La mauvaise analyse de la montée du FN

Cet article est mal conçu car il ne fait pas suffisamment le lien entre le discours faux du FN et ce qui mène à ce que l’on vote pour lui.

Le FN veut faire croire que le chômage est dû aux étrangers. C’est la raison pour laquelle je ne suis absolument pas d’accord avec le titre de cet article.

L’amalgame fait entre immigration et chômage est dans l’ADN du parti de Marine Le Pen. C’est un amalgame totalement faux, mais il est efficace car il permet de porter la responsabilité des problèmes sur d’autres, de surcroit, sur d’autres qui sont différents…

Quand le chômage et les problèmes économiques montent, il faut un bouc-émissaire, et qui donc peut mieux tirer les marrons du feu qu’un parti qui a toujours dit et affirmé que les problèmes économiques étaient dus aux étrangers qui venaient voler le pain des Français ?

On peut donc faire toutes les études que l’on veut en disant que le vote FN est un vote contre le chômage, ce vote est d’abord un vote raciste puisque ce parti est le seul à faire le lien, horriblement faux mais efficace, entre les deux !

Si on dit que le chômage est en parti dû à des allocations chômage qui ne poussent pas les Français à rechercher du boulot, on n’est pas efficace. Mais si on dit que ce sont les étrangers qui le font, l’efficacité du discours est grandiose car il permet de reporter la faute sur d’autres qui n’ont pas la même culture, la même couleur de peau et les mêmes origines ! C’est sur ce terreau que le FN croit et c’est un terreau très efficace… sauf qu’il est faux et qu’il ne résoudra rien quand le FN viendra au pouvoir…

Pire : il accroitra nos problèmes en isolant notre pays sur l’échelle internationale. La solution sera donc pire que le mal et enfermera la France dans une situation inextricable car basée sur des faits erronés aboutissant à la mise en oeuvre de mauvaises solutions…

L’immigration ne fait pas monter le FN en tant que telle, ni même l’insécurité. L’une car elle n’est pas un problème en soi, et l’autre car elle touche une frange de la population beaucoup moins importante que le chômage. Mais si on lie, comme le FN est le seul à le faire, immigration avec chômage et immigration avec insécurité, le FN explose ses scores en disant que les problèmes économiques viennent de causes extérieures au peuple Français, même si c’est faux !

Il est donc faux de dire que le vote FN n’est pas un vote contre les étrangers ! Bien au contraire, c’est un vote anti-étrangers car il donne le prétexte à ce racisme !

Aux politiques de lutter contre le chômage afin de démonter ce discours faux du FN : là-dessus cet article a raison…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 17 décembre 2015

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La percée du FN est un vote contre le chômage, non contre les étrangers
Une baisse du nombre de demandeurs d’emploi œuvrerait davantage au déclin du parti frontiste qu’un débat sécuritaire ou sur l’immigration
A rebours du discours déployé par la gauche et Les Républicains, une analyse statistique du vote Front national au premier tour des élections régionales atteste la prévalence de la question sociale, et en particulier du chômage, comme un des principaux motifs du vote FN.

Les réalités migratoires et sécuritaires ont, en effet, beaucoup moins œuvré dans ce sens. Ce fait acte le triomphe de la stratégie d’élargissement du discours frontiste depuis l’ascension de Marine Le Pen à la tête du parti, qui tend à mordre davantage sur les considérations économiques.

Depuis 2011, le FN a effectué une mue idéologique, à la faveur d’une stratégie de captation du sentiment de déclassement des classes moyennes – notamment pointé par Eric Maurin dans La Peur du déclassement (Seuil, 2009) –, de dénonciation du désengagement de l’Etat, de l’enclavement de certains territoires, ou encore du dépérissement des services publics.

Le FN se nourrit aussi du divorce désormais patent entre une élite urbaine et mobile dans la mondialisation et les classes populaires des régions sinistrées en marge de la croissance. Ainsi, la généalogie ultradroitière du parti, ainsi que ses vieux thèmes de prédilection qu’étaient l’immigration, la préférence nationale et l’insécurité, ne sont plus que les parties d’un tout beaucoup plus large.

