Une ordure et une pourriture de la République

Le préfet Gardère a été pris la main dans le sac : espérons que les sanctions seront à la hauteur des fautes…

Encore une fois des réseaux politiques, maçonniques et policiers sont visés…

Il est temps de mettre ce genre de pourris derrière les barreaux, de leur faire payer une très forte amende et de les expulser définitivement des sphères de pouvoir de l’Etat !

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 24 février 2016

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Les troubles affaires du préfet Gardère
La mise en examen de l’ex-commissaire révèle une dérive entre réseaux politiques, maçonniques et policiers
L’affaire a accaparé M. Gardère -durant tout l’automne 2015. M. Mokono se montre insistant et n’hésite pas à se revendiquer -d’illustres parrains parmi lesquels Manuel Valls, Claude Bartolone et Stéphane Le Foll. Il demande aussi au préfet de l’introduire dans sa loge maçonnique, à la Grande Loge nationale française.

Alain Gardère et son directeur de cabinet, Pierre Cournil, également mis en examen, s’inquiètent qu’ » on  » les accuse  » de ne pas jouer le jeu « . Les enquêteurs de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) écoutent M. Gardère et M. Cournil s’interroger sur la véracité du CV de M. Mokono, sur ses supposés appuis. Sans oser aller vérifier à la source. L’auraient-ils fait, qu’ils auraient découvert que l’homme dit vrai, au moins sur ses connaissances.  » C’est un militant que nous croisons depuis des années lors des rassemblements socialistes « , confirme au Monde le chef de cabinet du premier ministre, Sébastien Gros.

Le courrier qui arrive de l’Elysée, fin novembre, règle la question en quelques heures. Contacté par Le Monde, M. Rullier indique qu’il l’a envoyé  » afin que M. Mokono soit reçu et que sa candidature soit étudiée.  » Rien de plus.  » M. Mokono est un militant socialiste qui avait une petite expérience en matière de sécurité « , précise M. Rullier. Il souligne par ailleurs que celui-ci était au chômage et qu’il avait été blessé le 13 novembre 2015 lors de l’attentat au Stade de France  » en sauvant la vie d’au moins deux personnes « . Interrogé, M. Mokono assure de son côté que  » personne ne l’a imposé à M. Gardère  » :  » J’ai été choisi sur la base de mes compétences, à la suite de plusieurs entretiens. « 

Cuvée de la Légion étrangère
Les juges n’en ont pas moins mis en examen Alain Gardère pour ces faits, qualifiés de  » détournement de fonds publics « . Les écoutes sont sans ambiguïté.  » Je ne veux pas qu’un jour on puisse dire que j’ai créé un emploi fictif. Comprends-tu ? « , assure M. Gardère à M. Mokono le 30 novembre, après avoir reçu le courrier de l’Elysée.  » Avec le papier – la recommandation – , j’ai heu… j’ai une, comment dire, une espèce de… de… d’assurance qui me permet de, de justifier que je prends un emploi supplémentaire, voilà, point barre « , ajoute-t-il.

Il s’agit d’un service rendu, parmi de nombreux autres.  » Corruption passive « ,  » prise illégale d’intérêts  » et  » recel d’abus de biens sociaux  » : les chefs de mis en examen sont nombreux. L’exercice de hautes fonctions publiques semble être devenu un moyen pour M. Gardère, 59 ans, d’organiser son confort en rendant des services.

Un mode de fonctionnement dans lequel se sont engouffrés des réseaux politiques, maçonniques et policiers construits tout au long de sa carrière, des commissariats de police jusqu’au cabinet de Claude Guéant au ministère de l’intérieur, où il a été directeur adjoint en 2011. Cela va de l’adjointe (Les Républicains) au maire de Marseille Nora Preziosi, qui le sollicite pour qu’il facilite l’obtention d’un agrément à une société de sécurité dirigée par l’une de ses connaissances – en vain, car les documents fournis se révéleront faux –, à ses amis policiers passés au privé.

L’univers concurrentiel de la sécurité privée profite aussi de la brèche. Alain Gardère n’a pas de pouvoir sur la délivrance des agréments, mais il recommande untel, informe ceux dont il est proche de l’ouverture prochaine d’un marché, et met en relation les uns et les autres pour qu’ils fassent affaire. En retour, beaucoup se montrent prévenants, voire reconnaissants.

Les cadeaux ? Un système d’alarme à des conditions avantageuses, des places pour une vente privée du joaillier Boucheron, une voiture pour effectuer des trajets privés. Le directeur de la sécurité de Disneyland Paris l’invite à assister depuis des loges VIP au concert de U2 pour le remercier de lui avoir présenté Tibor Vass, le dirigeant de l’entreprise LPN sécurité. LPN sécurité a aussi remporté le marché de la sécurité des nouveaux locaux de Charlie Hebdo, une décision dont M. Gardère s’attribue les mérites en privé.  » Je ne sais pas pourquoi M. Gardère a dit cela. Je l’ai rencontré pour la première fois deux mois après la signature du contrat, à l’été 2015 « , s’étonne M. Vass.

