On continue à nous dire qu’il faut réformer le marché du travail

Il faut réformer notre marché du travail : tout le monde nous le dit. Effectivement, il n’est pas suffisamment compétitif et coûte extrêmement cher. Il est très généreux avec les actifs en laissant de nombreux chômeurs sur le bas côté, chômeurs que l’on indemnise aussi, pour certains d’entre eux, plus que grassement. En effet, trop souvent, les chômeurs bien indemnisés considèrent leurs allocations chômage comme un salaire de substitution.

Las, il ne faudrait pas oublier le service public, dans son ensemble, dans le cadre de cette réforme. Nous avons trop de fonctionnaires et la productivité n’est clairement pas au rendez-vous de nos 5 Millions d’individus travaillant dans la fonction publique.

Une réforme est aussi indispensable de ce côté-là, il s’agirait de ne pas l’oublier, pour des questions d’égalité mais aussi de sauvegardes des dépenses publiques.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 29 Novembre 2014

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Paris appelé à réformer le marché du travail
Le rapport Pisani-Ferry – Enderlein épingle la démographie allemande

Il y avait foule des grands jours, jeudi 27  novembre, à l’Hôtel des ministres de Bercy. Jean Pisani-Ferry et Henrik Enderlein, les deux économistes, accompagnés des ministres de l’économie français et allemand, Emmanuel Macron et Sigmar Gabriel, ont été accueillis tels des  » rock stars  » sous une nuée de flashes et de caméras. Tous les ingrédients étaient réunis pour un grand show. La veille, le cabinet de M. Macron avait convoqué la presse pour une présentation du rapport sur  » les réformes, l’investissement et la croissance pour la France, l’Allemagne et l’Europe « … pour n’en rien dévoiler du contenu. Mais trop d’attente tue l’attente. Car, si les deux économistes ont bien joué leur rôle de sentinelles distillant des conseils avisés et appelant à l’ » audace « , les ministres se sont empressés de calmer les ardeurs.

Premier duo : les économistes. M.  Pisani-Ferry, commissaire général à la stratégie et à la prospective, présente les réformes qu’il juge nécessaires pour que la France ne reste pas  » à mi-chemin d’une transformation qu’elle a entreprise mais pas terminée « . Ce qu’il appelle des  » réformes catalytiques « , susceptibles de  » faire en sorte que les comportements changent « , et qu’il regroupe en trois  » packs « .

Un : achever la construction d’un modèle de flexisécurité, en accordant plus d’autonomie aux branches et aux entreprises et en assouplissant les conditions de négociation d’accords de flexibilité du temps de travail et des rémunérations en fonction des situations économiques.

Deux : améliorer la compétitivité.  » Ce problème a beaucoup été traité par la voie fiscale. On a atteint les limites « , estime M.  Pisani-Ferry, pour qui il existe un  » risque  » que les gains du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) soient en partie gommés par l’évolution salariale. Pour l’éviter, il propose de passer d’une obligation légale annuelle de négociation salariale –  » ce n’est pas la bonne méthode  » – à une obligation triennale. Il suggère en outre de changer la règle d’indexation du smic en le faisant dépendre de la progression de la productivité dans l’économie.

Trois : effectuer une revue de la dépense publique pour la ramener à 50  % du produit intérieur brut dans les années à venir.

Son homologue allemand, quant à lui, insiste sur le problème démographique auquel est confrontée l’Allemagne, qui nécessite  » des ajustements de grande envergure « . Mais c’est surtout sur le déficit d’investissement qu’il met l’accent, évaluant à 75  milliards d’euros par an le retard d’investissement outre-Rhin. Cela nécessite à ses yeux d’établir  » une règle minimum d’investissement  » et, pour commencer, il estime que  » l’Allemagne devrait investir chaque année 8  milliards d’euros de plus qu’elle ne le fait actuellement, soit 24  milliards sur trois ans « . Se prononçant en faveur d’un  » pacte  » franco-allemand pour l’investissement au niveau européen, il appuie la création d’un cadre réglementaire commun.  » Il faut passer des déclarations aux actes « , conclut M. Enderlein.
 » Nous devons faire mieux « 

Pas sûr que les actes suivent, si l’on se fie aux déclarations des ministres. Certes, a indiqué M.  Macron,  » beaucoup de propositions qui sont faites pour la libéralisation des services seront reprises  » dans le projet de loi en préparation qui sera présenté en conseil des ministres le 10  décembre. Mais, en ce qui concerne la négociation salariale et le smic, il s’est montré prudent.  » Il n’est pas prévu de passer d’une négociation annuelle à une négociation triennale « , a-t-il tenu à préciser, pas plus qu’il n’est prévu de modifier la règle de calcul du smic.

En matière d’investissement, le ministre de l’économie, tout en saluant l’annonce du plan Juncker, a estimé que  » nous devons l’améliorer, nous devons faire mieux « . Il suggère d’ailleurs que les sommes consacrées à l’investissement puissent être sorties des calculs du déficit et de la dette ou de doter d’une capacité d’endettement le fonds européen qui va être créé pour investir.  » Nous devons prendre des risques collectivement « , a insisté M. Macron.

Le ministre allemand s’est, quant à lui, montré plus réservé, notamment sur l’effort d’investissement réclamé à son pays.  » Je ne sais pas si nous arriverons à faire trois fois 8  milliards d’euros mais je ne doute pas que M.  Enderlein saura revenir à la charge pour nous en convaincre, et surtout en convaincre Wolfgang Schäuble, ce qui ne sera pas le plus facile « , a glissé M. Macron, soulignant ainsi que, au sein de la coalition allemande, cette question se heurte à de fortes résistances. L’entourage de Wolfgang Schäuble, le ministre des finances, a largement relativisé la portée d’ » un rapport fait par deux économistes universitaires « . Une façon de contester le présupposé selon lequel l’Allemagne souffrirait d’un manque d’investissement et, en clair, une fin de non-recevoir.

Patrick Roger


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