Il est plus que temps d’augmenter le prix du tabac et de l’alcool pour lutter contre les addictions

Les addictions coûtent cher, très cher… A ce titre, il est plus qu’urgent que le prix de l’alcool et du tabac soit très fortement revu à la hausse afin de lutter contre ces addictions. Alors, bien évidemment, il serait plus qu’hasardeux de hausser de manière substantielle le prix d’une bouteille de vin de grand cru. A ce que je sache, on ne se saoule pas au grand cru, ni à la bouteille de Whisky à 60Euros ! Néanmoins, l’alcool premier prix ainsi que le tabac mériteraient de se voir taxer bien plus pour lutter contre l’addiction qui nuit fortement à l’intégrité physique de bon nombre de nos concitoyens.

Il vaut mieux hausser le prix de ces produits et faire des mécontents plutôt que d’avoir des morts car rien n’est plus précieux que la vie humaine…

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 12 Septembre 2015

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Alcool, tabac… le vrai coût pour la société
Selon une étude, les drogues licites et illicites pèsent pour près de 250 milliards d’euros chaque année
Coût des vies perdues, coût des pertes de production ou de la qualité de vie mais aussi montant des dépenses publiques de soins, de prévention et de répression… En s’appuyant sur des données épidémiologiques et sanitairesse rapportant à 2010,l’économiste Pierre Kopp a calculé la totalité de ce que coûtent chaque année les drogues licites et illicites à la société française. Les chiffres sont impressionnants : 120 milliards d’euros pour le tabac, 120 milliards pour l’alcool et 8,7 milliards pour les drogues illicites. Ces chiffres prennent en compte les recettes des taxes et les économies que représentent les retraites non versées.

Publiés vendredi 11 septembre, ces chiffres chocs du coût social des drogues sont la conclusion d’une étude financée par la Direction générale de la santé et pilotée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). A trois jours du début de l’examen du projet de loi de santé au Sénat, ils tombent à point nommé pour la ministre de la santé, Marisol Touraine, qui s’apprête à faire face à de nouveaux assauts parlementaires contre la loi Evin ou la mise en place du paquet de cigarettes neutre. La France compte 13,4 millions de fumeurs quotidiens et 3,8 millions d’usagers  » à risque  » de l’alcool.

 » Cynisme de façade « 
 » Ce rapport doit permettre de prendre conscience du coût important des drogues pour la collectivité  » et de  » hiérarchiser les problèmes afin de mieux éclairer les choix d’engagement de dépenses publiques « , souligne Pierre Kopp, déjà auteur il y a quinze ans d’une première édition de cette étude. Professeur à l’université Panthéon-Sorbonne (Paris-I), il est également l’avocat du Comité national contre le tabagisme pour le compte duquel il a déposé en janvier une plainte contre les quatre grands cigarettiers pour  » entente illicite sur les prix « . Il y a quelques mois, il a co-écrit pour le think tank Terra Nova une étude sur les gains qu’apporteraient à l’Etat une libéralisation et une taxation du cannabis.

Pour parvenir à ces quelque 250 milliards d’euros, Pierre Kopp a d’abord pris en compte le nombre de vies perdues chaque année en raison des drogues légales et illégales, soit 49 051 décès liés à l’alcool, 78 966 liés au tabac et 1 605 aux drogues illicites. A l’appui de ses calculs, il a ensuite retenu une valeur moyenne d’une vie en France de 3 millions d’euros, soit 115 000 euros par année de vie perdue. Un chiffre issu du rapport Quinet ( » Eléments pour une révision de la valeur de la vie humaine « ) publié en 2013, recommandé d’utiliser en France dans les calculs socio-économiques.

Pierre Kopp a également intégré le nombre de malades liés à ces consommations (672 000 pour le tabac, 1,2 million pour l’alcool). Et, fort de ces chiffres, il a pu établir les pertes pour la société, appelées  » coûts externes « , qui intègrent aussi bien la valeur des vies humaines perdues que la perte de la qualité de vie ou les pertes de production pour les entreprises.

Tout en reconnaissant que certaines données étaient plus difficiles à établir que d’autres – comment par exemple déterminer avec précision le temps consacré par un policier ou un gendarme à lutter contre la drogue ? Pierre Kopp a également recensé les dépenses engagées par l’Etat pour les soins, la prévention et la répression.

Pour être complet, il a enfin pris en compte les économies de retraites non versées et les recettes apportées par les taxes (13,3 milliards d’euros). Des chiffres mis en regard du coût des soins (8,5 milliards pour l’alcool et 25, 9 milliards pour le tabac), une façon de battre en brèche l’idée selon laquelle ces deux drogues licites rapporteraient au final à l’Etat plus qu’elles ne coûtent.  » Leur coût social est monstrueux par rapport à d’éventuelles recettes de taxation « , assure Pierre Kopp, qui voit chez ceux qui utilisent cet argument un  » cynisme de façade basé sur un chiffre faux « .  » La taxation sur les alcools ne représente que 37 % du coût des soins des maladies engendrées par l’alcool « , écrit-il.

Soucieux que sa démonstration soit  » irréprochable « , Pierre Kopp fait le choix de ne pas afficher le  » total arithmétique  » des coûts, car un grand nombre de décès ou de maladies peuvent être imputés à plusieurs causes. Néanmoins, le montant d’environ 250 milliards d’euros qui serait ainsi obtenu  » ne doit pas être loin de la vérité « , affirme-t-il au Monde, jugeant que les chiffres liés à l’alcool sont toujours  » sous-estimés « . Les coûts engendrés par les infractions, délits et crimes (violences, vols, viols, accidents de la route) imputables à la consommation d’alcool ne sont par exemple pas pris en compte.

Et si les  » coûts sociaux par catégories de drogue sont approximativement trois fois plus élevés  » par rapport à une précédente version de l’étude parue en 2006,  » ce n’est pas la conséquence d’une augmentation de la consommation et d’une politique publique inefficace  » ou d’un  » changement négatif majeur du paysage des drogues en France « , prévient l’auteur, mais plutôt en raison d’une  » amélioration des connaissances épidémiologiques  » (notamment sur le nombre réel de morts imputable au tabac) et d’un  » changement dans la méthodologie du calcul économique adopté officiellement par les pouvoirs publics « . L’économiste estime enfin qu’il est impossible d’établir toute comparaison avec des pays étrangers, car il y aurait trop d’incertitudes sur les éléments pris en compte dans l’équation.

Interrogé sur les mesures qui permettraient de dégager des économies, Pierre Kopp suggère par exemple le doublement du prix du tabac, qui permettrait selon lui de  » réduire de moitié la consommation « .

François Béguin


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