Les sénateurs ont-ils défendu l’intérêt général dans leurs décisions ?

A quel jeu jouent les sénateurs dans cette histoire ? Ont-ils oublié l’intérêt général et l’intérêt impérieux de préserver la santé des concitoyens ?

Le principe de précaution élémentaire aurait du conduire à ce que des molécules soupçonnées de cancer soient interdites : las, il n’en est rien ! A quoi jouent donc nos élus ?

Quand on va jusqu’à insulter la nature en laissant des pièges mortels aux chouettes, sert-on l’intérêt général ?

Il serait temps que le Sénat s’occupe un peu plus des citoyens et un peu moins des lobbys, car la contestation et le vote vers le Front National est le pendant de ces actions honteuses !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 12 mai 2016

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Les sénateurs étrillent le projet de loi sur la biodiversité

Le texte remanié par la commission sénatoriale supprime notamment l’interdiction générale des néonicotinoïdes

Jusqu’à présent, la future loi-cadre en faveur de la biodiversité, déposée par le gouvernement en mars 2014, avançait laborieusement mais plutôt favorablement. Son premier passage devant le Sénat, en janvier 2016, semblait même avoir bénéficié de l’effet COP21. Mais voilà que le projet de texte  » Pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages  » se confronte à un rude retour à la réalité à l’occasion de sa deuxième lecture par la Haute Assemblée.

Mardi 10 mai, en ouverture des débats, Barbara Pompili, secrétaire d’Etat chargée de la biodiversité, a pointé les avancées  » remises en cause  » lors du toilettage -sévère auquel s’est livrée la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable à la veille de l’examen du texte, qui doit durer jusqu’au 12 mai. Elle a fait part de sa détermination à obtenir un  » texte réellement ambitieux, opérationnel et à la hauteur des enjeux « , sous le  » sceau de la responsabilité  » de la part du Sénat en dépit du –  » contexte préélectoral « .

Car, à l’exception notable du chapitre sur le préjudice écologique sur lequel les sénateurs ont eux-mêmes apporté leur expertise juridique, c’est une longue liste de renoncements qui ressort du travail en commission. Outre l’inscription dans la loi du principe de non-régression en matière d’environnement et l’institution d’une taxe sur l’huile de palme, la décision d’interdire les pesticides de la famille des néonicotinoïdes est également abandonnée. Le droit d’engager une procédure en justice dans le but de défendre la nature est limité à certains acteurs ; la possibilité de classer certaines zones en  » espaces de continuités écologiques  » dans les plans d’urbanisme passe à la trappe.

 » Forme de droitisation « 

 » Ils ont même supprimé l’interdiction des poteaux creux, qui constituent des pièges mortels pour les chouettes, soupire le sénateur écologiste de Loire-Atlantique, Ronan Dantec. Il ne s’agit plus d’une loi de reconquête, mais de simples mesures d’accompagnement de la perte de la biodiversité que connaît le pays ! Les élus de droite se sont ressaisis « , résume-t-il pour expliquer ces ambitions revues à la baisse.  » Les lobbys, -notamment ceux très puissants de l’agroalimentaire, sont remontés au créneau « , renchérit son homologue du Morbihan, Joël Labbé.  » On assiste surtout à une forme de droitisation en prévision de la -primaire qui suscite le durcissement des positions vis-à-vis de -l’environnement. « 

Le président du parti Les Républicains a lui-même donné le ton. Ces dernières semaines, Nicolas Sarkozy a multiplié en public les déclarations-chocs vis-à-vis de l’écologie. Il a ainsi pris position pour le nucléaire – auquel il n’existe  » aucune alternative crédible « , selon lui –, s’est dit favorable à la recherche de gaz de schiste, à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes… Quant à la transition vers une agriculture moins destructrice pour l’environnement, l’ancien président de la République a tiré à boulets rouges sur cet objectif, le qualifiant de passe-temps pour  » bobos « ,  » faux nez d’une véritable obsession pour la destruction de notre puissance agricole « .

Or, derrière sa dimension d’inventaire à la Prévert d’une loi-cadre foisonnante, qui porte à la fois des grands principes et des dispositions sur les vieux moulins à l’abandon qui barrent l’écoulement naturel des rivières, par exemple, se cachent des oppositions fondamentales sur les modèles d’agriculture appelés à nourrir la planète.

A quel prix pour l’environnement, la biodiversité et la santé humaine ? C’est précisément sur ce terrain que la société risque d’avoir le plus de mal à comprendre les sénateurs qui s’apprêtent à reculer sur l’interdiction des -néonicotinoïdes.

 » J’explique avec pédagogie à mes collègues qu’il va falloir arrêter d’utiliser ces produits, même si on n’est pas à deux ans près pour y parvenir « , assure Jérôme Bignon, le rapporteur du projet de loi biodiversité pour la Haute Assemblée.  » J’essaie de les convaincre que ce n’est pas une affaire de quelques écolos contre le reste du monde, mais une préoccupation partagée par l’immense majorité de la société « , observe le sénateur Les Républicains de la Somme, à contre-courant de la majorité de son parti sur cette question.

Après être passé à la moulinette du Sénat, le projet de loi devrait être examiné en commission mixte paritaire le 25 mai. Si les deux Chambres parlementaires ne parviennent pas à un accord, ce qui paraît probable, le dernier mot reviendra à l’Assemblée nationale. Pour l’heure, le gouvernement a déposé vingt-quatre amendements. Sur le dossier emblématique des néonicotinoïdes, celui-ci envisage de venir à bout de ces pesticides en deux temps : d’abord au cas par cas en fonction des alternatives existantes, puis en décrétant une interdiction générale au 1er juillet 2020. Signe de l’intensité des crispations sur cette affaire, la date de leur fin a été repoussée à chaque étape du parcours législatif. Initialement, elle était prévue au 1er janvier 2017.

Martine Valo


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