Quand la distribution excessive de dividendes aboutit à un abus de bien social

En tant que propriétaire, quand on se sert au delà du raisonnable, dans les caisses d’une entreprise, en oubliant les règles élémentaires de bonne gestion, on appelle cela un « abus de bien social ».

Dans cette affaire, c’est exactement de cela dont il s’agit : on veut reverser des dividendes excessifs (part du bénéfice reversé aux actionnaires, donc, aux propriétaires), ce, en oubliant sciemment que des fonds sont nécessaires à l’entreprise pour exercer son domaine d’activité.

La Fed sort donc aujourd’hui sa règle en fer pour taper sur les doigts de propriétaires de banques peu scrupuleux.

Car, qu’on ne s’y trompe : à trop vouloir siphonner l’entreprise, c’est son domaine d’activité dans son ensemble que l’on met en péril. Et quand l’Etat renfloue les banques par l’argent public, par peur qu’elles ne s’effondrent en entrainant l’ensemble du système économique dans son sillage, les manières de ces propriétaires s’apparentent à un braquage en règle ! Braquage légal mais braquage tout de même !

Légal ? Pas tant que ça… Si on a un juge avec de l’imagination, il peut sans conteste condamner ces actionnaires pour « abus de bien social »…

Aujourd’hui, la Fed a mis le hola dans ce dossier.

Demain, on pourrait très bien avoir affaire à une instruction menée par un juge financier pour condamner ce genre de pratiques.

Il n’y a plus qu’à trouver le juge avec l’imagination nécessaire…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 13 Mars 2015

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Dividendes : le rappel à l’ordre de la Fed
Après des  » stress tests « , la Réserve fédérale a refusé les plans de distribution de Deutsche Bank et Santander. Et imposé à Goldman Sachs, JPMorgan et Morgan Stanley de les alléger

Les tests de résistance imposés par la Réserve fédérale américaine (Fed, banque centrale) aux banques implantées aux Etats-Unis ont réservé quelques déconvenues pour certaines. Sur les 31 établissements concernés par cette évaluation de leur solidité en cas de grave crise financière, un certain nombre d’entre eux se sont fait rappeler à l’ordre et devront revoir leur copie.

Le but de ces tests consiste à s’assurer que les grandes banques restent en situation de pouvoir  » continuer à prêter aux entreprises et aux ménages, même pendant une période de stress financier important « , a rappelé Daniel Tarullo, le gouverneur de la Fed, chargé des questions de régulation.

Les scénarios envisagés imaginent des défaillances d’entreprises en série, une chute marquée de la Bourse, un accroissement de la volatilité sur les marchés, bref, tout une série de phénomènes susceptibles de provoquer de lourdes pertes pour les banques.

La question étant de savoir si les établissements disposent de suffisamment de fonds propres par rapport à leurs engagements et qu’elles ne distribuent pas une part trop importante de leurs bénéfices à leurs actionnaires.

Deux banques étrangères – Deutsche Bank et Santander – se sont ainsi vu tout bonnement refuser leurs plans de distribution de dividendes. Pour la banque espagnole, c’est la deuxième année consécutive qu’elle échoue à passer avec succès ces stress tests.

 » Carences significatives « 

La Fed a estimé que son plan de distribution de capital présentait  » des faiblesses critiques et généralisées « . Le dossier est d’autant plus sensible que Santander est un gros prêteur aux Etats-Unis.

Pour Deutsche Bank, le régulateur parle de  » carences nombreuses et significatives  » en termes d’identification des risques, aussi bien dans sa capacité à anticiper des pertes que dans sa façon de procéder à des contrôles internes. La banque allemande s’est défendue, dans un communiqué, en soulignant qu’elle avait recruté au total 1 800 salariés aux Etats-Unis chargés de renforcer ces contrôles.

Par ailleurs, Bank of America, la deuxième plus grosse banque américaine en termes d’actifs, n’a recueilli qu’une approbation  » sous condition « . Charge à elle d’apporter un certain nombre d’éléments d’ici à septembre afin d’obtenir le feu vert de la Fed pour distribuer un dividende et procéder à des rachats d’actions comme elle entend le faire.

Bank of America projette de lancer un plan de rachat d’actions de 4 milliards de dollars (3,76 milliards d’euros). Mais, là encore, le régulateur estime que les contrôles internes ne sont pas à la hauteur des attentes, ce qui fait peser un doute sur sa capacité à redistribuer autant d’argent aux actionnaires.

 » Nous croyons que ce programme de rachat d’actions est la meilleure façon de continuer à créer de la valeur pour nos actionnaires « , a toutefois maintenu Brian Moynihan, le patron du groupe bancaire dans un communiqué.

Enfin, le régulateur a également demandé à Goldman Sachs, JPMorgan Chase et Morgan Stanley de réduire la distribution de leurs profits à leurs actionnaires respectifs. Goldman Sachs se fait ainsi rappeler à l’ordre pour la deuxième année consécutive.

Morgan Stanley, de son côté, a dû revoir à la baisse les 5 milliards de dollars que la banque comptait redistribuer à ses actionnaires, en partie sous la forme de rachats d’action (à hauteur de 3,1 milliards) et en partie sous la forme d’une augmentation de 50 % du dividende. En revanche, Citigroup, qui avait échoué à ces tests deux fois lors des trois dernières années, a cette fois franchi l’obstacle avec succès.

Les contraintes imposées par la Fed aux grandes banques commencent à produire des effets spectaculaires en termes de distribution de dividendes. Selon Reality Share, une firme d’investissement citée par le Wall Street Journal, les 23 banques de l’indice S&P 500 avaient distribué en 2007 plus de 45 milliards de dollars à leurs actionnaires. Le chiffre est tombé à 26,4 milliards cette année.

Stéphane Lauer


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