Un article très intéressant sur une des composantes du FN

Voici un article très intéressant sur une des composantes du FN : le GUD (Groupe Union Défense).

Ce qui est marrant c’est que ce groupe n’entraine pas de changement dans la doctrine historique du FN : ne cherchez pas un renouveau démocratique, il n’y en a pas ! Pire, ce groupe est encore très largement enraciné dans le passé du FN, au temps où Jean-Marie le dirigeait…

Ce que l’on remarque aussi c’est que l’on ne peut pas dire que l’intérêt général soit le cheval de bataille du mouvement : arnaque à l’Etat lors des élections et multiples affaires judiciaires.

Bref, le FN, malgré sa politique de dédiabolisation n’a pas changé : il est et reste un parti anti-démocratique raciste et xénophobe, un parti qui ne servira jamais les Français et fera plonger notre pays à sa ruine s’il arrive aux plus hautes fonctions…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 2 juin 2016

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GUD et FN, affaires de famille

Les  » gudards  » forment un réseau actif et protégé autour de Marine Le Pen, malgré la volonté de la présidente du Front national de  » dédiaboliser  » son parti. Les ex-étudiants d’extrême droite devenus chefs d’entreprise vendent au FN des services qui leur valent des démêlés avec la justice

La lumière tamisée et les lustres qui pendent du plafond évoquent une ambiance de boîte de nuit huppée, où le prix de la coupe de champagne n’est rien comparé au plaisir de se montrer. Des projecteurs dessinent sur un mur des flammes stylisées, qui dansent de gauche à droite. La salle baigne dans un halo bleu-blanc-rouge sur fond de brouhaha joyeux. Tout ce que le Front national compte de dirigeants, de candidats, d’hommes de l’ombre ou en quête de lumière, est réuni Salle Wagram, ce 10 décembre 2015, à deux pas de la place de l’Etoile et des Champs-Elysées.

C’est le dernier meeting de la campagne des élections régionales. Quatre jours plus tôt, lors du premier tour, le parti d’extrême droite a triomphé dans les urnes : il est arrivé en tête dans six régions sur treize et peut compter sur l’élection de plusieurs centaines de conseillers régionaux. Dans le Nord et en PACA, ses deux locomotives, Marine Le Pen et Marion Maréchal-Le Pen, seraient même en position de l’emporter.  » N’ayez pas peur ! « , lance la patronne du FN à la tribune, paraphrasant Jean Paul II pour s’adresser aux électeurs.

Face à elle, au premier rang, interdit d’accès à la presse et aux photographes, Axel Loustau esquisse un sourire. A 45 ans, ce dirigeant d’une entreprise de sécurité privée accède à une forme de respectabilité. Troisième sur la liste du FN dans les Hauts-de-Seine, il va être élu conseiller régional quelques jours plus tard, à la faveur du désistement de la candidate investie en deuxième place. L’homme était plus connu pour son parcours politique à l’extrême droite radicale ou pour sa propension à faire le coup de poing. On l’a vu charger les forces de l’ordre, casque de scooter sur la tête, en marge de La Manif pour tous, en 2013 : il sera menotté et interpellé. Ses démêlés avec la justice comme trésorier de Jeanne, le microparti de Marine Le Pen, ont aussi alimenté la chronique, lorsqu’il a été mis en examen en mars 2015 dans le cadre de l’enquête menée sur le financement du FN.

Son ami Nicolas Crochet, 52 ans, est assis juste derrière lui. Expert-comptable et commissaire aux comptes, un temps pressenti pour diriger la campagne présidentielle de la présidente du FN en 2012, lui, n’est pas candidat aux régionales. Il a pris place aux côtés de sa compagne, qui sera élue dans le Val-de-Marne. Il a aussi été mis en examen en avril 2015, après avoir certifié les comptes de Jeanne, en 2012. Quelques sièges plus loin, leur aîné, Philippe Péninque, 63 ans, accompagne, pour sa part, la tête de liste régionale en Ile-de-France, Wallerand de Saint Just, trésorier du FN et longtemps avocat de Jean-Marie Le Pen. Péninque a conseillé le candidat durant la campagne, comme il le fait de manière officieuse pour Marine Le Pen. Quand il passe devant les journalistes, l’ancien avocat fiscaliste qui a ouvert un compte en Suisse pour Jérôme Cahuzac, en 1992, se bouche le nez de façon ostensible.

