L’Homme, espèce animale la plus stupide de la planète ?

On dit souvent que l’Homme est en train de détruire la planète. Il n’en est rien. La Terre en a vu d’autres et beaucoup d’autres, elle pourra donc largement se remettre du passage de l’Homme sur sa surface.

Par contre, concernant l’avenir même de l’humanité sur la planète, c’est une toute autre histoire ! L’Homme est en train de tout faire pour gréver lourdement son propre avenir au sein de sa maison. Pire : on a beau lui dire, les actions ne se trouvent pas à l’auteur des enjeux pouvant lui permettre d’avoir une survie sur la planète à longue échéance.

L’Homme est, et de loin, l’animal le plus stupide habitant cette planète car il sait comment handicaper son avenir en se tirant une balle dans le pied, et est persuadé d’être plus intelligent que les autres.

Que l’on n’engage pas les moyens pour faire en sorte de laisser une maison correcte à nos enfants et plus dure sera la chute… La chute sera l’extinction même de la race humaine à la surface de la Terre : cela sera dommage pour nous mais la Terre ne s’en portera que mieux…

Pendant ce temps, notre maison continue de brûler et nous continuons à regarder ailleurs…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 05 Août 2015

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Le savoir de l’homme, un danger pour la vie
2|7Les intellectuels face à Hiroshima Le progrès technologique, telle la maîtrise de l’atome, s’est réalisé aux dépens de la Terre. L' » Homo sapiens « , défini par ses connaissances, doit tendre vers une plus grande sagesse, faute de quoi il risque de détruire la nature
Il y a soixante-dix ans, des humains utilisaient pour la première fois deux armes nucléaires pour amener le Japon à capituler… A la fin de ce conflit mondial, les grandes puissances, essentiellement les Etats-Unis et l’Union soviétique, se livreront à une course à l’accumulation d’armes nucléaires, qui amènera au pic de 1985 avec 70 000 engins prêts à être utilisés. Si diverses nations disposent de ces armes, le nombre total d’engins a bien diminué aujourd’hui, puisque nous l’estimons à environ 4 500 opérationnels.

Si l’inquiétude pour la menace pesant sur la vie suscitée au cours de la guerre froide, devant l’amoncellement dramatique du nombre d’engins nucléaires, était très forte, le sujet est beaucoup moins discuté aujourd’hui. Il était néanmoins au cœur d’une récente conférence des scientifiques (plus de 2 000 participants),  » Our Common Future under Climate Change « , ( » Notre avenir commun à l’ère du changement climatique « ), qui s’est tenue à l’Unesco, à Paris, du 7 au 10 juillet.

L’une des sessions parallèles (le 9 juillet, à l’université Pierre-et-Marie-Curie), animée par des chercheurs de l’université Rutgers (New Jersey), avait trait au thème  » Climat et conflits « , et les exposés présentés tournaient autour du rôle du changement climatique sur le déclenchement de conflits armés et, à l’opposé, sur l’influence possible de conflits armés sur le climat. Nous sommes revenus à ces travaux conduits dans les années 1970, et qui avaient été quelque peu abandonnés, sur les conséquences d’un  » hiver nucléaire « .

Autodestruction
En s’appuyant sur des traces géologiques et paléontologiques, la recherche a su montrer comment l’histoire de la planète a été marquée par de vastes crises d’extinction massive des populations d’espèces vivantes. Selon les connaissances actuelles, une soixantaine de ces épisodes d’extinction sont survenus depuis huit cent millions d’années. Cinq d’entre eux, les plus célèbres et les plus graves, se sont déroulés il y a 440 millions d’années (Ma), 368 Ma, 252 Ma (la fin des trilobites, des coraux tabulés, 96 % des espèces continentales et marines s’éteignant), 215 Ma et 65,5 Ma (la fin des ammonites et des dinosaures).

Quelles ont été les causes de ces crises ? A chaque fois, elles sont très largement multifactorielles : intense activité volcanique, avec de gigantesques épanchements de lave et d’énormes émissions de gaz à effet de serre (vapeur d’eau, dioxyde de carbone, dioxyde de soufre, anhydride sulfureux…), relargages massifs de méthane à partir d’hydrates marins et du dégel du permafrost (sol gelé en permanence), chute du niveau d’oxygène dans l’atmosphère et dans l’océan, réchauffement rapide d’au moins 6°C, impacts de gigantesques astéroïdes… Tous ces facteurs sont évoqués pour expliquer ces disparitions massives. La collision de la météorite tombée à la fin de l’ère secondaire dans une zone délimitée du Yucatan au Mexique, en partie responsable de la cinquième crise majeure, a été largement documentée. Un tel événement peut réellement avoir des conséquences planétaires.

Les grandes explosions volcaniques historiques ont été beaucoup étudiées, notamment leurs conséquences sur l’équilibre de la Terre (volcans de l’île de Lombok et Krakatoa en Indonésie, ceux de l’archipel du Vanuatu, Pinatubo aux Philippines, Santorin)…

Les gigantesques quantités d’énergie libérées sur les zones d’impact ou d’éruption, dégageant des chaleurs énormes (la vie peut  » cuire  » sur place !)dues aux fantastiques quantités defumées et de poussières libérées, sont toujours suivies d’une période de nuit prolongée entraînant la destruction de la vie végétale photosynthétique et faisant dramatiquement chuter les températures, lumière et chaleur du rayonnement solaire ne parvenant plus au sol.

