Une avancée pour la défense de la planète…

Oui, c’est une avancée indéniable pour la défense de la planète. Cependant, y’avait-il besoin d’ajouter dans le Code civil la notion de préjudice écologique ? On avait déjà le Code pénal pour ça, pourquoi donc ajouter encore des textes à un Code qui en déborde ?

Le Code pénal est invoqué lorsqu’il y un trouble manifeste à l’ordre public. Si la pollution n’est pas un trouble manifeste à l’ordre public, qu’est-elle ?

Ainsi, il aurait été, à mon sens, beaucoup plus simple de renforcer les peines liées à la pollution en matière pénale, que d’ajouter des articles dans un Code qui est chargé de régler les différents entre particuliers… La justice pénale aurait pu aussi être invoquée lorsqu’il aurait été nécessaire de dédommager les associations : la constitution de partie civile existe en matière pénale à ce que je sache !

Bref, je m’interroge sur l’utilité d’ajouter des articles à un Code civil en nous faisant croire que c’est une avancée alors même que le Code pénal est là pour gérer les préjudices à l’ordre public qu’est la pollution, quelle qu’elle soit…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 12 Février 2015

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Le préjudice écologique va être inscrit dans la loi
La garde des sceaux s’engage à instaurer dans le code civil le principe de responsabilité environnementale

Christiane Taubira présentera  » au cours du premier semestre 2015  » un projet de loi relatif à la responsabilité civile environnementale. Ce texte, en l’état en quatre articles, entend, selon la garde des sceaux,  » faire entrer dans notre code civil la nature et la réparation du préjudice écologique « .

Concrètement, il s’agit de mieux prendre en compte, lors d’une catastrophe écologique par exemple, les dommages causés à la nature sauvage.  » Le végétal, l’animal, la chose n’ont pas de valeur indemnisable tant qu’ils n’entrent pas dans le patrimoine d’une personne physique ou d’une personne morale « , constate la ministre. Il s’agit d’accorder à ce végétal, cet animal, cette chose, même sans propriétaire, une valeur ouvrant droit à des réparations.

A chaque marée noire, à chaque accident industriel, à chaque outrage écologique, les associations de sauvegarde de l’environnement, mais pas seulement elles, se plaignent que les dégâts occasionnés sur la faune ou la flore, que les dégradations causées par la pollution sur les côtes ou les sols, soient peu pris en compte.

Après la catastrophe de l’Erika, en 1999, le tribunal qui devait juger des responsabilités dans ce drame a ouvert une brèche dans la jurisprudence en reconnaissant en 2008 le préjudice écologique et en estimant qu’il devait être réparé. La Cour de cassation l’a suivi, en septembre 2012, et a, à son tour, admis ce principe. S’il est adopté par le Parlement, le projet de Christiane Taubira permettra de consolider encore cette notion.

Failles législatives

L’annonce devait être faite, mercredi 11 février, en clôture d’un colloque organisé par Le Monde sur la criminalité écologique. Il devait être largement question des failles législatives, constatées au niveau international, dans la lutte et la prévention des atteintes à la nature.Dans sa série  » Ecocide « , publiée depuis le 26 janvier, Le Monde a dénoncé quelques scandales, comme le commerce illégal du bois de rose à Madagascar, les ravages des mines de cassitérite en Indonésie, ou encore le recyclage des produits électroniques français en Chine.Lors du colloque, mercredi, la plupart des intervenants, qu’ils soient universitaires, animateurs d’ONG, responsables européens de la lutte contre le crime organisé ou représentants d’Interpol, devaient faire état de la difficulté de leur travail et notamment pointer la faiblesse de la réponse légale aux destructions en cours.

Calendrier à définir

Une équipe de juristes internationaux, animée par le Pr Laurent Neyret, a d’ailleurs travaillé sur ces lacunes et formulé trente-cinq propositions pour les droits français et international. Parmi elles, harmoniser le droit pénal de l’environnement à l’échelle internationale, consacrer le crime dit d’ » écocide « , favoriser la responsabilité pénale des entreprises transnationales, faciliter l’accès des victimes à la justice, protéger les lanceurs d’alerte, etc., jusqu’à l’idée d’une Cour pénale internationale de l’environnement.

Par son projet de loi sur le préjudice écologique, la France pourrait ainsi apporter son modeste écot à la cause environnementale. Le texte privilégie la réparation en nature, c’est-à-dire l’idée d’une remise en état du milieu aux frais de celui qui l’a dégradé, en vertu du principe pollueur-payeur. En cas d’impossibilité manifeste, il peut être envisagé une indemnisation en remplacement. Le juge peut également envisager une amende civile si, dit le texte,  » l’auteur du dommage a commis intentionnellement une faute grave, notamment lorsque celle-ci a engendré un gain ou une économie « .

La future loi, assure la ministre, permettra d’ » apprécier et mesurer les services rendus par les écosystèmes « . Ce ne sera pas la plus simple des tâches que de donner une valeur marchande ou utilitaire à la nature. Combien pour un oiseau, pour un arbre, pour une fleur ? Quand une espèce disparaît, comment estimer le dol collectif ? Des barèmes existent déjà, mais restent encore très flous. Il faut également  » élaborer la liste des personnes habilitées à demander réparation « . Qui ? L’Etat, les collectivités locales, les associations de défense de l’environnement ?

Une autre inconnue, de taille, concerne l’éventuelle création d’un fonds de réparation environnementale, sur le type du fonds Barnier pour les catastrophes naturelles. On pourrait y puiser en urgence des ressources pour sauvegarder ou restaurer un lieu naturel. Mais cette idée, émise par un groupe de travail convoqué en 2013 sous la présidence d’Yves Jegouzo, professeur de droit public, si elle semblait avoir été retenue, ne figure pas dans le projet actuel. L’article 5 qui le prévoyait est  » réservé « , donc encore en phase d’étude. On devine aisément les réticences de ceux qui seraient logiquement amenés à le financer : industriels, agriculteurs ou particuliers par le biais de leurs primes d’assurance. Reste également à définir un calendrier d’examen. La ministre admet que des consultations sont encore en cours. On sait d’autres ministères très hostiles à ce nouvel arsenal juridique. Par deux fois déjà, en 2013 puis 2014, le projet avait été annoncé, claironné même, puis repoussé, se souviennent les associations qui le soutiennent. Il faudra donc attendre l’inscription au conseil des ministres puis à une session parlementaire, pour savoir si cette fois sera la bonne. L’organisation en France, à la fin de l’année, d’une conférence internationale sur le climat et la volonté du gouvernement de verdir sa politique à cette occasion semblent offrir une conjonction favorable.

Outre le projet de loi qui émarge au droit civil, Christiane Taubira propose un volet pénal à la lutte contre la criminalité écologique. Une  » circulaire de politique pénale  » sera diffusée dans le milieu judiciaire, notamment auprès des procureurs. Elle préconisera  » une réponse pénale adaptée à la gravité des atteintes subies  » et  » des poursuites systématiques lorsque les atteintes sont graves ou irréversibles « . En filigrane, mais en filigrane seulement, se trouve l’idée de la  » spécialisation de certains magistrats « , peut-être le germe d’un pôle, à la manière de ce qui se fait en matière financière, terroriste ou sanitaire.

Benoît Hopquin


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