Ne manque à cette réunion de famille que Frédéric Chatillon, 48 ans. Le patron de Riwal, le principal prestataire des campagnes électorales du FN (affiches, tracts, etc.) n’a pas travaillé pour le parti durant les régionales. Un contrôle judiciaire le lui interdisait. La société et son dirigeant, véritables chevilles ouvrières du FN pour chaque scrutin depuis les cantonales de 2011, année d’élection de Marine Le Pen à la tête du Front, ont été mis en examen dans le cadre de l’enquête sur le financement du parti. Frédéric Chatillon est aujourd’hui installé à Rome et cherche à diversifier ses activités à l’étranger – ce qui n’empêche pas Riwal de continuer à fournir des prestations au FN. Pour les régionales, Axel Loustau,  » un de mes plus anciens amis « , dit Chatillon, a créé une société, Les Presses de France, qui a repris le flambeau de Riwal et fait appel aux mêmes sous-traitants.

 » Une famille, au sens large du terme « 

Le GUD, Groupe union défense, est connu depuis longtemps au FN ; d’autant mieux que certains de ses représentants œuvrent dans la coulisse pour Marine Le Pen. Les gudards et leurs compagnons de route ont fait de la solidarité une de leurs forces. Ses anciens forment une amicale soudée, et il n’est pas rare qu’ils viennent gracieusement en aide aux plus jeunes. Une manière de  » payer sa cotisation « . Ce groupe étudiant radical, fondé à la fin des années 1960 sur les ruines du mouvement Occident, a perduré dans les facs jusqu’à aujourd’hui, avec plus ou moins de vigueur.

La galaxie voit aussi graviter les anciens d’Occident et d’Ordre nouveau, un groupe néofasciste des années 1970, qui est à l’origine de la fondation du Front national, et dont les membres se confondaient bien souvent avec ceux du GUD. Certains s’agacent de la lumière braquée sur eux par les démêlés judiciaires de la génération Chatillon, celle qui était active dans les années 1990. Tous ne sont pas frontistes, loin de là, puisqu’une partie des troupes est passée par les réseaux de Charles Pasqua, au RPR. Mais peu importent les histoires personnelles, les parcours politiques ou les générations : être (ou avoir été) un nationaliste-révolutionnaire marque au fer rouge.  » C’est une famille, au sens large du terme, qu’on aime ou pas les membres de la famille « , observe un ancien. Chaque année, un dîner de retrouvailles est organisé Chez Jenny, une brasserie alsacienne située boulevard du Temple, à Paris. Et quand un  » ex  » vient à mourir, un avis de décès est envoyé au reste de la bande.  » Ils sont solidaires entre eux, ceux qui n’y ont pas été ne sont pas admis « , reconnaît Wallerand de Saint Just,  » vieux copain  » de Philippe Péninque.

En 2011, c’est tout naturellement que Frédéric Chatillon s’est tourné vers Philippe Péninque pour signer un contrat avec sa société Péninque Consultant. Chargé d’organiser les campagnes du Front national pour les cantonales de 2011, puis la présidentielle et les législatives de 2012, le patron de Riwal voulait bénéficier des lumières de son aîné sur les aspects juridiques, administratifs et fiscaux de son travail.  » J’avais besoin d’une validation de tout ce que je faisais, a expliqué Frédéric Chatillon devant les juges. Je pouvais l’appeler quand je voulais. C’est un conseil sur la mécanique financière, la manière dont je suis payé, dont je facture (…). Un conseil permanent sur la manière dont je devais gérer mes affaires, comme un “ange gardien”.  »  » Mon travail était juridico-administratif, assez extérieur, nous a assuré de son côté Philippe Péninque. C’était très prenant et assez chiant. « 