La justice soupçonne M. Gardère d’avoir accéléré la délivrance des cartes dites de  » surveillance humaine  » permettant de solliciter un port d’arme pour les employés de cette même entreprise. Une fois de plus, M. Vass dément :  » Mes employés bénéficiaient des autorisations nécessaires.  » Et si M. Vass a offert deux caisses de vin à M. Gardère,  » c’était pour faire la publicité d’une cuvée commercialisée par les anciens de la Légion étrangère « .

Fort de ce qu’il considérait comme des entrées au sein du groupe Bolloré, Alain Gardère ne ménagera pas non plus sa peine pour rendre service à Serge Sellan, rencontré du temps où le premier était préfet délégué aux aéroports de Roissy et du Bourget, entre septembre 2012 et décembre 2014. En 2015, M. Sellan, qui dirige le groupe de services aéroportuaires 3S, lui fait part de sa volonté de développer son activité en Afrique, pré carré du groupe Bolloré. Alain Gardère, qui a passé quelques jours de vacances en Corse à l’été 2015 à l’invitation de M. Sellan, use de ses réseaux, dont Ange Mancini, ancien coordinateur du renseignement à l’Elysée sous l’ère Sarkozy, aujourd’hui conseiller Afrique du groupe Bolloré. Le 19 novembre, M. Sellan remercie son ami : une branche de son groupe vient d’emporter un contrat lancé par l’Etat et dans lequel une filiale fret de Bolloré est impliquée. Devant les enquêteurs, M. Sellan a assuré que les interventions de M. Gardère n’avaient servi à rien.

Les mauvaises habitudes du préfet ne datent pas du Cnaps. Les -policiers de l’IGPN commencent tout juste à tirer le fil, mais les éléments obtenus par Le Monde sur le passage d’Alain Gardère à Roissy interrogent sur la légèreté qui a entouré sa nomination au Cnaps, alors que sa proximité avec plusieurs chefs d’entreprise, dont un certain nombre œuvrent dans la sécurité privée, était déjà connue.

Dès la mi-2014, la police aux frontières (PAF) s’est émue auprès de sa hiérarchie du laxisme dans la délivrance des badges d’accès aux zones sécurisées de l’aéroport. De 2011 à 2013, le taux d’acceptation est passé de 64,23 % à plus de 90 %, alors que la PAF a émis pas moins de 54 % d’avis défavorables en 2013. Au point que M. Gardère a dû se justifier, le 18 août 2014, dans un courrier au directeur de la police, où il se dit victime de  » chefs de -service mal intentionnés « .

Les chiffres des contrôles de -sûreté des entreprises présentes à Roissy sont éloquents. Leur nombre est le même sous M. Gardère, en 2014, que sous son successeur, en 2015. Mais le nombre de procès-verbaux dressés est presque deux fois moindre en 2014 (275 contre 425), et le total des amendes est trois fois moindre (147 645 euros contre 462 595 euros). Le préfet intervenait systématiquement pour annuler et alléger les sanctions.

 » Mesures spéciales « 
Et puis il y a ce badge pour  » la zone de sécurité à accès réservé  » délivré en 2013 à Sidney Israël, le patron du cabaret parisien Le Paradis -latin, très prisé des policiers. Le -document, signé de M. Gardère, indique que l’intéressé est  » chargé de mission  » à la préfecture, ce qui est faux, bien sûr. M. Israël explique au Monde qu’il s’agissait de pouvoir  » accueillir les clients importants « , et qu’il n’y a jamais eu aucune contrepartie.

Le préfet, qui a autorité sur l’aéroport du Bourget, facilite aussi la vie des grandes fortunes, en accordant des  » mesures spéciales de sûreté  » à la famille Pinault et à ses chauffeurs, pour qu’ils accèdent directement à leur jet, ou en donnant  » à titre dérogatoire « , des  » titres de circulation permanents  » aux personnels de la présidence du groupe LVMH.

M. Gardère a du mal avec les règles, jusqu’à celles du code de la route. Courant 2014, le centre de traitement des amendes bloque ses demandes d’ » indulgence « . Les infractions, des excès de vitesse et des feux grillés, sont devenues trop nombreuses – plusieurs dizaines en 2014. Sans compter les mensonges : le préfet assure qu’il met un gyrophare. Faux, répond le patron du centre qui est allé vérifier sur les clichés des radars.

Ni l’avocat de M. Gardère, Jean Veil, ni celui de M. Cournil, Anne-Laure Compoint, n’ont souhaité réagir. Devant les juges, le 21 janvier, Alain Gardère n’a pu que -reconnaître  » l’engrenage  » dans -lequel il était. Avant de s’embrouiller dans une double négation :  » Je ne paie pas jamais rien. « 

Laurent Borredon, et Simon Piel


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