La collégialité est-elle la résolution des maux des magistrats ?

Je ne pense pas que la collégialité soit la résolution des maux frappants les magistrats.

Je pense qu’il faut, au contraire, axer sur leur formation afin qu’ils oublient leur idéologie au profit de l’intérêt général, chose qu’ils ne font pas suffisamment, surtout quand on a affaire aux procès des politiques.

Les magistrats se conduisent, à ce moment, trop souvent en tant que lâches en oublient, trop souvent, qu’ils sont représentants des Citoyens de notre pays !

Le juge oublie trop souvent que la définition de la démocratie est « le pouvoir du peuple par le peuple ». En ce sens, trop souvent, ils en oublient l’intérêt général : un comble quand on pense que la définition de la démocratie est enseignée en première année de droit !

Quand cet oubli est la norme, multiplier les juges ne sert à rien : mettre 1, 2 ou 3 tocards ne va pas rendre une justice plus juste ! C’est bel et bien dans la formation, et surtout dans les sanctions que doivent résider les solutions !

Car oui, le juge doit être sanctionné quand il commet des fautes ! Cela n’est jamais fait… Pas étonnant, dès lors, que notre justice soit médiocre… Quand on voit qu’un juge a le droit d’inventer des faits, car la Cour de cassation part du principe que c’est la libre appréciation du juge sur le fond, on marche sur la tête !

Quant à la notion de morale, elle est au coeur de la société, in fine, au coeur de la démocratie ! Un acte immoral mais légal, ne devrait pas être légal dans une démocratie ! On le démontre donc bel et bien : un président d’une cour d’appel ne connaît pas les fondamentaux démocratiques en reniant les prérequis moraux à une décision de justice ! S’il fallait une preuve éclatante de l’incompétence de la justice, ce Monsieur en a fait une démonstration éclatante !

L’incompétence de la justice est donc dû l’incompétence de nos juges : le manque de moyens a bon dos !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 4 août 2016

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 » La morale n’a pas sa place dans les tribunaux « 

Pour Xavier Ronsin, président de la cour d’appel de Rennes, les juges doivent recourir à la collégialité
Premier président de la cour d’appel de Rennes, Xavier Ronsin a dirigé l’Ecole nationale de la magistrature de février 2012 à avril 2016. Pour M. Ronsin, la formation des magistrats et la collégialité sont les meilleurs remparts contre l’individualisme excessif et les erreurs judiciaires.

Comment faire pour gommer l’impression d’imprévisibilité des décisions de justice ?

La justice n’est pas une loterie. Certes, on peut gagner en prévisibilité. Mais un système corseté dans lequel on entrerait un cas pour en faire une décision automatique serait la négation de la justice. La justice, c’est l’application d’une règle de droit à une situation humaine précise. Un mythe de la Révolution voulait que  » le juge est la bouche de la loi « . Elle-même étant parfaite, il n’y a aucune imprévisibilité. Sauf que cela ne marche pas. La loi ne peut pas tout prévoir. Certaines sont bavardes, d’autres se contredisent. Le juge a une place importante dans l’interprétation. Dans le système anglo-saxon où la loi est muette, la jurisprudence est imprévisible avec par exemple des décisions de la Cour suprême américaine qui dépendront de majorités politiques pour dire si oui ou non la peine de mort est applicable.

Cette part d’interprétation laissée au juge n’est-elle pas dangereuse ?

Au contraire, cela a un immense bienfait. Par exemple, en matière de responsabilité, les juges ont construit au fil des ans tout un pan essentiel du droit civil français en partant d’un simple article du code civil de 1804 qui dit que l’on est responsable d’un objet dont on a la garde ! L’européanisation de la justice a accentué la puissance créatrice du juge, rapprochant sur ce point le droit continental du droit anglo-saxon. On a introduit des normes extrêmement créatrices de droit et des notions très floues, comme le droit à un procès équitable ou le respect du principe du contradictoire. Personne ne conteste ces principes, mais ils ont amené à déclarer de nombreux articles de loi contraire à la Convention européenne des droits de l’homme.

Et en matière de choix des sanctions pénales ?

Les grilles d’analyse des peines qui existent dans la pratique anglo-saxonne sont totalement étrangères à notre culture. Nous disons, et les avocats aussi, que toute affaire est différente. L’alcoolisme au volant pouvait ainsi être sanctionné différemment selon les régions. Un sursis avec mise à l’épreuve dans une affaire de vol avec récidive pourra être décidé à Nantes, là où le tribunal de Colmar infligerait de la prison ferme. Il y a un tabou en matière pénale sur la volatilité des choix à l’audience. Ce débat n’existe pas, et on laisse la cour d’appel réguler. Cette forme d’aléa judiciaire mérite d’être corrigée dès la première instance.

Que pouvez-vous faire pour corriger cet aléa ?

Le président d’un tribunal peut constituer des équipes de magistrats intéressés et formés qui vont composer une chambre correctionnelle de manière stable, par exemple pour un an. Cela évite de composer une chambre en extirpant le lundi un juge en pleine construction d’un jugement civil ou le mardi un juge des affaires familiales. Cela participe d’une plus grande cohérence de la justice pénale. Cela s’appelle une politique judiciaire et permet de réfléchir à une stratégie du siège en matière d’aménagement des peines.

Une étude scientifique israélienne a validé le proverbe selon lequel  » la justice dépend de ce que le juge a mangé au petit déjeuner « . C’est tout de même gênant…

Le juge est un homme, une femme, il est fatigué ou pas, il est jeune, âgé, adore le football ou le déteste, etc. On le sait. La réponse, c’est la collégialité, la spécialisation et la connaissance de précédents. Le  » connais-toi toi-même  » est important.

Certains juges accompagnent leurs décisions de jugements d’ordre moral, notamment quand le banc des accusés accueille une personnalité politique. Est-ce de bonne justice ?

La morale est une affaire personnelle, elle n’a pas sa place dans les cours et les tribunaux. Un juge n’est pas là pour faire la morale, pas plus à un homme politique qu’à un autre justiciable. En revanche, dans son appréciation de la sanction, le juge peut prendre en compte l’exemplarité de la peine. Dans ce cas, la responsabilité d’un homme politique peut être un élément de la réflexion. Souvent, devant les cours d’appel, notamment grâce au recul du temps qui permet un débat plus serein et au fait que l’on part d’un jugement contesté, le raisonnement se fait plus juridique.

Mais certaines décisions sont parfois influencées par les convictions politiques ou sociétales du juge…

L’indépendance ne veut pas dire faire n’importe quoi. Mais oui, les juges font bouger les frontières. Le code civil de 1804 tirait des conclusions très fortes de la distinction entre enfant légitime et enfant naturel. Les mœurs ont évolué depuis, et certains textes comme la Convention des droits de l’enfant ont conduit le législateur à bouleverser la loi. Entre-temps, des juges ont pu considérer qu’une situation claire dans la loi était injuste et que c’était à la loi d’évoluer.

Comment faire évoluer la jurisprudence tout en restant impartial ?

Le juge n’a pas le droit de se réfugier derrière le silence de la loi pour ne pas juger. Par exemple en matière de gestation pour autrui, qu’est-ce qui a relevé de la bonne interprétation de la loi ou d’une conviction personnelle des magistrats dans des décisions qui ont pu se contredire ? C’est la grandeur et la difficulté de notre métier, ne pas être dupe de ses a priori et rechercher la solution juste. Il y a plusieurs garde-fous. La formation, bien sûr. On a la chance d’avoir en France un système de formation initiale et de formation continue des magistrats de bien meilleure qualité que dans de nombreux pays. Le second élément, capital, est la collégialité. L’explosion du contentieux et l’insuffisance du nombre de magistrats ont conduit à abandonner le réflexe professionnel de débattre et d’arrêter collégialement une décision…

Le recours à la collégialité serait devenu l’aveu de faiblesse d’un juge incapable de trouver une solution sans déranger ses collègues ! C’est une formidable régression. La collégialité est un rempart contre un individualisme forcené ou l’erreur judiciaire. Or, cette culture a gagné les cours d’appel. On peut avoir un juge seul en premier ressort, contrôlé par un juge seul en appel. Il arrive que le président de chambre se contente de signer l’arrêt rédigé par l’un de ses conseillers sans qu’il y ait eu le moindre débat entre eux. Si le juge est parfait, il n’y a pas de problème. C’est une collégialité de façade.

propos recueillis par Jean-Baptiste Jacquin

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