La forte percée du Front national lors des élections régionales du 6 décembre doit s’analyser à l’aune de cette nouvelle grille de lecture. Nous avons confronté les résultats du premier tour aux données de l’Insee et de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales sur le chômage, l’immigration et les crimes et délits déclarés au niveau départemental, avec pour objectif de hiérarchiser les motifs du vote Front national en établissant l’intensité et le sens de la corrélation entre le vote frontiste lors de cette consultation et ces trois variables (chômage, immigration, insécurité).

Les résultats attestent le triomphe de la nouvelle stratégie électorale du FN. Ainsi, lorsque le chômage (au sens du Bureau international du travail) augmente de 1 point, le vote FN augmente de 2,6 points. De même que, pour ce premier tour, le chômage explique le vote FN pour 32,8 %.

La stagnation sociale
En effet, comme le notait le sociologue Jean-Pierre Le Goff, l’émergence du chômage de masse produit  » de puissants effets de déstructuration anthropologique et sociale « . Alors que la valeur travail demeure un référent individuel et collectif cardinal de la société française, l’enlisement dans la précarité produit des effets délétères dans de nombreux pans de la société. Pour l’auteur de La Fin du village (Gallimard, 2012), le chômage, en particulier des jeunes, milite pour saper  » l’ethos collectif  » en érodant la confiance dans l’avenir des familles.

De cette défiance envers l’avenir naîtrait le creuset du vote frontiste. Elle serait également nourrie par la stagnation sociale confirmée par l’enquête de Camille Peugny (Paris-VIII, Observatoire sociologique du changement/Sciences Po) sur  » La dynamique générationnelle de la mobilité sociale  » (Idées économiques et sociales n° 175, 2014), dans laquelle le sociologue notait une relative stagnation des positions sociales intergénérationnelles entre 1986 et 2009. En 1986, 36 % des individus (hommes et femmes) appartenaient à la même catégorie sociale que leur père, contre 34 % en 2009.

Parallèlement, si l’on s’intéresse à la présence d’étrangers et à l’insécurité avoisinante, mesurées respectivement par la part de population étrangère et le nombre de crimes et délits rapporté à la population, on constate que ces deux réalités n’alimentent pas le vote FN, à l’inverse du chômage.

Les crimes et délits n’expliquent, en effet, que 3,1 % du vote frontiste pour ce premier tour et la concentration de populations étrangères n’explique, quant à elle, que 3,9 % de ce vote. Plus encore, ces variables sont négativement corrélées au vote FN (cœfficients respectifs de – 0,525 et – 0,687).

Pour simplifier, on peut donc dire que moins il y a eu de crimes et délits rapportés localement, moins il y a d’étrangers établis, et plus on a voté FN dimanche 6 décembre. Ainsi, la défiance vis-à-vis de la figure de l’étranger et la peur de l’insécurité semblent davantage relever d’un sentiment et d’une crainte. C’est donc bien la perception déformée d’un environnement conçu et appréhendé comme anxiogène qui nourrit le vote FN, plutôt que des expériences réellement subies par les individus au niveau local.

La riposte contre le Front national doit donc s’établir sur un terrain économique, et non sociétal. Une décrue du chômage devrait, en effet, davantage œuvrer à un déclin du FN qu’un débat strictement sécuritaire ou se cristallisant sur les effets de l’immigration, puisque, en définitive, celui-ci ne ferait qu’entretenir les craintes sur lesquelles repose une partie du vote FN.

Trois réponses de nature économique doivent alors être prioritairement apportées : la lutte contre le chômage des jeunes, l’amélioration de la mobilité sociale et la résorption de la fracture territoriale.

Sans la mobilisation de signaux forts dans ce domaine, le désenchantement politique qu’incarne le vote FN pourrait s’étendre un jour aux ferments de nos valeurs républicaines.

Par Philippe Englebert et Faÿçal Hafied

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