait part de leur déception sur la scène internationale. La plus consternée est sans doute Claire Nouvian, fondatrice de l’association Bloom et figure de proue des opposants à la pêche en eaux profondes.  » C’est un jour historique qui célèbre la victoire du lobbying acharné des industriels et de la fabrication d’un mensonge d’Etat « , a-t-elle déclaré, dénonçant l’implication du gouvernement français dans ce dossier.

 » C’est un jour sombre pour la vie dans les eaux profondes, déplore Matthew Gianni, au nom des ONG Deep Sea Conservation Coalition et Pew. Le Parlement européen y était presque, mais il n’a pu faire preuve d’une détermination suffisante pour éliminer le chalutage de fond qui est pourtant l’une des pratiques de pêche les plus destructrices. « 

Triomphe des pêcheurs

La décision a en revanche donné lieu à une salve de communiqués enthousiastes de la part des professionnels du secteur.

Pour l’industrie de la pêche, l’heure est à la jubilation, surtout en France. C’est en effet dans l’Hexagone et en Espagne – les deux principaux Etats adeptes de la pêche profonde – que s’est joué le sort du chalutage profond. Le groupement professionnel Blue Fish Europe a communiqué sur ce  » triomphe des pêcheurs contre les lobbies environnementalistes  » et a remercié les députés européens pour leur  » excellent travail « .

La socialiste Isabelle Thomas et son homologue du PPE Alain Cadec, tous deux implantés en Bretagne, ont eu droit à des félicitations particulières. Il faut dire qu’ils ont beaucoup œuvré à ce que l’assemblée de Strasbourg penche en faveur d’une réglementation a minima de la pêche profonde et évite le bannissement du chalutage profond. La première s’est donc réjouie de  » la victoire de la raison « , tandis que le second lui faisait écho en déclarant que  » la raison l’avait emporté « .

La Scapêche, l’armement du groupe Intermarché basé à Lorient, s’est dite  » rassurée « . Numéro un français du chalutage en eaux profondes qu’elle pratique au large de l’Ecosse, la Scapêche peut être soulagée : son activité était directement visée par certains amendements des députés européens.

Le député du Morbihan Gwendal Rouillard (PS) s’est félicité, de son côté, d’une décision qui aurait sauvé, selon lui,  » 300 entreprises  » autour de Lorient. Interrogé sur ce point, il a promis d’en fournir la liste. Emporté par son enthousiasme, M. Rouillard a salué  » une étape positive vers la durabilité de la pêche « . Ce terme, qui désigne un mode de capture raisonnable, laissant aux stocks de poisson le temps de se renouveler, risque de passer pour une provocation aux yeux des ONG qui défendent les abysses.

Martine Valo

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