Quand l’Allemagne dit adieu à ses objectifs de respect d’émission des gaz à effet de serre

L’Allemagne a eu la volonté farouche de réduire le nombre de ses centrales nucléaires. Las, elle en paie aujourd’hui le prix. Elle est en effet contrainte de renoncer à ses objectifs de respect d’émission de ses gaz à effet de serre. Il ne faut pas se leurrer sur le poids dans l’énergie des sources renouvelables. Elles ont deux inconvénients majeures : elles prennent énormément de place et sont beaucoup plus intermittentes que l’énergie nucléaire.

La seule énergie pouvant rivaliser avec le nucléaire, c’est le charbon et il est très polluant.

En matière énergétique, le nucléaire a de très nombreux défauts mais est très compétitif. Entre la peste et le choléra, on choisit quoi du coup ?

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 31 Juillet 2014

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L’Allemagne n’atteindra pas son objectif de réduction de gaz à effet de serre pour 2020
La sortie du nucléaire et le retour aux centrales à charbon ont fait augmenter les émissions de CO2
Berlin Correspondant

L’Allemagne parviendra-t-elle à tenir ses engagements de réduction d’émission de gaz à effet de serre ? Rien n’est moins sûr. Le 14 juillet, lors d’un sommet international des ministres de l’environnement organisé par l’Allemagne, Angela Merkel a reconnu que l’objectif de son pays de réduire de 40 % ces émissions en 2020 par rapport à leur niveau de 1990 nécessitait de réaliser  » des efforts considérables « .

Au cours de cette rencontre, Barbara Hendricks, la ministre allemande de l’environnement a été plus explicite.  » Aujourd’hui nous avons juste atteint 24 % de réduction. D’après cette trajectoire, nous devrions atteindre 33 % de réduction en 2020. Pour atteindre notre objectif de 40 %, des mesures supplémentaires sont nécessaires. « 

Lesquelles ? Nul ne le sait exactement :  » L’Allemagne va présenter d’ici à la fin de l’année un plan national d’action sur l’efficacité énergétique, a déclaré Angela Merkel. Il ne s’agit pas seulement de mieux coordonner les dispositifs existants, par exemple dans le domaine des aides à la rénovation des bâtiments. Il s’agit aussi de prendre de nouvelles mesures. Et, je le dis par avance, ce sera encore un processus difficile. Chez nous, la discussion est loin d’être achevée « , a précisé la chancelière.

Trois ans après avoir annoncé la sortie du nucléaire civil à l’horizon 2022, Angela Merkel reconnaît que la mise en œuvre de cette réforme s’apparente au rocher de Sisyphe.  » Après le match, c’est avant le match « , a reconnu à plusieurs reprises en juillet la chancelière, manifestement encore sous le choc de la Coupe du monde de football.

Le relatif pessimisme d’Angela Merkel et de la ministre de l’environnement résulte notamment d’une volumineuse étude, discrètement mise en ligne en juin sur le site du ministère de l’économie et de l’énergie. Réalisée par des consultants et des chercheurs de l’université de Cologne, cette étude montre à la fois que l’Allemagne a déjà beaucoup fait pour découpler sa croissance de la consommation d’énergie, mais que ces efforts ne suffiront pas pour être au rendez-vous de 2020.

Et encore, ces chercheurs partent du principe que la croissance ne sera que de 1 % en moyenne les quinze prochaines années. Un scénario pas très optimiste même si, du fait de la diminution attendue de la population, cela permet quand même au produit intérieur brut (PIB) par habitant de progresser considérablement. Comparé à 1990, le PIB allemand s’était, en 2011, accru de 34 %. Dans le même temps, la consommation d’énergie primaire avait diminué de 9 % et les émissions de CO2 de 24 %.

Néanmoins, en 2012, celles-ci avaient à nouveau augmenté et la baisse n’était plus que de 22 % par rapport à 1990, ce qui démontre la fragilité du processus. Celui-ci devrait se poursuivre et voir la part des énergies renouvelables progresser fortement dans les décennies à venir.

Mais les prévisions des experts divergent de celles émises jusqu’ici par le gouvernement sur deux points principaux. En premier lieu, la consommation d’énergie primaire devrait moins diminuer qu’attendu. Le gouvernement partait du principe qu’elle baisserait de 1,8 % à 2 % par an d’ici à 2030 ; les experts prévoient, eux, une diminution annuelle comprise entre 1,2 % et 1,5 %.

Deuxième différence : les énergies renouvelables devraient certes progresser, mais, là aussi, moins que prévu. Si le gouvernement table sur une progression de 30,8 %, les experts, eux, évoquent le chiffre de 24 %. Selon ces derniers, les nouvelles centrales au charbon  » resteront compétitives jusqu’en 2030 « .

Or le charbon propre reste un mythe. Surtout en Allemagne. Une étude publiée le 22 juillet par l’association de défense de l’environnement WWF a montré que l’Allemagne possédait neuf des trente centrales au charbon les plus polluantes d’Europe. Selon ce rapport,  » en 2013, la production d’électricité à partir du lignite a culminé à 162 TWh, un record depuis la réunification. En 2013, les émissions de CO2 ont progressé sur un an de 1,5 %, dû au fait que l’Allemagne brûle plus de charbon. Le pays court le risque de ne pas atteindre son objectif de réduire de 40 % ses émissions de CO2 à l’horizon 2020 « .

Et ce, malgré le quasi-quadruplement de la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité depuis 1990.

Frédéric Lemaître

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