Quand le Royaume-Uni va trop loin en matière de droit du travail

Souvent, le Royaume-Uni est en avance en terme économique. Mais, il y a des bémols… et des gros…

Le Droit du travail est parfois ouvertement bafoué. Il n’est pas normal de considérer comme autoentrepreneur quelqu’un qui n’a qu’un seul employeur. Dans ce cas, ça s’appelle du salariat, point.

Tout le monde y perd dans cette situation : l’Etat qui n’a pas les entrées sociales auxquelles il pourrait prétendre, et le salarié qui est beaucoup moins bien protégé.

Il y a un juste milieu entre la situation Française où bon nombre de chômeurs considèrent leurs indemnités comme un salaire, et une situation ultra-libérale où le travailleur est dans une précarité absolue avec ses contrats zéro heure.

Il faut trouver l’équilibre. Pour l’instant, il ne se situe ni en France, ni au Royaume-Uni.

Un article du journal ‘Le Monde’ daté du 22 Août 2014

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L’autoentrepreneur britannique, l’autre visage de la flexibilité du marché du travail
Depuis 2008, les deux tiers des emplois créés l’ont été sous ce statut
Londres Correspondance

Au Royaume-Uni, le recours au travail flexible a connu un bond spectaculaire pendant la crise économique. Une nouvelle étude du Bureau national des statistiques (ONS), publiée mercredi 20 août, vient le prouver. Entre janvier 2008 et juin 2014, le nombre d’emplois au Royaume-Uni a augmenté de 1,1 million : 732 000 étaient des autoentrepreneurs. Soit les deux tiers des nouveaux emplois. Voilà qui explique en grande partie le relativement faible taux de chômage actuel, à 6,4 %.

Si ce statut est depuis longtemps utilisé dans le bâtiment, l’artisanat ou les taxis, il s’étend désormais aux cols blancs. L’étude de l’ONS montre que le tiers des nouveaux autoentrepreneurs se trouve dans la catégorie  » dirigeants et directeurs « .

Derrière cet intitulé se cachent de nombreux cadres moyens qui ont perdu leur emploi, avant de reprendre le même travail dans la même entreprise, mais avec un statut d’autoentrepreneur. Pour l’employeur, cela rend toute cessation d’activité beaucoup plus facile. Et de ne pas avoir à payer pour la retraite des employés ni un certain nombre d’autres allocations sociales.

Londres est l’endroit où la proportion d’autoentrepreneurs est la plus forte, avec 17,3 % des emplois. Ceux-ci ont tendance à travailler de plus longues heures : un tiers passe plus de quarante-cinq heures par semaine au travail, contre le quart des employés.

De plus, leur rémunération est en très forte baisse. Leur revenu médian a chuté de 22 % depuis 2008, en valeur réelle, à 207 livres (260 euros) par semaine. Pour beaucoup d’anciens employés qui ont été licenciés, retrouver une activité avec ce nouveau statut a donc eu un effet simple : travailler plus pour gagner moins.

Contrats à zéro heure

L’explosion du nombre d’auto-entrepreneurs illustre une des caractéristiques actuelles de l’économie britannique : la flexibilité de son marché du travail. Au début de la crise, les économistes craignaient une très forte hausse du chômage. Mais celui-ci a finalement connu un pic autour de 8 % seulement, avant de redescendre rapidement. Beaucoup d’employés ont préféré accepter une baisse de leur salaire ou devenir autoentrepreneurs plutôt que de perdre leur emploi.

Une autre explication du phénomène est le développement des  » contrats à zéro heure « . Ceux-ci permettent à l’employeur de donner du travail – et un salaire – à son employé uniquement quand il en a besoin.

Leur utilisation a fortement augmenté et, faute de statistiques précises, leur nombre est évalué entre un demi-million et un million d’employés. Cela a provoqué une importante controverse sur l’exploitation dont ceux-ci seraient victimes, corvéables à merci suivant le bon vouloir des entreprises.

Néanmoins, cette forte flexibilité du marché du travail présente d’importants avantages, selon Jonathan Portes, du National Institute of Economic and Social Research :  » Il y a bien sûr de nombreuses limites, mais c’est nettement préférable au chômage de masse de la France ou de l’Espagne.  » Cela évite en particulier de laisser une génération entière sans emploi, avec de très importantes séquelles sociales sur le long terme.

Eric Albert


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