L’ » ange gardien  » a perçu 52 863 euros pour sa prestation. Son rôle n’a pas attiré l’attention de la justice, qui ne l’a pas entendu dans le cadre de son enquête sur l’affaire Jeanne, le microparti de Marine Le Pen.Les juges soupçonnent la mise en place d’un système de surfacturation visant à escroquer l’Etat, qui rembourse les frais de campagne. Au début de l’enquête, ils estimaient au total à10 millions d’euros l’argent détourné par Riwal et Jeanne pour le financement des campagnes présidentielle et législatives en 2012. Frédéric Chatillon est au cœur de ce dossier, pour lequel le parquet de Paris devrait rendre son réquisitoire avant l’été.  » Ce n’est pas un affairiste, c’est un type honnête. A part la pédophilie, on l’a accusé de tout, s’agace Philippe Péninque. Frédéric, je ne partage pas toutes ses opinions, mais c’est un grand ami. « 

L’entre-soi est savamment entretenu chez les gudards. Quand les juges demandent à Axel Loustau, trésorier de Jeanne, pourquoi Benoît Rigolot a été désigné commissaire aux comptes du FN, alors qu’il avait fondé une société d’experts-comptables avec l’ancien trésorier de Jeanne, Olivier Duguet, il répond :  » On se connaît tous depuis vingt ans, on se voit souvent pour déjeuner (…). Il y a peu de CAC – commissaires aux comptes – dans notre famille politique(…), nous préférons travailler entre nous.  » Qu’importe que les règles déontologiques soient malmenées. Nicolas Crochet, lui, est l’objet depuis le mois de mars d’un contrôle mené par le conseil de l’ordre des experts-comptables pour avoir certifié les comptes de Jeanne. Le conseil doit déterminer s’il a respecté ou non les textes régissant la profession, et le renvoyer le cas échéant devant la chambre de discipline, où un magistrat tranchera sur son cas.

Malgré tous ces déboires, le clan Chatillon reste fidèle à Marine Le Pen, qu’il a accompagnée dans son ascension au sein du FN. Le fondateur de Riwal n’a pris sa carte du parti qu’une seule fois, en 2010, pour pouvoir voter en faveur de son amie lors de l’élection à la présidence du Front national, contre Bruno Gollnisch. Tous deux s’étaient rencontrés sur les bancs de la faculté de droit parisienne d’Assas, fief du GUD, vingt ans plus tôt. Aujourd’hui, on le croise dans les grands événements du parti, comme l’université d’été du FN à Marseille, en septembre 2015, ou lors du 1er-Mai, organisé porte de La Villette, à Paris. Grand et taillé dans le roc, il ne passe jamais inaperçu.  » C’est Barbe-Bleue ! « , s’amuse Jean-Marie Le Pen à propos du personnage, père de sept filles.

Avec Axel Loustau, qui est actionnaire minoritaire de Riwal, Frédéric Chatillon s’est imposé auprès de la présidente du FN.  » Entre 2007 et 2010, quand nous avions des problèmes d’argent, personne ne voulait travailler pour le FN. Ils se sont faufilés, la nature a horreur du vide. Ils étaient là, ils ont fait le boulot, ce sont des pros. On n’allait pas prendre la CGT ou le PC pour faire des prestations « , assume Steeve Briois, maire d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) et ancien secrétaire général du FN.

L’épisode  » panama papers « 

Marine Le Pen, en retour, ne lâche pas  » ses  » hommes. Quand Le Monde révèle, en avril, que Frédéric Chatillon et Nicolas Crochet sont impliqués dans la déferlante  » Panama papers  » pour avoir sorti de l’argent de France par un système offshore sophistiqué, aux fins d’échapper aux services antiblanchiment français, les responsables frontistes se relayent dans les médias pour les défendre. Oui, Riwal et son dirigeant continueront à fournir des prestations pour le FN.  » Mettre Frédéric Chatillon à distance, ça serait dire qu’on a quelque chose à se reprocher « , explique un dirigeant frontiste. L’enjeu financier est crucial pour la société, puisque, entre avril 2012 et janvier 2014, Jeanne lui a versé 6 135 660 euros, les comités Marine Le Pen 2012, 1 827 330 euros, et le FN, 241 017 euros. La Fondation Brigitte Bardot représente une maigre source de revenus alternative, avec 427 337 euros versés sur cette période.

Par amitié, ou par goût de la provocation, Marine Le Pen laisse sur son blog  » Carnets d’espérances  » une photo d’elle en train de boire un verre avec Frédéric Chatillon et sa compagne.  » Chatillon, Loustau et les autres, ce sont ses amis. Ils sont dans le décor depuis vingt ans, et vont le rester, c’est comme ça « , assure un  » mariniste « .

Il n’a pas été question non plus de se passer des services de Nicolas Crochet, chargé de verser les salaires des assistants locaux pour le parti au Parlement européen. Les  » Panama papers  » ont pourtant conduit jusqu’aux affaires qu’il mène avec son frère Sébastien. En 2010, Nicolas Crochet a tenté, en vain, de monter un projet pour  » réaliser des prestations dans l’aéronautique civile « , ainsi qu’il l’a expliqué aux juges. Son frère devait confectionner des vêtements pour le personnel navigant et au sol. La société qu’il dirige, Ever Harvest, par laquelle est passé l’argent de Riwal, a investi la somme de 150 000 dollars, dans Airops, une société qui a disparu depuis.

Cette dernière était dirigée par Steve Bokhobza, un quadragénaire affairiste, marchand d’armes à l’occasion, soupçonné d’avoir participé à une tentative de coup d’Etat aux Comores avec Patrick Klein, dont le fils, Edouard Klein, dirigeait le GUD il y a quelques années. Le monde est petit.  » Ce paiement, manifestement sans cause, n’est-il pas un moyen pour vous de faire revenir des fonds en France ? « , ont interrogé les juges.  » Non « , a répondu M. Crochet, indiquant que l’argent avait été perdu après le dépôt de bilan de la société.

La présence des gudards dans l’entourage de Marine Le Pen inquiète pourtant certains au sein FN, pour qui l’épisode  » Panama papers  » pourrait n’être qu’un prélude à de plus sérieux problèmes.  » Comme dirait Victor Hugo, “le coup passa si près que le chapeau tomba”. La prochaine fois, ça ne passera pas à côté « , prédit un frontiste. Frédéric Chatillon entretient volontairement l’opacité sur ses multiples sociétés, dans lesquelles il lui arrive de faire travailler des militants de l’extrême droite radicale. Ces entreprises sont regroupées dans une holding, le groupe Erer –  » aigle « , en breton –, qu’il affirmait détenir à 98 % en janvier 2015, mais officiellement dirigé par un proche.  » Il faut bien comprendre que tout ce montage de sociétés est fait pour échapper à la presse et ses investigateurs « , a avoué l’entrepreneur devant les juges.

Ces derniers ont été intrigués par son train de vie et les dépenses engagées au nom de Riwal. Pourquoi deux grosses cylindrées, une Harley-Davidson et une Triumph Bonneville, payées avec l’argent de sa société ?  » Il y en a une qui est plus pratique pour rouler quand il fait beau, c’est pour mon confort personnel « , répond Chatillon. Les nuits dans des hôtels luxueux, avec une préférence pour l’enseigne Radisson (Radisson Royal Moscou, Radisson Beyrouth, Radisson Pudong de Shanghaï), et des séjours coûtant jusqu’à 2 459 euros ont-ils un  » lien professionnel avec les activités de la société Riwal  » ?  » Ce ne sont pas des voyages d’agrément « , assure l’ancien dirigeant du GUD, qui parcourt le monde de l’Australie à la Roumanie, jusqu’à Hongkong et la Syrie, où sa société dispose d’un bureau.

Caricatures antisémites

Le profil radical de l’intéressé n’est un secret pour personne. Quand il dirigeait le GUD, au début des années 1990, le natif d’Armentières (Nord) a donné un tour  » antisioniste  » et propalestinien au mouvement, soudé jusque-là par son opposition au communisme. Dans le premier numéro des Réprouvés, sous-titré  » L’organe de propagande du Groupe union défense « , imprimé en mai 1992, une fausse interview de Patrick Bruel, recueillie par  » Karl Heil « , est publiée.  » Je dois accepter mes origines. En effet, je suis un peu juif (voir photo) « , font dire les gudards au chanteur, affublé d’un nez proéminent dans un dessin digne des caricatures antisémites des années 1930. Dans les autres pages, le  » courrier du cœur du docteur Minguellet  » côtoie la chronique des  » misères d’Anne Frantz  » et les croix celtiques.

En prenant la tête du FN, en 2011, Marine Le Pen avait pourtant pour objectif d’en finir avec les accusations d’antisémitisme qui pesaient sur sa formation. Pour elle, les camps d’extermination nazis représentent  » le summum de la barbarie « .  » Au FN, il y a encore quelques difficultés à afficher des positions pro-israéliennes, estime l’avocat Gilles-William Goldnadel, farouche défenseur de l’Etat hébreu, qui a rencontré Marine Le Pen, il y a quelques années. Il y a des gens comme Michel Thooris – fondateur d’un officieux cercle projuif – , mais il y a aussi M. Chatillon.  » Le député européen Aymeric Chauprade, qui a claqué la porte du FN en 2015, assure, quant à lui, qu’ » il y a encore des traces d’antisémitisme autour de Marine Le Pen « . A l’été 2014, le géopolitologue s’était attiré les foudres de certains gudards pour avoir publié un texte dans lequel il affirmait son soutien à Israël.  » Dans ce manifeste, je vise un noyau d’antisémites viscéraux obsessionnels qui se définissent comme antisionistes. Je dis que le FN doit rompre avec cette obsession, explique l’eurodéputé. Un petit candidat aux municipales qui dérape, Marine Le Pen et Florian Philippot l’écartent. Mais pour Chatillon, elle ne fait rien. Je ne sais pas comment ils la tiennent. « 

Rien n’arrête la promotion des anciens du GUD dans l’appareil FN. Elu conseiller régional en décembre 2015, Axel Loustau a été nommé en février secrétaire départemental du parti dans les Hauts-de-Seine.  » Loustau, c’est un cadre de valeur. Il a eu sa période folklorique, mais à côté de ça, il dirige quand même une grosse entreprise « , avance Louis Aliot, vice-président du FN et compagnon de Marine Le Pen. A l’automne 2015, Logan Djian, actuel dirigeant du GUD, a été incarcéré pour avoir violemment agressé son prédécesseur Edouard Klein, encore lui. La société Financière Agos, fondée par Axel Loustau, dans laquelle il détient toujours des parts, octroie alors à la compagne de Logan Djian (elle-même salariée de la société depuis de nombreuses années) un prêt de 25 000 euros qui sert à payer la caution. Il a été remboursé depuis. Intrigué par ces mouvements financiers signalés par Tracfin, le service antiblanchiment de Bercy, le parquet de Nanterre a ouvert le 13 mars, comme l’a révélé Mediapart, une enquête préliminaire pour déterminer si ce prêt relevait de l’abus de bien social. Ce que conteste Axel Loustau.

 » Cinéma totalitaire  » au cercle Iéna

Ces derniers mois, le nouveau conseiller régional a régulièrement eu l’occasion de croiser son aîné, Philippe Péninque. Au séminaire du FN, début février, à Etiolles (Essonne), les deux hommes ont plaidé auprès de Marine Le Pen la cause des PME et des chefs d’entreprise. Au Cercle Iéna, ce club privé fondé par d’ex-membres d’Ordre nouveau, ils participent à des conférences dans un luxueux appartement du 16e arrondissement de Paris, avec Eric Zemmour, le romancier Jean Raspail ou encore la représentante en France du mouvement allemand anti- -islam, Pegida. L’ancien cuisinier des Ronchons, un restaurant bien connu de l’extrême droite, aujourd’hui fermé, propose chaque semaine ses services. Un ciné-club y est aussi organisé : le dernier cycle de films était consacré au  » cinéma totalitaire  » – c’est-à-dire de l’URSS, avec entre autres Le Cuirassé Potemkine. Philippe Péninque, qui assure qu’une élection présidentielle ne peut se gagner sans le soutien des classes bourgeoises, se sent comme chez lui. L’ancien avocat fiscaliste est aujourd’hui consultant pour les PME et les PMI. Très pieux –  » Je suis un catholique romain « , dit-il –, l’homme était surnommé  » le Pèlerin  » quand il dirigeait le GUD, dans les années 1970. A l’époque, l’étudiant de Sciences Po portait en permanence un crucifix autour du cou et pouvait se coucher devant un autel les bras en croix, face contre terre.

Pourtant, l’ancien avocat serait un  » gudard de gauche « , pour reprendre l’expression déroutante de Jean-Marie Le Pen. Ou encore  » l’homme de la synthèse nationale-républicaine « , comme l’assurait dans Le Point, en 2014, Florian Philippot, vice-président du FN, avec qui il entretient de bons rapports. Pendant la campagne présidentielle de 2007, Philippe Péninque plaidait auprès du candidat Jean-Marie Le Pen en faveur d’un discours républicain et adressé aux jeunes de banlieues.  » Dès 2006, Péninque s’est imposé par une présence constante, très personnelle, intervenant sur tout et le reste auprès de Marine et de Jean-Marie Le Pen. Il était dans toutes les réunions, toutes les préparations d’émissions. C’est lui qui faisait les discours avec Alain Soral et parfois Olivier Martinelli « , se souvient Jean-François Touzé, qui animait alors la cellule idées-images du parti.

En 2007, Philippe Péninque fonde avec Alain Soral et Jildaz Mahé O’Chinal, un autre gudard, l’association Egalité et réconciliation. S’il n’a jamais été candidat à une élection, l’homme a toujours cherché à structurer politiquement l’extrême droite. Au GUD, il a tenté en vain de lancer une école des cadres. Dans son mémoire de fin d’études,  » La politique à coups de poing ou l’extrême droite extraparlementaire de 1968 à 1975 « , il déplorait les  » pesanteurs sociologiques internes de l’extrême droite  » et le  » caractère des militants plus portés à l’action qu’à la réflexion « . L’homme a gardé de ces années un côté exalté.  » La révolution travaille nuit et jour « , dit-il quand on l’appelle le soir.

Les acteurs de ce milieu ne sont pas tous aussi prompts à répondre. En 2014, alors que l’affaire Jeanne éclate au grand jour, les enquêteurs captent des conversations téléphoniques entre certains gudards. Frédéric Chatillon transmet ses consignes à un proche :  » Zéro réponse à la presse, c’est la consigne, pas un mec parle à la presse. Les journalistes, ils t’appellent, tu raccroches tout de suite. Appel masqué, tu décroches pas.  » Un autre jour, Axel Loustau s’interroge auprès de Frédéric Chatillon des conséquences possibles de cette affaire.  » Est-ce que c’est pas non plus des trucs de Parigots ? Tu vois, j’me dis, le chômeur d’Hénin-Beaumont, le retraité pied-noir de Nice, il s’en bat les couilles.  » N’ayez pas peur.

Olivier Faye et Simon Piel


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