Est-ce du rôle de la France de se prendre pour la Cour des comptes ?

Dans les grandes lignes, je suis largement d’accord avec les conclusions de la Banque de France. Le problème, c’est que je ne vois pas trop la légitimité de la Banque à parler. Elle n’est pas la Cour des comptes, et elle n’a pas fait, elle même, un travail parfait concernant une juste adéquation de ses dépenses par rapport à ses missions, qui ont largement baissé suite à l’adoption de l’Euro.

Bref, je m’interroge face à la légitimité même du discours.

Quant au fait que l’éducation soit aussi une des causes du marasme économique de notre pays, pour moi, c’est une évidence et ne contredit en rien le discours de la Banque.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 07 Mai 2015

*******************

La Banque de France fustige l’insuffisance des réformes
Le gouverneur, Christian Noyer, s’est livré à un réquisitoire contre les rigidités hexagonales et le choix d’un Etat trop lourd et dépensier

La France va mieux, mais elle décroche face au reste de ses partenaires européens. Si le constat n’est pas nouveau, il n’en est pas moins inquiétant. Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, l’a une fois de plus assené, mardi 5 mai, à l’occasion de la traditionnelle présentation du rapport annuel de l’institution.

Alors qu’il quittera la Banque de France au mois d’octobre, après douze ans de mandat, l’énarque n’a pas mâché ses mots pour décrire les maux dont souffre, selon lui, l’Hexagone.  » La France est impuissante à créer les emplois nécessaires à ses jeunes « , a-t-il expliqué, estimant que les perspectives de croissance pour 2015 et 2016 sont moins favorables chez nous que dans le reste de la zone euro. Et ce, malgré le demi-point de croissance que la baisse des cours du pétrole et la dépréciation de la monnaie unique face au billet vert devraient offrir à notre économie.

Cette embellie conjoncturelle représente d’ailleurs un risque, estime-t-il : celui que la France s’endorme sur ses lauriers, tombe dans l’attentisme.  » Le niveau exceptionnellement bas des taux d’intérêt peut agir comme un anesthésiant « , prévient-il. Or, une hausse durable d’un point de l’ensemble des taux d’emprunt en 2015 coûterait 40 milliards d’euros aux finances publiques, soit deux points de produit intérieur brut (PIB) d’ici à cinq ans, selon les calculs de la Banque de France.

L’ennui, c’est que la dette publique culmine déjà à près de 95 % du PIB, tandis que le niveau de nos dépenses publiques, à 57 % du PIB, détient désormais le record au sein des pays développés,  » sans qu’il en résulte un accroissement du bien-être « , juge M. Noyer.

Pire : selon lui, les performances économiques françaises se révèlent décevantes.  » Une partie du tissu industriel s’étiole, les parts de marchés se rétrécissent « , a-t-il expliqué. Entre 2010 et 2013, l’investissement de l’industrie manufacturière a ainsi progressé de 12,1 % seulement, contre 20,3 % en Allemagne, selon Eurostat. Et le taux de marges des entreprises a plongé de 33,5 % de la valeur ajoutée avant la crise, à moins de 30 % aujourd’hui, selon l’Insee.

Les raisons de ce décrochage ? Les  » freins puissants, souvent anciens « , paralysant l’économie française et l’empêchant de profiter de ses atouts, estime le gouverneur de la Banque de France. Il ne s’est pas privé de lancer un avertissement à François Hollande : pour lever ces rigidités, il convient de poursuivre les réformes structurelles engagées.

Et d’abord, en maîtrisant mieux les finances publiques.  » La France est, dans la zone euro, le pays dont l’ajustement est le plus lent et le moins prononcé depuis 2010, alors même qu’elle a mieux résisté à la crise « , pointe-t-il. Il conviendrait de revoir en profondeur l’action publique. Mais aussi, d’aller au bout des réformes engagées en matière de retraite et de carte territoriale. Si le redécoupage des régions entamé par le gouvernement va dans la bonne direction, il  » reste de portée limitée face à l’ampleur du problème « .

Autre priorité : revoir le fonctionnement du marché du travail, en réduisant là aussi les rigidités, tout en abaissant les coûts. Pour l’énarque, l’un des principaux problèmes est la méthode de revalorisation du smic, trop dynamique et déconnectée de l’évolution de la moyenne des salaires.

Progression de la précarité

De ce fait, elle exposerait les jeunes à un risque de chômage accru. S’ajoutent à cela les seuils sociaux,  » obstacles identifiés à la croissance des entreprises « , la complexité du code du travail ou encore la dualité des contrats de travail, avec d’un côté,  » un régime très protecteur qui dissuade l’embauche « , et de l’autre,  » des régimes précaires dont l’importance croît « . M. Noyer appelle à l’instauration d’une flexisécurité à la française, avec par exemple la création d’un contrat unique.

In fine, rares sont les mesures du gouvernement socialiste trouvant grâce aux yeux du gouverneur, particulièrement critique. La réforme de la formation professionnelle de mars 2014 ? Peu efficace. Celle de l’assurance-chômage ? Insuffisante. La libéralisation des professions réglementées ? Trop timide…  » A cause de notre choix d’un Etat toujours plus lourd et plus dépensier, nous laissons à nos enfants, qui prendront leur retraite à 65 ou à 67 ans, un pays endetté, un niveau de chômage insupportable et un potentiel de croissance plus faible que jamais « , a conclu M. Noyer.

Si ces recommandations rappellent celles de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), elles ne font pas consensus parmi les économistes – en particulier ceux affichant une sensibilité de gauche.  » Certaines sont faiblement fondées « , juge Xavier Timbeau, à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Selon lui, les remèdes prescrits par la Banque de France passent à côté du problème de l’échec scolaire et des failles de l’éducation française, en partie responsables du chômage.

Pour Xavier Ragot, président de l’OFCE et professeur à l’Ecole d’économie de Paris, la Banque de France sous-estime le problème de demande dont souffrent la France et l’Europe à court terme.  » De plus, le problème d’offre de la France, illustré par la désindustrialisation, est en grande partie le résultat de la divergence des coûts unitaire du travail en Europe, un sujet encore tabou. « 

M. C.

Reprise des investissements en vue

Nouveau signe de la reprise économique en France : les chefs d’entreprise de l’industrie manufacturière se préparent à augmenter de 7 % leurs investissements en 2015, selon une enquête de l’Insee publiée mercredi 6 mai. Les industriels français les avaient au contraire réduits de 5 % en 2013, et ne les avaient accrus que de 2 % en 2014. A présent, ils semblent déterminés à dépenser davantage, en particulier pour renouveler et moderniser leurs équipements, alors que nombre d’usines de l’Hexagone vieillissent dangereusement. Seuls 14 % des projets visent à augmenter les capacités de production. La relance des investissements anticipée est particulièrement nette dans l’automobile (+ 15 %), l’un des secteurs qui ont le plus souffert de la crise.


Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *