Est-il si utile de donner toujours autant d’argent aux banques ?

C’est quand même malheureux de donner tellement d’argent à des acteurs qui ont déjà tout… En attendant, des entreprises se meurent, car ces mêmes banques se refusent parfois à les aider… Il n’est pas normal que des acteurs qui sont à la base d’une telle masse de spéculation, par essence malsaine pour l’économie, soit autant aidée aux dépends des véritables acteurs économiques aidant bien plus l’emploi que le secteur bancaire et financier…

Il est temps que les politiques mettent le hola à cette situation qui n’a que trop duré ! Le ‘Too big to fail’ (trop gros pour périr) doit cesser, ce, dans l’intérêt de l’économie classique et au détriment de la spéculation à tout va qui ne profite qu’à quelques uns en laissant les autres sur le carreau !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 18 décembre 2014

************

Il y a trop de dépense publique pour les banques !
L’industrie financière est le secteur le plus subventionné par les Etats

Il est une industrie qui bénéficie d’une politique volontariste à grande échelle, qui fait cruellement défaut dans tant d’autres domaines. C’est l’industrie financière. Les grandes banques ne font des profits que parce qu’elles bénéficient de garanties publiques. Le Fonds monétaire international a calculé que les subventions implicites auxquelles correspondent ces garanties se sont élevées à 300  milliards de dollars (240  milliards d’euros) en  2012 dans la zone euro. Le système financier ne survit que grâce à une politique monétaire titanesque.

En décembre  2011 et février  2012, presque 1 000  milliards d’euros (près de 8  % du PIB de la zone euro) ont été injectés par la Banque centrale européenne (BCE) dans un système bancaire au bord de la banqueroute. Cet automne, l’institut de Francfort a remis le couvert avec une opération de refinancement à long terme, et double maintenant la mise avec un programme de rachat de titres sur les marchés pouvant aller jusqu’à 700  milliards d’euros. Conjugué à des taux d’intérêt extrêmement faibles, l’effet de ces politiques est de soutenir artificiellement la valeur accumulée sur les marchés et de valider des stratégies financières déconnectées de la dynamique réelle de nos économies.

Pourquoi une telle débauche d’énergie au service d’un secteur dont l’utilité sociale est inversement proportionnelle aux revenus mirifiques qu’elle offre à quelques-uns ?

La réponse à cette question exige de revenir à un concept mobilisé depuis plus de deux siècles par les économistes : le capital fictif. C’est au moment où elle prend toute sa force que cette notion essentielle, que l’on trouve chez Karl Marx comme chez Friedrich Hayek, a été remisée aux oubliettes par la théorie économique.

Le capital fictif, c’est de la valeur validée par anticipation, la capitalisation présente d’intérêts ou de profits futurs. Depuis 1980, les formes élémentaires du capital fictif – dette privée du secteur non financier, dette publique, capitalisation boursière – n’ont cessé de croître, passant de 150  % à 350  % du PIB dans les principaux pays riches. Cette montée en puissance est encore plus vertigineuse si l’on prend en compte les créances accumulées dans le shadow banking (banque de l’ombre) et les produits dérivés.

Droit aux profits

Or, un tel amoncellement de droits de tirage sur la richesse à venir est insoutenable sans une intervention politique déterminée. En s’engageant à défendre la  » stabilité financière « , les pouvoirs publics donnent quitus aux détenteurs du capital fictif, leur accordant un véritable droit aux profits financiers.

La capacité de la finance à faire valoir ses exigences résulte du chantage systémique auquel elle soumet les gouvernements. Que ceux-ci rechignent aux réformes libérales qui dépouillent les populations de leurs acquis sociaux, aussitôt les taux d’intérêt s’envolent. Qu’ils augmentent la taxation sur les revenus les plus élevés, les capitaux se font la malle. Qu’ils hésitent à apporter leur garantie aux grandes institutions financières, et c’est le krach, la possibilité d’un effondrement bien réel des circuits de paiements et de crédits sans lesquels les transactions économiques les plus courantes sont impossibles.

Le candidat Hollande avait mal mesuré son  » ennemi « . En réalité, on assiste à une capture de l’action publique par les hommes de main du secteur financier : à un ancien vice-président de Goldman Sachs la présidence de la BCE ; à un ancien gérant de la banque Rothschild le ministère de l’économie. L’alternative, c’est la désaccumulation financière. Il faut restructurer une dette publique illégitime, soulager les ménages surendettés, socialiser un secteur financier qui ne peut de toute façon se passer de la béquille de l’Etat, contrôler la circulation des capitaux, mobiliser la politique monétaire au service du bien commun : répondre à l’urgence sociale, satisfaire la demande de services publics, entreprendre la transition écologique. C’est à ces tâches que devrait s’atteler le volontarisme politique, pas à stabiliser la finance.

par Cédric Durand

Please follow and like us: