La loi Macron sera inefficace… 1/2

Notre pays souffre d’un grand manque de compétitivité. A ce titre, je me pose des questions quant à la future Loi Macron. En quoi cette loi va redonner le souffle nécessaire et suffisant à notre économie ?

Comment penser que la libéralisation des professions protégées vont révolutionner le pouvoir d’achat de tout à chacun ? Combien de fois allons-nous chez le notaire, l’huissier ou le commissaire-priseur par an ? Ca permet de gagner quelques centaines d’euros quand on achète un appartement, mais on n’achète pas, loin s’en faut, un appartement tous les jours !

Comment penser, de la même façon, qu’il suffise d’ouvrir les commerces le dimanche douze fois par an pour révolutionner la consommation en France ? Là aussi, les solutions sont futiles par rapport à l’énoncé du problème !

Peut-être que la réforme sur la justice prud’homale pourra donner un peu plus confiance aux chefs d’entreprise, mais elle ne révolutionnera pas le marché de l’emploi tant les carcans bridant l’embauche en entreprise sont variés et nombreux !

Quant à la revente des actifs de l’Etat, cela relève de l’incompétence pure quand on voit la situation décriée de nos autoroutes, revendues il y a quelques années, et qui profitent largement à ses acheteurs.

Sur l’épargne, l’actionnariat salariaux, l’investissement des business angels ou encore la libéralisation des transports en car, là, on touche au ridicule et aux mesurettes de bas étage.

La Loi Macron ne révolutionnera en rien notre économie et celle-ci restera en berne tant que de réelles mesures ne seront pas engagées…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 10 décembre 2014

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La loi Macron ne relancera pas l’économie
Les économistes jugent que les grandes lignes de la loi  » croissance et activité  » sont un début

De grandes ambitions pour une loi  »  fourre-tout  « . Après les députés socialistes, mardi 9  décembre, Emmanuel Macron, le ministre de l’économie, présentera son projet de loi  »  croissance et activité   » en conseil des ministres, mercredi.

En attendant d’en connaître les détails, les économistes portent un premier jugement contrasté sur les grandes lignes de ce texte transversal, dont l’objectif est de  »  déverrouiller l’économie française  « . Et notamment, de redonner du pouvoir d’achat aux ménages en ouvrant à la concurrence certaines professions réglementées, tout en simplifiant la vie des entreprises.

Verdict  ? Encourageant mais peut mieux faire, jugent les experts de toutes sensibilités interrogés par Le Monde.  »  Cette loi est partie pour être une mosaïque de petits pas allant dans la bonne direction, mais pas assez loin  « , estiment Philippe Aghion et Gilbert Cette, économistes et coauteurs de l’ouvrage Changer de modèle (Odile Jacob, 272  pages, 22,9  euros).  »  Elle ouvre quelques pistes prometteuses  « , approuve Jean-Marc Daniel, professeur à l’ESCP Europe.  »  Elle soulève de nombreux tabous, mais son impact sur la croissance risque d’être anecdotique  « , commente pour sa part Xavier Timbeau, à  l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Premier grand chantier ouvert par M. Macron  : les professions protégées. Le ministre prévoit de libéraliser l’installation de nouveaux arrivants chez les notaires, les huissiers ou les commissaires-priseurs, et de bouleverser leurs grilles tarifaires. Un projet qui crispe la majorité. Mais parmi les économistes, il fait à peu près consensus  : ouvrir ces métiers à la concurrence, à condition que ce soit bien fait, permet de faire baisser les prix et de gagner un peu de pouvoir d’achat. M.  Cette estime même qu’à long terme, le produit intérieur brut de la France pourrait gagner un point si toutes les professions protégées sont incluses.
 » On peut s’attaquer aux rentes « 

 »  L’ennui, c’est que cette loi ne s’attaque pas aux deux secteurs où les rentes sont les plus nuisibles à notre économie, à savoir l’immobilier et le transport ferroviaire  « , regrette Patrick Artus, chef économiste chez Natixis. De plus, certaines professions ont été sorties de son périmètre.

La réforme des pharmacies a ainsi été confiée à la ministre de la santé, Marisol Touraine. Quant à l’hypothétique statut d’avocat d’entreprise, sa création est laissée au bon vouloir des députés.

De son côté, Ludovic Subran, chef économiste d’Euler Hermes, regrette qu’au lieu de s’attaquer à quelques professions séparément, le gouvernement n’ait pas adopté une grande loi-cadre libéralisant tous les secteurs protégés, qui aurait été défendue directement par Matignon.  »  Elle aurait eu plus de poids et aurait évité les disputes entre ministères  « , juge-t-il.  »  Même si le texte est moins ambitieux qu’annoncé, il introduit l’idée que l’on peut s’attaquer aux rentes « , salue tout de même Augustin Landier, à l’Ecole d’économie de Toulouse.

Autre grand chantier  : la réforme du marché du travail. S’il semble peu probable que M.  Macron s’attaque aux 35  heures et au smic, elle devrait comporter deux grands volets. Le travail du dimanche, d’abord, qui devrait être assoupli  : les commerces non alimentaires pourraient travailler cinq dimanches par an sur simple demande (et non sur autorisation préalable), et jusqu’à douze au total.  »  Les touristes chinois consommeront peut-être plus, mais pas les Français, car leur pouvoir d’achat est sous pression  « , juge Benjamin Coriat, des Economistes atterrés, estimant que cela relève plus du choix de société que du soutien à la croissance.  »  Une telle mesure fait beaucoup de bruit, mais son impact sur la croissance sera anecdotique  « , abonde Alexandre Delaigue, professeur d’économie à Saint-Cyr.

La réforme de la justice prud’homale, qui permettrait de réduire les délais de traitement des dossiers (15,5 mois en moyenne) et de mieux former les juges est, elle, jugée prometteuse.  » Cela réduirait les incertitudes juridiques et encouragerait les patrons à embaucher  « , dit M. Cette, rappelant que la France est le seul pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), avec le Mexique, où les juges prud’homaux (ou équivalent) ne sont pas des professionnels.

Troisième chantier  : les cessions d’actifs de l’Etat, envisagées à hauteur de 5 à  10  milliards d’euros ces dix-huit prochains mois, dont 4 milliards seraient affectés au désendettement du pays.  » S’il s’agit de gagner de l’argent à court terme en vendant des actifs rentables permettant de rembourser la dette sur le long terme, l’opération sera perdante « , assure M. Artus.
Redorer l’image de la France

A ces mesures devraient s’ajouter une demi-douzaine d’autres visant à encourager l’épargne et l’actionnariat salariaux, l’investissement des business angels ou encore la libéralisation des transports en car.  »  Là encore, si toutes ces pistes sont intéressantes prises une à une, on a du mal à saisir la cohérence d’ensemble, notamment par rapport aux dispositifs tels que le crédit d’impôt compétitivité emploi ou le pacte de responsabilité  « , juge Eric Heyer, à l’OFCE.

Difficile, dans ces conditions, de mesurer l’impact qu’aura la loi Macron sur la croissance.  » D’autant que ces mesures prendront du temps à faire effet  « , commente M.  Landier. La plupart des économistes jugent néanmoins qu’il ne sera pas très important. Et que ce dispositif ne débloquera sûrement pas les 6  milliards d’euros de pouvoir d’achat promis par Arnaud Montebourg, le prédécesseur de M. Macron.

Reste qu’en attaquant des chantiers jusque-là jugés tabous, la loi pourrait redorer un peu l’image de la France à l’étranger.  »  Paris aura des arguments pour convaincre Bruxelles que nous faisons des efforts structurels  : ce n’est pas négligeable  « , juge M.  Delaigue.

De même, les investisseurs prêtant à la France seront rassurés quant à la capacité du pays à s’attaquer aux sujets délicats. Toujours ça de pris. A  condition que le projet ne soit pas trop détricoté avant son adoption par l’Assemblée…

Marie Charrel


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