Il faut étendre la notion d’ « Etre Charlie » au monde de l’entreprise !

Comme je l’ai souvent dit : « Quand on traite les gens comme de la merde, une partie se comporte comme telle ! ».

Ainsi, il est bien beau de défendre sa liberté d’expression, mais il faut aussi être équilibré et savoir être ouverts aux autres y compris dans le monde des entreprises.

Les discriminations à l’embauche et dans le monde de l’entreprise sont une réalité. Il faut donc aussi se battre contre elles pour « Etre Charlie ».

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 17 Janvier 2015

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Etre  » Charlie  » en entreprise

Les dirigeants, manageurs, recruteurs en tout genre étaient nombreux aux rassemblements de samedi  10 et dimanche 11  septembre pour se revendiquer de Charlie, puisque toutes les classes sociales étaient présentes dans les rues.

Reste à passer de la parole aux actes. En entreprise aussi. En se battant contre les stéréotypes qui multiplient les obstacles professionnels empêchant les jeunes issus de familles d’immigrés de faire carrière.

Pas seulement les barrières à l’embauche auxquelles se heurtent les jeunes non qualifiés. Mais aussi celles qui barrent la route aux jeunes diplômés. Car elles contribuent à ce désespoir, à ce sentiment d’un avenir bouché, à cette nécessité donc de chercher ailleurs des raisons de vivre.  »  Le manque de perspectives pour soi, ses proches et sa descendance – est une des – sources des fanatismes religieux  « , rappelait, dimanche, l’économiste Jean-Paul Betbèze sur son blog.

Or, les chiffres sont patents. La Charte de la diversité, instaurée fin 2004, n’a pas permis d’ouvrir équitablement l’accès aux entreprises pour les jeunes diplômés issus de l’immigration, analyse Sonia Hamoudi, rapporteure de l’étude du Conseil économique, social et environnemental (CESE) sur L’Apport économique des politiques de diversité à la performance de l’entreprise : le cas des jeunes diplômés d’origine étrangère, publiée en septembre 2014.  »  Le fait de détenir des diplômes de niveau plus élevé ne semble pas avoir d’effet significatif en faveur de l’égalité de traitement, bien au contraire  « , ajoute-t-elle, au regard des résultats du baromètre de l’Observatoire des discriminations, publié en 2006.

Une étude de l’Insee enfonce le clou.  »  Seulement un tiers de l’écart de taux d’emploi entre les Français hommes descendants d’immigrés maghrébins et l’ensemble de la population peut s’expliquer par des critères d’âges, de diplômes, de situation familiale et géographique ou de catégorie socioprofessionnelle des parents (…). Pour les plus hauts niveaux de diplômes, la part dite inexpliquée constitue l’essentiel de l’écart  : 85  % pour les hommes et 75  % pour les femmes.   » Difficile de ne pas penser que des pratiques discriminatoires ne se cachent pas derrière ce qui semble inexplicable.

A ceux qui prétendent – ce qui est fort discutable – que ce n’est pas à l’entreprise de régler les problèmes de société, on peut aussi répondre que la diversité est un atout économique. Ce fait a été maintes fois démontré. Les raisons en sont nombreuses, explique le rapport du CESE. Certaines, liées aux pratiques de marketing identitaire, sont évidentes.

Créativité et productivité

Une femme d’origine africaine est plus à même de savoir commercialiser des produits de beauté adaptés à sa chevelure ou son type de peau. Mais plus généralement, la diversité économique et culturelle est source de créativité et de productivité. Le cabinet Goodwill Management a quantifié cet apport à partir de quatre grandes entreprises du réseau IMS-Entreprendre pour la cité (Axa, L’Oréal, Orange et Vinci) et de quatre dimensions-clés de la diversité (femmes, minorités visibles, personnes handicapées et seniors).  »  La diversité des ressources humaines, dès lors qu’elle est bien managée, augmenterait la rentabilité de 5  % à 15  %, selon les types d’activités. Concernant plus particulièrement la diversité des origines des salariés, cette étude avance un absentéisme plus faible de ces salariés (cinq jours par an contre onze jours en moyenne pour les autres salariés) et un taux de turnover inférieur de 10  %.  « 

Un recruteur, ou manageur, a donc toutes les bonnes raisons non seulement sociales et sociétales, mais aussi économiques d’agir en Charlie. Il ne lui reste donc plus qu’à se battre contre ses propres préjugés et peurs, ses propres barrières personnelles. En commençant par les identifier avec justesse. Ce n’est ainsi pas la soi-disant menace que poseraient les émigrés sur l’emploi qui expliquerait l’hostilité qui leur est manifestée sur le marché du travail, mais la peur de voir son identité modifiée, à savoir de devoir ouvrir ses portes à un être que l’on perçoit comme trop différent de soi, ont ainsi prouvé Jens Hainmueller et Daniel Hopkins. Ces chercheurs en sciences politiques, respectivement à Stanford et Georgetown (Etats-Unis), spécialistes des questions d’immigration et d’intégration de ces prestigieuses universités américaines, expliquent les résultats de leurs travaux dans un article publié en  2014, dans l’Annual Review of Political Science.

L’association IMS-Entreprendre a publié un guide pratique pour comprendre les stéréotypes et les combattre. Il complète les très nombreuses autres publications listées sur le site de la Charte de la diversité. Pour être Charlie, au sens d’ouvert aux différences et tolérant. En boîte, comme ailleurs.

par Annie Kahn

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