Sur les menaces qui guettent aujourd’hui l’humanité, si nous excluons l’impact d’un gigantesque astéroïde, toutes les autres sont intérieures et liées aux activités humaines. Elles seraient la résultante de nos guerres de civilisation ou idéologiques, avec autodestruction par usage massif d’engins nucléaires ; le cocktail explosif de la misère et de l’humiliation, qui mène au terrorisme et à la tyrannie ; l’arrogance d’ultra-riches face à une désespérante pauvreté ; la démesure de l’économie financière. A cette liste il faut encore ajouter la destruction de l’habitabilité humaine de la Terre avec un défi écologique grandissant face à la dérégulation du climat, aux pollutions, aux surexploitations de l’environnement… Tout cela risque en outre de provoquer des migrations massives de populations. Quel est donc le rôle de la science ? Quel usage fait-on des découvertes scientifiques ?

En 1758, le naturaliste suédois Carl von Linné (1707-1778) désigne le mammifère humain sous la dénomination de Homo sapiens (homme savant et sage). Sommes-nous réellement parvenus à ce stade ? Edgar Morin parle en 2010 de  » Homo demens  » ( » fou « ), mais peut-être en sommes-nous toujours au stade de l’Homo faber, dont l’intelligence se borne à savoir fabriquer, sans capacité critique. Cet humain saura-t-il s’adapter à lui-même ? Est-il capable d’accepter ces menaces qu’il perçoit, sa folle démographie, les gigantesques incidences de ses activités sur la vie – humaine et non humaine – et sur les grands équilibres bio-géo-chimiques ? Face à ces  » scepticismes  » de tous ordres, ces dénis, le scientisme s’installera-t-il ? Où sont, liées à notre dignité d’humain, nos considérations éthiques ? L’humain peut-il s’accepter lui-même ?

Deux attitudes délétères caractérisent l’humain : l’arrogance et la cupidité. Elles sont totalement à proscrire si nous voulons nous préparer un monde soutenable qui restituera l’harmonie entre l’humanité et son environnement, entre l’humain et le non-humain. Cette économie d’extraction autorisant de vastes profits sur la destruction immédiate de la nature ou sa surexploitation, nous le constatons tous les jours, ne fonctionne pas à terme : alors, si tout le monde parvient au même diagnostic, nous devons changer, mais comment le faire dans le bon sens, le partage, l’humilité et le retour à l’harmonie ? Le vivant offre à l’humain une fantastique réalité, il est renouvelable ! Alors stoppons ces stupides surexploitations qui dépassent les seuils de  » renouvelabilité  » et tuent en permanence la poule aux œufs d’or !

Conscience planétaire
Réutiliserons-nous ces armes nucléaires de destruction massive ? Cette force de dissuasion qui a démontré sa réalité jusqu’ici, comment est-elle considérée aujourd’hui ? Nous préparons-nous de nouveaux Hiroshima et Nagasaki ? Le lauréat du prix Nobel de chimie de 1995, le météorologue et chimiste hollandais Paul Josef Crutzen, a proposé un terme en 2000, qui n’a pas encore été homologué par les géologues, mais qui a beaucoup plu aux écologues,  » l’anthropocène « . C’est la fraction de l’histoire durant laquelle le plus puissant moteur de l’évolution est devenu, sur Terre, la présence de l’humain, associé à son cheptel domestique et agronomique, et son cortège d’activités. Alors qu’auparavant ces facteurs étaient le climat, la température, le sel de l’océan, l’oxygène, la lumière, l’activité volcanique… tout a changé ! L’humain s’est montré capable de faire un trou dans la couche d’ozone, d’accumuler de gigantesques  » continents de plastique  » sur l’océan, de polluer l’ensemble des sols et des eaux, de détruire de vastes fragments de forêts tropicales et des récifs coralliens (qui sont les écosystèmes les plus riches de la planète en nombre d’espèces vivantes), d’épuiser des stocks de pêche, de tout disséminer partout, de changer le climat…

Quand débute l’anthropocène ? Avec la domestication du feu, il y a huit cent mille ans ? Est-ce au moment du néolithique, vers 12 000 ou 10 000 ans avant Jésus-Christ, lorsque notre espèce quitte son nomadisme, accélérant sa démographie en inventant agriculture et élevage ? Est-ce au moment du passage du  » cheval animal  » au  » cheval-vapeur « , vers 1784, quand James Watt (1736-1819) invente la première locomotive, date à partir de laquelle nous allons massivement exploiter charbon et pétrole ? Ou bien est-ce au Japon, en 1945, quand explosent les premières bombes atomiques ? Cette année 1945, qui sera suivie par une explosion démographique sans précédent (trois fois plus d’habitants en soixante-dix ans !), marque très certainement une charnière dans l’histoire de l’humanité.

La plus grande menace guettant l’humain est finalement lui-même ! Alors, comment avoir la bonne pensée politique complexe pour notre harmonie à retrouver avec la nature ? Comment accomplir cette métamorphose pour parvenir à une conscience d’humanité planétaire ? En estimant les vitesses d’évolution, en tentant de prédire les trajectoires possibles et en planifiant les mécanismes à l’avance, nous pourrions sans doute fortement réduire l’impact de l’humain sur les espèces et les écosystèmes, et sérieusement améliorer les coûts économiques et sociaux de nos activités sur la nature. Il n’y a pas d’agriculture durable autre qu’écologique, il n’y a pas de santé durable autre qu’écologiquement fondée. Le capital naturel ne peut indéfiniment être appauvri et nous ne pouvons pas nous passer des services rendus par les écosystèmes. L’humain a aussi un besoin profond de communication étroite avec la nature, nous l’oublions trop souvent !

Une prise de conscience généralisée est en cours, mais suivrons-nous un rythme de changement de nos habitudes au moins aussi rapide que celui des changements environnementaux de tous ordres que nous déclenchons autour de nous ? Enfin, saurons-nous pleinement justifier au cours de ce XXIe siècle, et enfin mériter, ce terme de  » sapiens  » dont nous nous sommes affublés ?

par Gilles Bœuf

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